[ENTRETIEN]

"Contre-coup d’Etat de Guaidó et 18 Brumaire militaro-judicaire continu depuis 2015 de Maduro"

Fabrice Andreani

"Contre-coup d’Etat de Guaidó et 18 Brumaire militaro-judicaire continu depuis 2015 de Maduro"

Fabrice Andreani

Dans un bilan très critique du chavisme et de son involution sous Maduro, Fabrice Andreani, doctorant spécialiste du Venezuela, revient sur la situation de tensions extrêmes qui secoue, aujourd’hui, le pays.

Faut-il voir, dans la crise actuelle, la seule responsabilité de l’impérialisme étasunien voulant pousser vers la sortie l’un des derniers "gouvernements de gauche" d’Amérique latine ?

La crise économique, la plus grave au Venezuela en plus d’un siècle et demi – avec une production pétrolière et un PIB réduits de moitié depuis 2013 et des importations étatiques de nourriture et médicaments divisées par quatre –, si elle est aggravée par les sanctions étatsuniennes de fin 2017 et début 2019 (respectivement sur le refinancement de la dette et les ventes de brut en dollars), est essentiellement produit du mode d’accumulation de capital privilégié sous et par le chavisme – qui laisse déjà largement opérer des multinationales du monde entier. Dès la fin des années 2000, les dispositifs redistributifs qui avaient fait son succès n’étaient soutenables qu’au prix d’un endettement croissant. La chute des cours du brut de 2014 leur a donné le coup de grâce.

La crise politique intermittente des dernières années n’a, elle, pas d’autre lien avec les Etats-Unis que le « blocus » des actifs individuels en dollars et visas américains infligé depuis 2015 à des dirigeants accusés de narcotrafic, blanchiment d’argent et autres trafics illicites en tous genre. Trump étant très affaibli, les « néocons » menacent d’intervenir militairement, mais ils N’ont l’appui ni du Pentagone ou de l’appareil de sécurité, ni de la majorité (démocrate) du Congrès, et encore moins de la population étasunienne. En fait, si ce n’était pour l’exode d’environ 4 millions de Vénézuéliens, ou pour les risques d’auto-implosion et d’exportation de la violence par un État largement « failli » et au sein et aux marges duquel opèrent déjà tous types de groupes armés transnationaux, seule l’opposition démocrate aurait intérêt à pousser à la sortie de Maduro, tant les droites continentales ont su profiter de son label « socialiste » et des « solidarités » passées des gauches régionales pour se faire élire.

Longtemps, l’opposition vénézuélienne a été imprésentable. Ses porte-paroles ou figures publiques étaient très liées au précédent système de partis et au régime du "Pacte de Punto Fijo", sans même parler de leur participation aux tentatives de coup d’Etat contre Chávez, en 2002, notamment. Juan Gaido, jeune dirigeant de 35 ans qui dit s’appuyer sur la constitution chaviste ne serait-il pas une exception à la règle ?

Il est vrai que l’opposition parlementaire est majoritairement issue de l’establishment du système bipartite qui a régi le pays de 1958 à 1998 – sociaux-démocrates vs. démocrates chrétiens, les partis de gauche radicale et communiste (et post-guérilla) n’ayant jamais fait plus de 5 % à un scrutin national avant de rallier Chávez (après son putsch raté de 1992). À partir de la fin des années 1980, le crash pétrolier et la crise de la dette du Sud ayant provoqué la déliquescence du proto-État providence institué au cours des décennies précédentes, cet establishment a promu des réformes économiques libérales qui ont eu pour effet de paupériser de larges pans de la population (quoi que bien moins qu’aujourd’hui). Et il s’est fait complice de la répression féroce des protestations populaires de l’époque, notamment le Caracazo de 1989 avec ses milliers de morts.

