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Budget 2016. La guerre contre les classes populaires continue

Leo Serge Tout au long de la journée de mercredi, le gouvernement a annoncé le dernier budget du quinquennat d’Hollande qu’il souhaite faire voter. Comme dans tous les budgets, il faudrait une analyse fine, alors qu’on ne dispose pour l’instant que d’effets d’annonces… mais ceux-ci ont déjà le mérite de se situer totalement dans la ligne de la politique d’Hollande depuis son élection : une politique de droite au service des plus riches.

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Le patronat peut se rassurer, il aura moins d’impôts à payer : 9 milliards de cadeaux

La décision la plus importante concerne les baisses des impôts sur les entreprises (systématiquement rebaptisés « charges ») : 9 milliards de cadeaux. Cette baisse est présentée comme un « engagement tenu », l’objectif annoncé étant en effet, sur la période de 2014 à 2016, d’une diminution de 33 milliards d’euros au total. Au cas où on l’aurait oublié, cela nous rappelle combien le gouvernement de Valls est « pro-business » comme il l’avait clamé en octobre 2014.

Parallèlement à ce cadeau au patronat, simultanément, les dépenses de l’État doivent baisser. Et la méthode est toujours la même. Il s’agit de justifier la baisse des dépenses de l’État en brandissant un déficit créé artificiellement — rappelons que la dette d’État profite aux investisseurs privés, c’est-à-dire aux plus riches. Ici, on parle « d’efforts » de 10 milliards pour la sécurité sociale et les collectivités locales, et en tout de 16 milliards pour les administrations publiques. Autrement dit, des baisses de remboursement de soins, des services sociaux de plus en plus faibles, des fonctionnaires encore plus pressurés, des classes d’école à 35, etc. bref, des services publics qui marchent avec des budgets déjà insuffisants recevront encore moins de financement. Des efforts qui sont donc toujours fournis par ceux qui ont besoin de services publics alors que les riches peuvent s’en passer.

Baisse de l’impôt sur le revenu de 2,1 milliards d’euros pour les « classes moyennes »

Alors qu’il faudrait revoir entièrement la politique de distribution des impôts pour qu’elle soit plus égalitaire — impossible dans un État capitaliste où les manettes économiques sont aux mains de la bourgeoisie —, avec Hollande et Sapin, son ministre du Budget, c’est une bonne vieille technique qui est de retour : on annonce des baisses d’impôts juste avant les élections présidentielles, après les avoir massivement augmentés, y compris pour les ménages les plus modestes. Manœuvre électorale récurrente, créant l’illusion d’une politique sociale juste.

Il s’agit de baisser les impôts sur le revenu pour 8 millions de contribuables. La TVA, particulièrement élevée, qui touche riches et pauvres de la même façon et qui est donc l’impôt le plus injuste, n’est donc nullement remise en cause. Non, il s’agit d’une baisse qui profite d’abord aux « classes moyennes », c’est-à-dire un électorat concrètement disputé par le PS au profit des partis de la droite républicaine, dans un contexte où se dessine pour lui une nouvelle claque aux régionales. Qui donc est concerné derrière ce vocable flou des « classes moyennes » qu’affectionnent tant la presse de droite que celle de « gauche », et qui sert de longue date à éviter de parler de la classe ouvrière dans toute sa diversité, et donc à l’invisibiliser ? Il s’agit de 8 millions de contribuables dont le salaire net est inférieur à 1 920 euros par mois (pour un célibataire) et 3 470 euros (pour un couple sans enfant). Le gain moyen par foyer est estimé à 252 euros. En réalité, il s’agit donc des travailleurs qui sont en dessous du revenu médian (autour de 1 700 euros) mais qui sont imposables, et ceux qui sont à peine au-dessus. Mais ces travailleurs qui doivent compter chaque euro vont vite s’apercevoir qu’il s’agit d’un effet d’annonce, car il s’agit en réalité d’un retour aux taux d’imposition de 2012.

L’hypocrisie de la manœuvre électorale et de la communication apparaît une fois de plus, mais la croyance des gouvernants (appuyée, cependant, par les directions syndicales qui se gardent bien, même quand elles ne sont pas franchement collabos, d’attaquer ce vocable et de mettre à bas ces manœuvres) dans la toute-puissance de l’effet d’annonce et de la bonne « com’ » relayée par les médias aux ordres est assez fascinante. Cependant la ficelle est tellement grosse que ces mêmes médias sont bien obligés d’admettre que ces baisses d’impôts seront essentiellement financées par… des économies ! Les Échos — journal des milieux financiers et patronaux — ont ainsi titré : « Budget 2016 : les impôts baissent pour les entreprises, pas pour les ménages ».

Autrement dit une baisse des prestations sociales et étatiques ! En bref, un transfert de richesses des plus démunis vers… ces « classes moyennes ». Opération qui se paye de plus le luxe, une nouvelle fois, de diviser la classe des travailleurs.

À l’image du reste, 10 millions de pubs’ pour la ville la plus riche de France alors que les aides au logement baissent

L’anecdotique don de 10 millions d’euros à la Mairie de Paris pour qu’elle finance une campagne de publicité en faveur des Jeux Olympiques à Paris — qui sera une gigantesque foire commerciale sans grand-chose à voir avec le sport, mais beaucoup avec la spéculation immobilière, le profit immédiat et la gentrification — symbolise la politique pro-patronale de ce budget. Les médaillés des prochains jeux olympiques toucheront également des primes de 5 % supérieurs. Mais les APL (Aides aux logements), elles, vont baisser de 225 millions.

Quant à la lutte contre la fraude fiscale, c’est la touche finale. Alors que les affaires de fraude fiscale défraient la chronique des grands patrons et de la classe politique, l’État va créer un nouveau dispositif de lutte contre la fraude des… petits commerçants ! Pas mal pour faire augmenter le vote d’extrême-droite. Pour les multinationales il s’agira simplement du « renforcement des obligations déclaratives », d’autant plus joliment hypocrite que celles-ci échappent déjà légalement à l’impôt grâce à leurs conseillers fiscaux et aux lois adéquates — à l’image du crédit impôt-recherche.

Enfin on apprend que la télédéclaration des impôts sera généralisée, avec à terme des sanctions pour ceux qui passeraient par un autre biais. Pour tous ceux qui ne disposent pas d’Internet chez eux, les personnes âgées en particulier, ceux qui ne sont pas des fanatiques du tout numérique, et tous ceux qui, toutes générations confondues, ne peuvent se le permettre faute de l’argent nécessaire, ce sera la double peine.

De même, l’aide au développement des pays les plus pauvres baisse. Il est certain que ce n’est pas une priorité quand on bombarde la Syrie. De même, les crédits pour l’environnement baissent : cohérent quand par ailleurs on protège les entreprises qui fabriquent de bons moteurs diesels, et révélateur là aussi de combien est grande la mascarade écologiste de la COP21 pour laquelle le gouvernement clame qu’elle va changer l’avenir de la planète.

Ce gouvernement ne trompe en réalité personne. Derrière la pathétique baisse d’impôts visant à séduire l’électorat que la droite et le FN lui grignotent, ce budget est dans la droite lignée de l’offensive anti-sociale et pro-patronale que les gouvernements PS mènent depuis l’élection d’Hollande en 2012.


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