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Jupiter, le retour ?

Deux 49.3 en 24 heures : le gouvernement enchaîne les passages en force

Jeudi, le gouvernement a de nouveau sorti le 49.3 lors de l’examen du budget de la Sécurité Sociale. Deuxième utilisation de l’article en deux jours, pour un gouvernement qui traverse une crise politique profonde dans un contexte de crise économique et de grèves importantes.

Seb Nanzhel

21 octobre 2022

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Crédits photo : Thomas SAMSON / AFP

Après avoir dégainé une première fois l’article sur le Projet de Loi Finances mercredi, le gouvernement a de nouveau fait usage du 49.3 lors de l’examen jeudi soir du budget de la Sécurité Sociale 2023. Encore une fois très loin de la « nouvelle méthode » promise par Macron à l’aube de son second mandat : cette double utilisation en 24 heures de l’outil antidémocratique en dit long sur la crise de la macronie. Face à l’absence de majorité présidentielle à l’Assemblée, et à un retour des grèves, le camp présidentiel n’a pas d’autre choix que de montrer les muscles.
 

Face à de nouveaux revers à l’Assemblée, un nouveau 49.3

Les revers se poursuivent à l’Assemblée pour le camp Macron. Jeudi s’ouvrait l’examen du Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale (PLFSS). Un examen qui n’aura été que de courte durée. Après le rejet de la première partie du texte qui portait sur les comptes de l’année 2021-2022 puis l’adoption de plusieurs amendements contre le camp présidentiel, Elisabeth Borne est apparue en fin de soirée à la tribune de l’Assemblée pour siffler la fin de la partie. « Nous ne pouvons pas prendre le risque d’un nouveau rejet ou d’un texte, de nouveau, dénaturé », a déclaré la première ministre avant d’annoncer l’utilisation de l’article 49.3, qui permet de faire passer le texte sans vote à l’Assemblée.

Sans les Républicains pour jouer le rôle de pivot indispensable, la situation paraissait en effet bouchée pour la Macronie. Dépourvu de majorité à l’assemblée, le gouvernement doit compter sur l’appui des LR pour faire passer ses textes. Un appui qu’il comptait obtenir en acceptant une partie des amendements du groupe et via une politique austéritaire. Mais ces gages n’ont pas suffi pour charmer Les Républicains, alors que les oppositions tant à gauche qu’à l’extrême droite profitent des votes du budget comme d’une tribune pour apparaître comme l’opposition incontournable au gouvernement. Le RN, LR et la NUPES se sont ainsi retrouvés sur le rejet du premier article du texte.

Un PLFSS passé en force, qui contient son lot d’attaques antisociales

Et le projet de loi imposé par la force porte son lot de mesures réactionnaires et austéritaires. L’objectif : récupérer 500 millions d’euros sur le dos de la population. Parmi les attaques que ce PLFSS passé en force comporte se trouve notamment l’indexation sur l’inflation des prix du tabac. Plus significativement, le texte prévoit tout un arsenal pour « renforcer les actions de lutte contre les abus et les fraudes. »

De ce côté, le texte prévoit la limitation du remboursement des arrêts de travail prescrits en téléconsultation lorsqu’ils ne sont pas faits par le médecin traitant ou un médecin déjà vu dans les douze mois. Il prévoit également de donner aux contrôleurs des caisses de sécurité sociale les prérogatives de cyber-enquête. Dans le même temps, Gabriel Attal a annoncé jeudi que les prestations sociales ne pourront plus être versées sur des comptes non-européens à partir de 2024. Un amendement profondément xénophobe déposé par le gouvernement qui va chercher tout droit dans les élucubrations de l’extrême droite.

Le camp présidentiel en proie à une crise importante

« Nous sommes toujours prêts à bâtir, prêts à trouver des compromis », a affirmé Borne après avoir déclenché son 49.3. Au-delà de l’hypocrisie d’un tel discours, dont le ton est finalement le même que celui de la « nouvelle méthode » promise par Macron lors de sa réélection sur fond d’abstention record, puis réaffirmée suite à l’échec subi aux législatives. Un discours qui apparaît comme symptomatique l’instabilité du gouvernement.

Fragilisé à l’assemblée, incapable de susciter l’adhésion et craignant plus que tout d’être paralysé pendant le quinquennat, Macron n’a pas d’autre choix que de recourir au 49.3 pour faire passer ses contre-réformes. Un recours qui devrait d’ailleurs se multiplier dans la période à venir, notamment sur ce projet de loi : son utilisation est illimitée pour les textes de budgets et l’adoption complète du Projet de Loi Finances devrait nécessiter à elle seule l’utilisation de l’article à 5 reprises.

Symptôme d’une crise politique profonde pour le gouvernement, la multiplication des 49.3 est une des images de la mise à la défensive de la bourgeoisie dans la période. C’est avec cette même alliance -de la faiblesse et de la brutalité- que le gouvernement a répondu aux grèves dans la pétrochimie. D’un côté, il a joué la carte du « dialogue social » et a d’abord pris ses distances vis-à-vis du conflit, de l’autre, il a réprimé les raffineurs en les réquisitionnant.

Aussi, ce logiciel plus ouvertement bonapartiste et autoritaire qui va irriguer le macronisme pendant ces cinq prochaines années rend toujours plus criant le manque de perspectives que présente une opposition purement parlementaire à Macron. Alors que Macron montre les muscles pour tenter de compenser son instabilité, c’est sur le terrain de la lutte des classes, en travaillant à coordonner la colère qui explose dans plusieurs secteurs, que se joue la construction d’un front capable de défaire le gouvernement.


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