Ensuite, la participation du gros de cette opposition, par action ou omission, au coup d’État « raté » d’avril 2002 (mais non exempt de zones d’ombres côté chaviste, et délibérément « provoqué » par Chávez comme il l’a revendiqué en 2004), puis à un lock-out pétrolier l’hiver suivant, a entaché durablement sa crédibilité démocratique – bien que depuis lors c’est bien plutôt le gouvernement qui s’est employé à transgresser la Constitution bolivarienne de 1999, dès qu’il s’est trouvé menacé dans les urnes (au niveau local) ou dans les tribunaux. Cela fait plus de dix ans que cette opposition se rajeunit régulièrement en intégrant les leaders du mouvement étudiant, et au moins cinq qu’elle (re)conquiert peu à peu des circonscriptions populaires. Mais Guaidó est effectivement le premier député personnifiant cette double-évolution à avoir été élu à la tête de l’Assemblée nationale depuis qu’elle est aux mains de l’opposition, en 2016.

En insistant sur le rôle décisif qu’ont les forces armées pour Maduro, n’y a-t-il pas, dans les appels à la défection que relaient les acteurs étrangers qui disent soutenir une issue démocratique au Venezuela, une sorte d’appel au coup d’État ?

Si l’on entend par coup d’État la prise du pouvoir via la menace ou le recours à la force militaire, alors dans ce cas il vaut mieux parler de contre-coup d’État, Maduro et les hauts-dirigeants qui l’entourent étant les protagonistes d’une espèce de 18 Brumaire militaro-judicaire prolongé depuis la fin 2015. Depuis le triomphe de l’opposition aux législatives, avec une majorité des deux-tiers ouvrant la voie à une quasi-cohabitation (entre nominations gouvernementales, vote des lois et gestion du budget de l’État...), Maduro gouverne via un « décret d’État d’exception et d’urgence économique » reconduit ad infinitum, avec les bonnes grâces d’un Tribunal supérieur de justice « blindé » par la majorité chaviste sortante fin 2015, en dehors de tout cadre légal. C’est ainsi qu’il a pu faire suspendre le référendum révocatoire à son encontre en 2016, convoquer à l’été 2017 une Assemblée constituante sans passer par un référendum populaire préalable et dont le mode de scrutin donnait d’avance une majorité certaine au chavisme (d’où le boycott d’opposition), imposer des conditions hyper-inéquitables à ses opposants aux régionales de fin 2017, et enfin réitérer l’opération pour se faire réélire en mai 2018 – en ayant fait illégaliser au passage les étiquettes des partis d’opposition les plus importants, inhabiliter les candidats les plus en vue et bloquer les inscriptions depuis l’étranger de centaines de milliers de votants ayant immigré après 2016, d’où la faible participation oppositionnelle. Chacun sait, jusque dans ses rangs et notamment au sein de l’armée, que son mandat initié en janvier 2019 est d’une légitimité tant électorale que légale bien moindre que son mandat précédent.

L’extrême dépendance à la rente pétrolière, c’est-à-dire aux exportations de matières premières, est-elle propre au régime chaviste, par rapport à ses prédécesseurs, ou propre encore au Venezuela de ces dernières années, par rapport aux modèles de développement ayant dominé dans d’autres pays d’Amérique latine au cours de la dernière décennie et demi ?

Si cela fait bientôt un siècle que le Venezuela est un pétro-État, aucun autre pétro-État, ni même les plus archaïques et autoritaires tels l’Arabie Saoudite, ne s’est retrouvé dans une telle situation. En fait, depuis une quinzaine d’années, l’économie vénézuélienne consiste en une combinaison complexe entre plusieurs modes d’accumulation de capital, et où les clans politico-militaires bolivariens se sont taillés la part du lion : l’extraction de ressources naturelles, présentes en grande quantité – pétrole mais aussi gaz, charbon, or, coltan, cobalt, bauxite, diamants… –, via des partenariats public-privé avec des firmes liées à des puissances grandes et moyennes (Etats-Unis, Chine, Russie, France, Espagne, Iran, Turquie, etc.) ; l’importation de produits de première nécessité, biens de consommation secondaire et matières premières manquantes, source de marges records grâce au contournement systématique du « contrôle des changes » instauré au sortir du lock-out pétrolier de 2002 pour parer la fuite des capitaux, mais devenu la principale source d’enrichissement rapide au sein du néo-grand-patronat et du haut-fonctionnariat bolivariens – via la falsification d’importations, leur revente au prix fort et/ou la revente des devises subventionnées au marché noir, opérations via lesquelles on estime que près de la moitié des quelques 1300 milliards de pétrodollars tirés du boom de 2003-2013 ont été détournés illégalement ; la prédation ou la patrimonialisation d’entreprises sous couvert de nationalisations en trompe l’œil – résultant en la chute de la production et la répression systématique des oppositions ouvrières ; et la démultiplication des activités de contrebande de ces mêmes ressources extraites et produits importés, mais aussi de narcotrafic. Le reste de la population travaille essentiellement soit dans l’administration publique soit dans le secteur des services, dont plus de la moitié dans le secteur informel.

