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Meeting international simultané : Etats-Unis

Julia Wallace : « Nous avons besoin d’un parti politique qui soit indépendant des capitalistes et des impérialistes »

Nous relayons ici l’intervention de Julia Wallace, travailleuse sociale, militante et fondatrice de Left Voice, lors du meeting international simultané contre le racisme et les violences policières.

Comité de Rédaction

13 juillet 2020

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Je m’appelle Julia Wallace, je suis une militante anti-raciste et membre fondatrice de Left Voice. Je suis une militante trotskyste depuis deux décennies. J’ai grandi dans un quartier ouvrier noir de Los Angeles, ma mère était enseignante à aux "écoles de la liberté" dans la section de Californie du Sud du parti des Blacks Panthers.

Comme tant de personnes noires aux États-Unis, j’ai vécu et fait face au racisme et à la violence de la police. Aujourd’hui, je suis tellement fière de voir, si nombreux, des jeunes Noirs prendre la rue avec des millions d’autre personnes contre la brutalité policière et le racisme systémique.

Ces 100 derniers jours, il y a eu des manifestations dans 2500 villes à travers le monde et les États-Unis. Elles ont été dirigées par une jeunesse noire précaire. Cette jeunesse a porté des slogans comme "Black Lives Matter" et "Abolish the police" (Abolir la police). Ces manifestations ont implacablement défié et contesté le racisme de ce système et sa police corrompue. La police est une force d’occupation raciste, corrompue et meurtrière dans les communautés noires. Elle torture, tabasse, tue la jeunesse noire et métisse. La police humilie et attaque aussi les jeunes trans, elle a attaqué des personnes en situation de handicap, des personnes âgées et des jeunes sans-abris.

Parmi ces meurtriers, Derek Chauvin, le flic raciste et sadique, qui souriait alors qu’il assassinait George Floyd, l’étranglant jusqu’à la mort en plein jour, à la face du monde. Il pensait s’en sortir. Il a déchaîné la rage. La colère a explosé. Pas seulement contre la police à Minneapolis mais contre la police dans le monde entier. Des reliques de l’esclavage ont été mises à bas sous les applaudissements de foules de jeunes. Des stations de police ont été détruites, des voitures de police brûlées, des magasins comme Target également avec un soutien populaire massif. Des quartiers et des rues ont été pris et occupés.

Le meurtre de George Floyd a déchaîné une colère inédite depuis des décennies. Non seulement contre le meurtre de George Floyd mais également face à la pandémie et la crise économique. Autant de problèmes que le capitalisme ne peut pas résoudre. La police ne peut pas être réformée.

Le capitalisme étasunien est raciste jsuqu’à la moelle, il a été fondé sur l’esclavage, sur le trafic et le vol du travail d’une main-d’oeuvre africaine pour les bénéfices de l’industrie cotonnière, pour profiter à la plus grande industrie, l’industrie anglaise. Comme le disait Marx : « Sans l’esclavage, vous n’avez pas de coton, sans le coton vous n’avez pas d’industrie moderne ».

Depuis les origines de ce pays, les capitalistes américains et les esclavagistes ont pris toutes les mesures possibles pour maintenir la classe ouvrière dans un été de division et empêcher des soulèvements conjoints d’esclaves et de travailleurs blancs : de la création de patrouilles pour rattraper les esclaves en fuite à l’institutionnalisation législative du racisme. Ils ont brutalement exploité les travailleurs esclaves noirs. Les Noirs trimaient dans les champs, enrichissant les capitalistes et les riches propriétaires terriens esclavagistes. Quand l’esclavage a été aboli, ils ont créé Jim Crow. Quand Jim Crow a été détruit par le Mouvement des Droits Civiques, ils ont créé d’autres loirs pour marginaliser et attaquer les Noirs. Cela signifie que la police a servi à un objectif. Attaquer les Noirs et maintenir la propriété privée.

Les travailleurs blancs étaient payés pour obtempérer avec les privilégiés, et étaient menacés par les mêmes forces de répression s’ils résistaient. Le but des capitalistes était de prévenir une union des pauvres, des exploités et des opprimés. Encore aujourd’hui les Noirs sont moins payés que les Blancs pour le même travail, ils souffrent davantage du chômage et sont sur-représentés parmi les sans-abris, ils sont largement plus assassinés par la police. Le racisme infuse chaque aspect de la société.

Malgré tout, il existe de nombreux exemples de Noirs, de Blancs et de personnes d’autres ethnies se battant ensemble contre le racisme. La lutte multi-ethnique qui a lieu aujourd’hui est le pire cauchemar de la bourgeoisie américaine.

Tant les Démocrates que les Républicains cherchent à étouffer et réprimer le mouvement, mais ils optent pour des stratégies différentes. Les Républicains, sous Trump, ont ouvertement couvert les suprémacistes blancs avec la rhétorique la plus violente et la plus bigote. Trump a appelé la Garde nationale et l’armée pour réprimer les manifestations. Il a menacé « s’ils commencent à piller, on commencera à tirer » (« when the looting starts, the shooting starts »), reprenant les mots d’un officier de police raciste de Miami dans les années 1960. Ces menaces ont rendu les manifestants encore plus audacieux. Ils ont obligé Trump à se retirer dans son bunker comme le lâche qu’il est. Il a poursuivi dans son soutien aux suprémacistes blancs qui ont continué à attaquer et tué les manifestants à côté de la police.

