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Importante journée de mobilisation des AED : les précaires relèvent la tête

Ce mardi 1 er décembre, les assistants d'éducation étaient en grève massivement et partout en France. Ils se mobilisaient contre la précarité de leurs conditions de travail et contre la gestion erratique de la crise sanitaire qui vient encore aggraver leurs conditions de travail.

Simon Derrerof

2 décembre 2020

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Une mobilisation massive dans toute la France

Depuis le début de la crise sanitaire les services de vie scolaire sont en surchauffe et sont dépassés par une gestion catastrophique du gouvernement. Alors qu’ils sont en sous effectifs depuis de nombreuses années, ils se retrouvent complètement dépassés par un protocole sanitaire qu’ils doivent faire respecter en plus des leurs tâches habituelles. Ce mardi 1 décembre a montré une forte colère provoquée par le sentiment d’être les grands oubliés de l’éducation nationale. Partout sur le territoire, les AED ont montré une forte détermination pour lutter pour la reconnaissance de leur travail, pour obtenir de meilleures conditions de travail et une revalorisation des salaires.

A Marseille nombreux étaient les surveillants mobilisés pour exiger de meilleures conditions de travail et une revalorisation salariale

A Rouen et à Caen plus d’une centaine d’AED se sont donnés rendez-vous devant le rectorat.

Dans le Val de Marne mais aussi en Bretagne à Rennes, ils étaient aussi nombreux à exprimer leur colère face à des conditions de travail dégradées et aggravées par la crise sanitaire mais aussi pour revendiquer des recrutements, des revalorisations de salaire et une meilleure formation.

A Toulouse c’est plus de 150 AED qui se sont rassemblés devant le rectorat pour manifester avant de faire une assemblée générale.

A Paris plus de 200 grévistes se sont retrouvés sur la place Jacques Bainville contre leurs conditions de travail et contre des salaires de misère, comme nous l’explique Charlotte, surveillante au lycée Fabien, à Montreuil : « on veut plus de moyens, des recrutements, la situation était déjà compliquée l’année dernière, avant la corona, cette année c’est l’explosion des difficultés pour faire notre travail correctement, on a plus le temps de faire notre travail, on a besoin de plus de moyens. Moi je suis en grève parce qu’il y a beaucoup de changements à faire dans l’éducation nationale, on ne fait que mettre des pansements là où il y aurait besoin de beaucoup plus ».

Dans ces villes et dans de nombreuses autres, les AED étaient massivement en grève et mobilisés pour exprimer le ras le bol des vies scolaires. Partout la même colère s’est exprimée, celle d’être dépassé devant l’ampleur du travail à accomplir. Comme l’affirme Esther : « Nous les AED on est jamais respectés par l’éducation nationale, on subit la multiplication des tâche, avec le Covid on est devenus assistantes sociales, on est devenus infirmières et tout ça pour des salaires de merde ».

Cette mobilisation est d’ores et déjà historique, c’est le plus grand mouvement de grève dans les vies scolaires et ce depuis 17 ans. Pour de nombreux travailleurs de la vie scolaire, ce qui aura déclenché la colère, c’est aussi la multiplication des tâches notamment de sécurité et de « flicage ». C’est ce que nous raconte, Nicolas AED à Jean Baptiste Clément, un collège du 20 ème arrondissement : « Avec le Covid on a du endosser partiellement le rôle des flics, on a plus le temps d’avoir des échanges privilégiés avec les gamins, on est la première ligne mais nous on est pas vigipirate, on est là pour les enfants, pour les aider à apprendre, pourtant on ne peut plus faire notre métier, on ne peut plus que faire marcher un minimum de protocole sanitaire, on ne peut plus que parler aux gamins de manière autoritaire et en plus on doit dénoncer les étudiants non républicains ou pro daesh, c’est pas ça notre métier, nous de base on aime travailler avec des enfants ».
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Lorsque la colère de la base s’auto-organise

Le mouvement de grève du mardi 1 er décembre montre une colère profonde dans les vies scolaires et a donné naissance à des phénomènes d’auto-organisations et à des initiatives particulièrement subversives. La mobilisation des surveillants est intéressante dans le sens où elle vient de la base. Un collectif marseillais d’AED est le premier à avoir posé la question d’une date de grève ce mardi. Si le mouvement naît ponctuellement d’une colère face à la pression imposée par une gestion catastrophique, cette colère plus profonde révèle le ras de bol des vies scolaires.