Sans pour autant parler de "Socialisme du XXIeme siècle", n’y a-t-il pas eu, sous le chavisme, de réels éléments de rupture avec le système et de construction d’un pouvoir populaire, à la base ?

En bon marxien je ne sais pas ce que veut dire « le système ». Il existe une économie capitaliste globalisée qui englobe différents modes d’accumulation du capital, certains plus ou moins libéraux, d’autres plus ou moins extra-légaux… Certes, tant au cours que dans la foulée des mobilisations populaires massives des années 2002-2004 pour défendre le gouvernement Chávez face à une opposition alors plus encline au putschisme et bien plus nettement associée à l’Ancien régime, il y a eu des expériences d’occupations d’usines, de terres et de zones indigènes, de même que d’auto-organisation dans les barrios. Mais le gouvernement ayant systématiquement cherché à coopter ce « mouvement populaire » et à le mobiliser à son profit dans le cadre d’une compétition électorale-clientélaire érigée en alpha et oméga de la vie politique – avec des élections quasiment tous les ans –, la plupart de ces expériences ont été passablement limitées : en dehors des quelques cas de « communes » rurales qui font le bonheur des lecteurs de l’Huma dimanche– mais sont réprimées à la minute même où leurs porte-paroles prétendent s’autonomiser dans le champ politique –, les seuls coopératives qui fonctionnent réellement datent en réalité d’avant l’arrivée de Chávez, notamment celles regroupées dans la Cecosesola dans l’État du Lara.

En réalité les dissidences de gauches ont été l’objet d’une répression encore plus précoce que les leaderships d’opposition émergents, que ce soit dans les usines, dans les campagnes ou dans les communautés indigènes, et quand bien même elles se limitaient à demander l’application de la Constitution de 1999 – en matière de redistribution de terres ou de respect des conventions collectives. Quant aux « conseils communaux » et aux « communes » urbaines, elle fournissent essentiellement de la main d’œuvre gratuite ou très bon marché pour la bureaucratie, en matière de contrôle de la population « par le bas » et biopolitique – où la loyauté repose souvent sur le chantage aux subventions, aux aliments et aux médicaments. Ce qui n’empêche pas l’émergence de « subjectivités » de types nouveaux, mais contrairement à une idée répandue, toutes les « subjectivations » ne sont pas, par définition, émancipatrices, et il existe bien des formes de « subjectivation » autoritaire, où la politisation va de pair avec la criminalisation des opposants, y compris ceux issus des classes populaires, en nombre croissant ces dernières années.

Comment expliquer la chute de popularité vertigineuse de Maduro, au cours des dernières années ? Se maintient-il au pouvoir uniquement grâce à la force ou lui reste-il des éléments d’appui dans certains secteurs de la population ?

À la fois de par l’ensemble des éléments économiques et politiques indiqués aux réponses précédentes, et la massification sans commune mesure de l’usage de la violence armée – et bien souvent létale – à l’encontre des classes populaires, entre unités spécialisées et groupes paramilitaires, et tant en matière de répression de la délinquance ordinaire que, plus récemment, de la protestation. Tandis que plusieurs milliers d’individus soupçonnés d’activités illicites ont fait l’objet d’exécutions extra-judicaires ces dernières années – et ce de l’aveu même des autorités –, depuis au moins 2016 les arrestations arbitraires (qui s’apparentent souvent à des disparitions momentanées, de plusieurs jours avant que la police ne les signale), la torture des détenus et l’intimidation des familles sont devenus le lot commun de l’ensemble des protestataires, quelle que soit leur origine sociale.