La stratégie des Démocrates a consisté à faire des concessions et à coopter. Ils ont essayé de mettre sous le tapis les années d’attaques qu’ils ont fait subir à la communauté noire. Ils ont permis de faire exploser les taux d’incarcération, la gentrification, ont protégé des assassins comme Derek Chauvin.

Sous les administrations Clinton et Obama, les Noirs ont subi comme jamais auparavant des saisies et des expulsions. Désormais les Démocrates posent un genou à terre au Congrès, drapés de pagnes en wax, et prétendent soutenir le mouvement. Pendant ce temps, lorsque la nuit tombe, ils tirent des gaz lacrymogènes sur les manifestants et les frappent dans la rue. Le candidat à la présidentielle, Joe Biden, a déclaré au mouvement Black Lives Matter que « la police devrait tirer dans les jambes plutôt que dans le coeur ». Un clown raciste parmi les autres ! C’est pour lui que la bureaucratie syndicale, les ONG et les organisations à but non lucratif, vont faire campagne ? On ne va pas se laisser acheter par des miettes pour appuyer notre propre oppression.

Aucun parti capitaliste ne peut résoudre les problèmes de la crise, du racisme systémique ou des violences policières. Pour en finir avec le racisme, avec la police, il nous faut une stratégie d’émancipation. Il nous faut une stratégie qui s’attaque à la fois au capitalisme et à la police. La police qui défend ce système. C’est comme ça qu’on se libérera. En s’organisant par nous-mêmes en tant que classe ouvrière, que travailleuses et travailleurs.

La crise du coronavirus nous a bien montré que les patrons n’étaient absolument pas essentiels. Les travailleurs sont essentiels. La classe ouvrière peut stopper la roue du capitalisme mais plus que cela, les travailleurs peuvent organiser l’ensemble de la production et de la reproduction au service de nos vies plutôt que des profits de quelques capitalistes.

Les travailleurs syndiqués et non-syndiqués, précaires, peuvent s’organiser et riposter contre le racisme et l’exploitation patronale sur les lieux de travail et dans les communautés. Nous aurons besoin de combattre la bureaucratie syndicale qui refuse de mobiliser nos rangs pour défendre nos emplois et pour nous défendre contre l’austérité qui est imposée à la fois par les Démocrates et par les Républicains.

Nous, la classe ouvrière et les opprimés, nous avons besoin d’un parti politique qui soit indépendant des capitalistes et des impérialistes. Sans flics, sans patrons et sans militaires. Nous devons nous organiser nous-mêmes politiquement, dans les rues, dans nos entreprises, pour un parti qui représente nos intérêts.

Construire un parti révolutionnaire au sein de la plus grande, la plus dangereuse puissance impérialiste sur la planète est un défi énorme. Mais il est lourd de conséquences historiques. Ce défi est inséparable de celui de la construction d’un parti international de la classe ouvrière, qui est, pour nous, la Quatrième Internationale. C’est ainsi que Trotsky et les trotskystes américains du SWP (Socialist Worker’s Party) comprenaient leur tâche à la fin des années 1930. Notre organisation, la Fraction Trotskyste, avec l’ensemble de nos journaux en ligne du réseau La Izquierda Diario que nous publions dans 14 pays, s’attèle à relever ce défi. Nous sommes en accord avec ce que Trotsky a élaboré comme stratégie fondamentale pour renverser le capitalisme et construire le socialisme à échelle mondiale. Nous invitons tous les jeunes, qui sont aujourd’hui dans la rue, les socialistes [aux États-Unis, se dire socialiste n’a évidemment rien à voir avec le social-libéralisme représenté par le Parti socialiste en France], les militants Noirs qui font face aux violences policières, les travailleurs qui se lèvent contre l’oppression capitaliste, à reconstruire avec nous la Quatrième Internationale.

Le racisme, sous toutes ses formes, est l’ennemi de la classe ouvrière. La polcie brutale et raciste est un élément-clé de l’exploitation capitaliste. Nous devons détruire le racisme et abolir la police par notre militantisme et notre solidarité ouvrière internationale. Nous poursuivons le combat des révolutionnaires qui sont venus avant nous, pour construire un futur socialiste. Que les capitalistes tremblent ! Car oui, ils devraient être effrayés : nous ne nous arrêterons pour rien de moins que la fin totale de l’intolérance religieuse, de la police, du capitalisme et de l’impérialisme. Pour un mouvement ouvrier international, pour la révolution socialiste !

Comme Marx l’écrivait dans le Manifeste du Parti Communiste, et comme Assata Shakur, la révolutionnaire noire, l’a repris dans son serment : « Nous n’avons rien à perdre que nos chaînes. Nous avons un monde à gagner. »


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