En effet, les AED sont depuis la loi Ferry en 2003 particulièrement précarisés. Ils n’ont aujourd’hui plus de statut stable, sont embauchés par les chefs d’établissement pour un CDD d’un an renouvelable six fois, avec salaire en baisse et annualisé, ce qui a pour conséquence des semaines de 41 h pour des temps pleins payés mensuellement 35h. De plus les AED n’ont pas le droit aux primes offertes aux autres personnels de l’éducation nationale ( telles que la prime COVID et REP, REP+). Des contrats et des statuts très précaires qui sont également des moyens de pression pour les chefs d’établissement à l’égard des salariés et un vrai levier pour réprimer. Face à cette situation, la mobilisation s’est organisée autour de la volonté d’en finir avec un salaire de misère, afin d’obtenir la titularisation de ceux qui le souhaitent et d’obtenir une augmentation du nombre de postes pour mieux pouvoir faire leur métier.

De manière intéressante, le mouvement est né des discussions, en amont, dans les vies scolaires et a bousculé les directions syndicales contraintes de poser une journée de grève ce 1 er décembre, face à la colère de la base. Cette grève prend donc son ancrage dans les discussions entre collègues dans les lycées mais aussi autour de l’organisation d’une journée commune par des liens créés entre les aed de différentes villes. Cette journée a également été le théâtre de nombreuses assemblées générales comme à Toulouse où les grévistes ont voté une augmentation des effectifs, la titularisation des surveillants, l’augmentation des salaires ou encore le versement des primes touchées par les autres personnels de l’éducation nationale.

Dans un contexte de mobilisation contre les lois liberticides, se coordonner et se lier avec les autres secteurs

La mobilisation des AED est une expression de la colère rencontrée par le gouvernement au regard de sa politique néolibérale et de sa gestion de la crise. Ces mobilisations expriment une colère profonde de cette première ligne et ce nouveau mouvement vient mettre une nouvelle épine dans le pied du gouvernement et de Blanquer. D’abord parce que le rôle des surveillants n’a jamais semblé aussi important, sans eux, les écoles ne peuvent plus ouvrir. Ensuite, parce que cette mobilisation est une nouvelle expression du refus de la gestion pro-patronale du gouvernement et remet de plus sur le devant de la scène l’incurie des politiques publiques de ce gouvernement et le manque de moyen effarant accordés à l’Education nationale, comme à l’ensemble des services publics à commence par l’hôpital.
Dans un secteur particulièrement précarisé, où la main d’œuvre est jeunes, les salaires bas et les statuts incertains, la journée de mobilisation des AED dans la continuité de la grève des professeurs constitue un phénomène très progressiste. En effet, bien souvent la précarité du travail affaiblit la capacité des travailleurs à se défendre. Les contrats courts, soumis à la pression du renouvellement à la fin de l’année fonctionnent comme des pares-feux pour les directions et empêchent la plupart du temps des mobilisations d’ampleur.

Cette mobilisation constitue un nouveau phénomène de lutte des classes dans l’éducation nationale dans une situation marquée par une importante mobilisation sociale autour des lois liberticides que sont la loi LPR ou la loi de Sécurité Générale. Pour gagner, ce mouvement devra faire jouer les méthodes de l’auto-organisation. C’est en décidant eux-mêmes de leur calendrier de bataille et de leurs revendications que les AED pourront gagner sur de meilleures conditions de travail.
Face à l’expression de cette colère et de cette radicalité exprimée à Paris, Marseille et sur l’ensemble du territoire, se pose la nécessité d’une coordination des différents collectifs de grévistes au niveau national pour décider d’un calendrier de bataille et imposer aux directions syndicales d’appeler à d’autres journées de grève nationale dans l’éducation. L’émergence d’une coordination pour poser les bases d’un plan de bataille offensif et unitaire apparait également comme un objectif central, afin de dépasser une stratégie qui pour l’heure ne propose que des journées de grève isolées.

De plus à l’heure où une mobilisation explosive se déroule contre les dérive autoritaires de ce gouvernement il semble important d’étendre la mobilisation de la vie scolaire à d’autres secteurs pour enfoncer le clou. Ce mouvement pose une pierre dans la mobilisation contre une gestion pro-patronale et néolibérale de la crise sanitaire et contre une société de plus en plus autoritaire. Un combat qui ne pourra se mener que dans l’unité la plus large du mouvement ouvrier et de tous les opprimés par les méthodes de la lutte des classes.


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