Doit-on parler, dans le cas vénézuélien, de dictature ? Ou y a-t-il davantage de continuité entre le bonapartisme chaviste et ce qui serait, aujourd’hui, une forme plus autoritaire et brutale de bonapartisme ?

Si l’hyper-présidentialisme est hérité de l’Ancien régime, on peut dire qu’entre fin 2004 et courant 2008, la démocratie représentative a progressivement pris les traits de ce que les adeptes des typologies appellent un « autoritarisme compétitif » : entre autres faits d’armes de Chávez, du fait du contrôle sans partage de la justice par son exécutif (et où la moitié des juges ne sont pas titulaires, donc à la merci de l’exécutif), la réforme constitutionnelle « socialiste » de 2007, rejetée par référendum, a été néanmoins passée par décrets-lois, les prérogatives des autorités locales élues côté opposition dès 2008 ont été modifiées à souhait après-coup au profit de l’exécutif, les grèves dans les entreprises nationalisées associées à du « sabotage » ou de la « trahison à la patrie », etc.

Néanmoins on ne peut pleinement parler de dictature qu’à partir de 2016, si l’on compte le premier décret d’État d’exception et la suspension arbitraire du référendum révocatoire contre Maduro ; ou alors à partir de 2019 si l’on se concentre sur sa légitimité originelle… Mais c’est un autoritarisme relativement polyarchique, qui combine des velléités de contrôle de la population de type totalitaire avec un « laissez-faire » total en matière d’illégalismes économiques « ordinaires » ou « apolitiques » : une sorte de mélange entre Cuba (pour la surveillance de l’armée et du haut-fonctionnariat), le Mexique (vue la « narcoïsation » de l’État), l’Algérie (vu le rôle des généraux, au nombre de 2000 !!!), et la zone des Grands Lacs en Afrique (vue l’exploitation chaotique des sous-sols et la fragmentation de la souveraineté).

Lors du dernier Sommet de Bogotá, c’est une ligne « modérée » qui semble avoir prévalu. Toutefois, Mike Pence a réitéré la menace de Trump, à savoir que "toutes les options [étaient] sur la table". Faut-il craindre, dans un futur proche, une intervention militaire contre le Venezuela ?

Il n’y a pas vraiment de ligne « modérée » et de ligne « radicale », ce sont des positions en trompe l’œil, type « bon flic » / « mauvais flic ». On ne peut pas dire que l’ex-président Álvaro Uribe ou le vice-président brésilien Hamilton Mourao soient des « modérés ». Ce sont simplement des réalistes et des voisins directs du foyer d’incident. Personne ne veut impliquer ses forces armées dans un conflit guerrier ouvert et conventionnel en territoire vénézuélien qui, loin de voir s’affronter soi-disant « chavistes » et « antichavistes », verrait se multiplier les fronts et les protagonistes incontrôlés, à la yougoslave ou à la libanaise, impliquant des groupes d’hommes en armes de toutes factures, plus ou moins liés à des logiques criminelles de prédation du territoire, et aux obédiences ou loyautés mouvantes. Avec la spécificité du cas vénézuélien que l’ensemble des acteurs armés susceptibles de se mobiliser dans une telle guerre en dehors et aux côtés des armées conventionnelles opèrent déjà sur le territoire : groupes para-miliataires pro-Maduro aussi bien urbains que ruraux, bandes criminelles opérant souvent depuis les prisons, et contrôlant jusqu’aux mines d’or du Sud du pays, guérillas locales et guérillas issues des FARC ou de l’ELN colombiens, largement présents dans ce même Sud et à la frontière colombienne côté Ouest, ex-paramilitaires colombiens, etc.

Et le monde du travail, dans tout ça ? Existe-t-il une voie, étroite, sans doute, mais voie tout de même, pour une mobilisation du monde du travail et de la jeunesse, qui saurait s’opposer à un gouvernement mais en toute autonomie d’une opposition très pro-nord-américaine, quel que soit le discours qu’elle puisse avancer pour s’en défendre ?

