19h26, le 12 décembre. Laurent Fabius se lève de son fauteuil devant les photographes et les caméras de la presse internationale, la main sur le cœur et la larme à l’œil. On ne saura jamais si c’était l’effet d’être applaudi par autant de monde en même temps ou s’il croit sincèrement qu’il a réussi à limiter les émissions de gaz à effet de serre (GES) ainsi que l’élévation de la température du globe de 2° C.
Personne n’est réellement dupe, si ce n’est les journalistes qui se font le relais de ces salades et les communicants qui forgent des éléments de langage. Cela n’empêche pas M. Fabius d’être extrêmement satisfait de lui-même.
Au niveau du cadre qui a été décidé, il s’agit d’une vaste entourloupe. Rien n’est réellement contraignant dans l’accord atteint. Par ailleurs, le pire est loin d’être derrière nous. « L’accord, selon Fabius, fixe un objectif de long terme concernant l’atténuation des GE ». Pour ce qui est d’un éventuel « pic des émissions », que l’on se rassure. Il est prévu, mais « le plus tôt possible ».
Au niveau du cynisme, Fabius est assez fort. La première version de la COP21 était censée intégrer plusieurs acteurs, ONG, associations de la société civile, etc., pour mieux les récupérer. A la suite des attentats du 13 novembre, ces marges de discussion ont été encore plus restreintes à la portion congrue. Cela n’empêche pas le ministre de prendre des vessies pour des lanternes : « la mobilisation de la société civile », entité dans laquelle Fabius glisse, en vrac, les « collectivités locales, les entreprises » et, tout de même, les « ONG », aurait été « exceptionnelle ». C’est sûr que dès que l’on interdit toute manifestation et contestation, le dialogue ne peut-être que de la meilleure qualité.
Au niveau gouvernemental, Fabius a réussi à éclipser complètement Ségolène Royal, sa grande rivale.Comme l’envie et la jalousie sont des plats qui se mangent froids, il n’a pas hésité, dans la meilleur des traditions socialistes qui consiste à « flinguer » ses collègues, à tirer toute la couverture à lui : le « succès est collectif », mais c’est lui qui en est au centre.
Plus problématique, en revanche, l’opération de « green washing » que Fabius a pu appliquer à la politique extérieure française : alors que l’impérialisme hexagonal bombarde la Syrie (avec des explosifs qui sont loin d’être biodégradables) ou que ses blindés sillonnent (au diesel) les routes du Mali et de Centrafrique, « la diplomatie française a joué pleinement son rôle ». Il y a parfois des baffes….
