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Grand retour de Berlusconi et des néo-fascistes

Italie. La droite extrême en passe de gagner les élections ?

A moins d’une semaine des élections législatives qui vont définir la couleur du prochain gouvernement, aucune des principales coalitions en lice n’est en capacité de remporter une majorité, mais la droite extrême a le vent en poupe.

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Bien sot serait celui qui se hasarderait à faire des pronostics : personne, pas même les politologues les plus chevronnés, n’ose s’avancer sur les résultats qui devraient sortir des urnes dimanche prochain en Italie. Et ceci n’est pas seulement dû à l’interdiction de publication de sondages, une semaine avant le scrutin, ni même à l’entrée en vigueur d’un énième (« nouveau ») système électoral, censé résoudre les problèmes chroniques de gouvernabilité dont souffre l’un des trois principaux pays impérialistes de la zone Euro avec l’Allemagne et la France. Le taux d’indécis et, surtout, d’abstentionnistes, dans un pays où le taux participation est habituellement supérieur à celui de la France, est extrêmement élevé et les intentions de vote pour des partis soi-disant antisystème sont très fortes.

Sur fond de discrédit d’un centre-gauche qui fait, depuis le premier gouvernement Prodi, en 1996, une politique de droite, c’est surtout la droite extrême et les néo-fascistes qui ont le vent en poupe avec, également, un Mouvement Cinq Etoiles (M5S, droite populiste), donné à un peu moins de 30%. A droite, Berlusconi est revenu sur le devant de la scène, à 81 ans. Il prétend devenir « Président » du conseil alors même qu’il a été condamné à l’inégibilité jusqu’en 2019. A ses côtés, l’ancienne Ligue du Nord, rebaptisée, pour l’occasion, Ligue Nationale, de Matteo Salvini, fait dans la surenchère xénophobe et raciste, à peine dépassée, sur sa droite, par Fratelli d’Italia et surtout Forza Nuova et Casa Pound, des forces complètement néofascistes qui ont fait une percée aux dernières élections locales. Personne, néanmoins, ne serait en mesure de gouverner, si ce n’est sur la base d’une coalition large, ce qui n’est pas sans inquiéter le patronat italien et les partenaires européens de Rome.

Le Parti Démocrate (centre-gauche) de l’ancien Premier-ministre Paolo Gentiloni et qui aurait les faveurs de la Confindustria (le Medef italien) et de Bruxelles stagne à 22%, affaibli par Liberi e Uguali, nouveau parti soi-disant de gauche mais qui collectionne en son sein des anciens premiers ministres issus de l’ancien PCI comme D’Alema et Bersani et qui ont appliqué, quand ils étaient au pouvoir, des politiques anti-ouvrières et interventionnistes à l’extérieur. Les deux formations se partagent le soutien de la bureaucratie syndicale, à commencer par celui de la CGIL, la principale des trois confédérations syndicales italiennes.

Cependant, c’est bien cette crise politique profonde et que vont confirmer les élections à venir qui préoccupe les secteurs les plus lucides de la bourgeoisie dans un pays économiquement malade et socialement dévasté par la crise, avec un chômage des jeunes de 33% et qui compte au moins 10 millions de travailleurs pauvres.

C’est dans ce contexte que les « migrants » les « extra-communautaires » sont montrés du doigt, accusés de tous les maux dont souffre le pays, à la fois par Berlusconi et l’extrême droite mais également par le PD et le M5S. C’est dans ce cadre qu’a eu lieu, début février, la fusillade de Macerata (Marches), au cours de laquelle un néofasciste de 28 ans a blessé par balles six jeunes travailleurs africains ou encore qu’un militant de Potere al Popolo (gauche radicale) a été blessé au couteau pendant un collage, à Pérouse (Ombrie), la semaine dernière.

Cela ne veut pas pour autant dire que la situation soit uniquement dominée par la droite. A une semaine des élections, le 24 février, le SiCobas, l’un des syndicats de base les plus actifs sur le front des luttes et des grèves dans la logistique et le secteur agroalimentaire, a réuni près de 10.000 manifestants, à Rome, dont une majorité de travailleurs immigrés pour de meilleures conditions de travail, contre la répression et les lois xénophobes, mais sur des bases radicalement anti-électorales et abstentionnistes.

A la gauche de la gauche, sur le terrain des urnes, deux formations se présentent. Il y aura, d’un côté, Potere al Popolo (PaP), un cartel électoral « au programme antilibéral radical », selon ceux-là mêmes qui le composent, comme le dirigeant italien de la formation sœur du NPA, Franco Turigliatto, sorte de Podemos ou de France Insoumise à l’italienne mais qui n’est même pas assurée de passer la barre des 3%, en dépit de son programme volontairement modéré et, par certains aspects, chauvin. Il y aura également, de l’autre, Sinistra Rivoluzionaria, avec une audience beaucoup plus réduite mais ayant réussi à passer les obstacles anti-démocratiques de la loi électorale italienne en réunissant un peu plus de 25.000 signatures. SR réunit deux petites formations se revendiquant du trotskysme, Sinistra Classe e Rivoluzione et le Parti Communiste des Travailleurs et avance un programme beaucoup plus avancé et anticapitaliste que PaP.

Mais c’est bien l’instabilité de la politique bourgeoise qui va continuer à dominer la situation italienne dans les prochains mois, avec ses aspects extrêmement réactionnaires, mais également des possibilités, si l’ensemble des forces syndicales et politiques combatives et lutte des classes se situaient sur le terrain à la fois social mais également politique de l’affrontement face aux contre-réformes passées et à venir.

[Crédits : Angelo Carconi-Ansa et RP]


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