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Crise sanitaire

Guadeloupe : les soignants épuisés et les hôpitaux saturés face au Covid-19

La situation est alarmante en Guadeloupe, les médecins de villes et d’hôpitaux sont débordés et les lits en réanimations surchargés. Le sous-investissement dans la santé organisé par l’Etat français se paye aujourd’hui au prix fort.

Prune Fabre

3 octobre 2020

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Source photo : AFP/Lara Balais

Il y a plus de deux semaines déjà, Gérard Cotellon, le directeur du CHU de Guadeloupe, lançait l’alerte quant à l’afflux continu et grandissant de patients liés au Covid-19.
Selon le dernier bilan de l’Agence régionale de santé de Guadeloupe, mercredi soir, la situation reste très tendue. L’île compte 1.000 nouveaux cas et 15 nouveaux décès. Ce qui porte le bilan global des victimes du Covid, depuis le mois de mars, à 53 morts sur l’île. La moitié de ces personnes sont décédées depuis deux semaines, l’île connaissant une accélération de l’épidémie.
Le taux actuel de positivité des tests PCR est quant à lui stable au taux de 22% !
Sur la semaine du 23 au 29 septembre, parmi les territoires d’Outre-mer c’est en Guadeloupe qu’a été observé le plus fort taux hebdomadaire d’admissions en réanimation de patients COVID-19, avec 7,16/100 000 habitants, ce chiffre est en augmentation par rapport à la semaine précédente (5,84 /100 000 habitants), avec jusqu’à 33 personnes en réanimation. Ce chiffre doit être mis en relief avec les 22 lits de réanimations à disposition en temps normal. Des capacités qui ont été élevées à une trentaine de lits mais qui restent au bord de la saturation, chaque départ étant immédiatement renouvelé. L’apport de 8 lits avec des médecins militaires sont aussi dérisoires que le détachement d’un navire militaire pour toute la Caraïbe lors de la « première vague ». Quelques signes positifs apparaissent cette semaine avec le nombre de patients en réanimation qui passe sous la barre des trente et le taux de reproduction qui redescend à 0,92. Cependant, cette stabilisation est encore fragile et il est bien trop tôt pour affirmer si elle se maintiendra dans le temps. L’hôpital est sur la corde raide en Guadeloupe.
 
Cette situation d’extrême tension hospitalière met en exergue la situation de crise du système de santé. En effet la Guadeloupe est l’un des départements le plus touchés par cette deuxième vague car il est l’un des plus mal dotés en ressources hospitalières. En moyenne, pour 10.000 habitants, l’île dispose de 20 % de lits en moins qu’en métropole. Le CHU a par ailleurs subi un incendie particulièrement grave en fin d’année 2017 dont les conséquences se faisaient encore sentir, quelques mois seulement avant la pandémie de coronavirus. Le personnel hospitalier s’étant notamment mobilisé par la grève, fortement soutenue par la population, pendant l’étét 2019. Mais dès aujourd’hui, si la lutte contre le Covid s’annonce encore longue, ce sont aussi les conséquences de la saturation de l’hôpital face à ses autres activités qui sont particulièrement craintes par les soignants, alors que près de 100.000 personnes sur l’île sont considérés comme porteuses de pathologie les exposant particulièrement au Covid. La dengue ou la grippe mettent déjà, selon les années, à mal le personne hospitalier.

La charge de travail des soignants guadeloupéens a explosé ces dernières semaines, des congés leur ont également été annulés, les personnels sont au bout du rouleau. Leila, une interne du CHU de Guadeloupe, témoigne dans 20 minutes : « Déjà, en temps normal, on souffre d’un déficit de médecins. Alors avec le Covid 19, qui demande beaucoup d’attention et provoque de longues hospitalisations, on est clairement en sous-effectif, On a dû rappeler des internes qui étaient en métropole ou qui travaillent en ville en Guadeloupe. » Les cabinets des généralistes, sont également débordés par les consultations Covid, ils ne pourront donc pas longtemps se passer de la présence de ces internes.
Bruno Jarrige, vice-président du CHU de Pointe-à-Pitre, où il évoque le manque de capacité pour réaliser des tests : « On est la région la plus touchée par le Covid et la moins en capacité de réaliser des PCR. Notre CHU a deux fois moins de machines pour analyser les prélèvements que celui de la Martinique. Certes, les laboratoires privés ont des machines, mais elles sont embouteillées par les dépistages, au détriment du diagnostic [sur les personnes symptomatiques]. »
Ces deux témoignages montrent d’une part la réalité de la deuxième vague du COVID 19 avec les personnels hospitaliers de la région épuisés, mais également l’absence de moyen alloué, à la Guadeloupe malgré la force de la première vague et l’anticipation qu’il aurait dû y avoir. 

La Guadeloupe, à l’image des autres territoires coloniaux de la France, souffre de graves carences dans le système sanitaire. Ni les soldats ne pourront combler les manques de personnel hospitalier, ni les matraques ne pourront remplacer les respirateurs. Les fermetures ne stopperont pas plus le virus si celui-ci continue de se propager au travail où les capitalistes refusent d’entacher leurs profits pour réorganiser la production au service de l’effort sanitaire et financer les équipements nécessaire pour protéger les travailleurs. 
 
Les travailleurs surexploités pour les profits des capitalistes occidentaux doivent se lier aux travailleurs des hôpitaux à bout de nerfs pour imposer ensemble un rapport de force. La gestion catastrophique des dirigeants pour maintenir les profits a montré qu’ils étaient incapables d’assurer les vies de leur population. Ce n’est que par l’organisation à la base de ceux qui subissent en première ligne les conséquences de la crise que la solution peut être envisageable, en réorganisant la production pour répondre aux besoins matériels de la population et de l’hôpital. La première ligne ne paiera pas une seconde fois la crise, aux capitalistes de la payer de leur privilège pour sortir de cette crise systémique.


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