Je renverrais, à ce sujet, aux travaux de Thomas Posado. Juste une chose : à ma connaissance la fraction de l’extrême-gauche plus ou moins trotskyste qui a fait dissidence depuis plus de 10 ans (PSL / La Clase ; là où Marea Socialista ont rompu plus récemment) a potentiellement la plus forte légimité dans les principaux syndicats ouvriers dans le pays, à savoir le pétrole et la sidérurgie (Guyane vénézuélienne), et c’est pourquoi les élections y sont sans cesse repoussées depuis plusieurs années. Mais d’une façon générale le monde du travail dans le secteur public est déjà largement mobilisé, que ce soit dans l’industrie et les services ou dans l’enseignement et la santé. Seulement autant dans les conditions de survie actuelles il est difficile de faire systématiquement grève – la règle est plutôt de combiner plusieurs boulots et de faire des menus trafics –, autant dans les hôpitaux et les écoles les gens travaillent déjà quasiment gratuitement, par sens du devoir… Quant au secteur privé ou ce qu’il en reste, pour ce qui est des grands groupes ce sont les seuls endroits où l’on peut espérer être payé à peu près correctement, donc difficile de s’arrêter de bosser.

Du côté mexicain, le nouveau président, Andrés Manuel López Obrador, semble avoir renoué avec une politique étrangère basée sur la non-ingérence. S’agit-il d’un point d’appui pour celles et ceux qui, au Venezuela, s’opposent à Maduro mais refusent de s’aligner sur les positions de Guaido ?

La position mexicaine ne s’accompagne pas, pour l’instant, d’initiatives diplomatiques proactives (comme c’était le cas dans les conflits centre-américains des années 1980). Et il faut bien comprendre que le régime de Maduro est tellement imprésentable et haïssable (et la diplomatie mexicaine en est bien consciente) qu’il est capable de décourager les bonnes volontés les plus tenaces. D’ailleurs, après une brève phase de synergie avec le Mexique, l’Uruguay du Frente Amplio s’est détaché de la position mexicaine pour se rapprocher de celle de l’Union Européenne. Mais surtout, le projet d’AMLO est extrêmement autocentré sur le Mexique lui-même (qui doit affronter des problèmes internes d’une terrible gravité) et ne semble pas porté par de grandes aspirations géopolitiques ou diplomatiques, outre son relatif ex-centrement par rapport à la sphère diplomatique sud-américaine.

Faut-il voir dans le « Groupe de Lima », la Conférence de Bogotá, les dernières prises de positions de Jair Bolsonaro, une sorte de croisade de la droite sud-américaine, soutenu par son parrain républicain à la Maison Blanche, contre la gauche à échelle régionale ? Quelle serait la prochaine cible, si Maduro venait à tomber ?

Marco Rubio parle du « trio des tyrannies » (Venezuela, Nicaragua, Cuba), mais il s’agit pour large part d’une fanfaronnade, surtout en ce qui concerne Cuba. Il est symptomatique que rien ne soit dit ni fait à propos de la Bolivie, bien qu’elle soit membre de l’Alliance bolivarienne (ALBA) et continue à soutenir Maduro et Ortega sans relâche. Et sans doute, peu sera dit ou fait contre un éventuel nouveau gouvernement de Cristina Kirchner en Argentine, où elle a de fortes chances de revenir au pouvoir dans un contexte électoral parfaitement normal. Bolsonaro et son ministre des Affaires étrangères Araujo ont, à l’occasion, des discours de « croisés », mais leur vice-président Mourao et l’état-major militaire brésilien se précipitent aussitôt pour arrondir les angles ou carrément les démentir – du reste, c’est bien l’ultra-nationalisme fascisant d’une partie de l’armée qui explique que le projet de base étatsunien au Brésil cultivé par « Bolsonazi » a été rapidement enterré, sous la pression de Mourao et d’autres. L’épuisement du cycle « progressiste » a principalement des raisons internes propres – et marginalement des raisons externes mais où la Chine est aujourd’hui aussi importante que les USA –, qui n’ont rien à voir avec une « croisade ». La droite régionale s’en félicite évidemment et essaie de le mettre à profit, mais quoi de plus normal ?

Propos recueillis par RPDimanche

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