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La « Garantie jeunes », réponse pro-patronale du gouvernement face à la précarisation de la jeunesse

Alors qu’étudiant-e-s et jeunes travailleur-euse-s sont parmi les plus précarisé-e-s par la crise sanitaire, le gouvernement continue à enfoncer le clou. Rejetant l’idée d’une extension du RSA aux moins de 25 ans, la ministre du travail propose plutôt d’élargir l’accompagnement rémunéré de la « Garantie jeunes » ; autrement dit, cette allocation ne serait versée qu’en contrepartie d’un stage intensif de 12 à 18 mois. Une solution pro-patronale du gouvernement qui participe de la normalisation des emplois précaires chez les jeunes travailleur-euse-s.

Eli Sand

12 janvier 2021

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Crédits photo : Alain Jocard - AFP

Alors qu’en 2019 déjà, un-e étudiant-e sur cinq vivait en dessous du seuil de pauvreté, la crise n’a fait qu’accentuer cette grande précarité qui touche massivement la jeunesse. En première ligne face à cette crise sanitaire et économique sans précédent, les jeunes sont aujourd’hui surreprésentés dans les taux historiquement hauts du chômage pour le troisième trimestre de 2020. La perte d’emploi de ces jeunes travailleurs et l’impasse dans laquelle ils se retrouvent ne fait donc « que » s’ajouter à des situations déjà amplement fragilisées par la hausse du coût de la vie pour les étudiant-e-s due à la pandémie.

Face à une telle situation, la seule réponse du gouvernement a été la mise en place d’une plateforme « 1 jeune, 1 solution », qui non seulement se contente de renvoyer aux offres déjà proposées par Pôle Emploi, ou vers des missions locales et offres de services civiques, mais n’offre aucune aide financière pour les jeunes à la hauteur de la situation. C’est dans le cadre de ce programme que le gouvernement Macron propose un élargissement de l’accompagnement rémunéré offert par la « Garantie jeunes » pour les jeunes sans emploi. Une fausse solution qui s’inscrit dans l’hypocrisie générale du gouvernement, plus préoccupé par la préservation de ses deniers que par la précarisation de la jeunesse.

« L’émancipation par le travail », la solution miracle du gouvernement

« La Garantie Jeunes Universelle, c’est mieux que le RSA jeune car il y a en plus un accompagnement vers l’emploi » : tel est l’argument phare d’Elisabeth Borne, ministre du travail, pour défendre cette pseudo-solution que veut offrir le gouvernement. Mais de fait, cette garantie jeune, qui a été mise en place en 2013 et généralisée en 2016, est une fausse solution puisqu’en contrepartie de cette allocation mensuelle - d’un montant maximal de 484 euros, contre 567 euros pour le RSA jeunes -, les bénéficiaires doivent suivre un parcours d’insertion intensif en mission locale pendant 12 à 18 mois.

Le vœu du gouvernement pour cette nouvelle année est donc d’élargir cette « Garantie jeune », afin d’éviter un RSA généralisé aux moins de 25 ans, et ce en doublant simplement le nombre de bénéficiaires – qui n’était que de 100 000 en 2019. Le gouvernement compte ainsi modifier les conditions d’entrée, qui excluent aujourd’hui certains jeunes précaires comme ceux occupant un « emploi alimentaire » sur des contrats courts.

Or, comme le fait si bien savoir le directeur de la mission locale de Rennes Philippe Jourdan, la généralisation des dispositifs d’accompagnements rémunérés est une façon de contourner la question du RSA jeunes – à propos de laquelle il se dit lui-même réservé – et éviter que certain-e-s jeunes « hésitent à se bouger les fesses ». Ainsi, non seulement cette contrepartie exigée pour toucher cette allocation est particulièrement exigeante, notamment lorsque le-la jeune concerné-e doit assumer des études en parallèle, mais cette « garantie jeune universelle » ne suffira pas « à répondre à l’urgence d’un filet de sécurité pour les 18-25 ans », selon le sénateur socialiste Rémi Cardon.

La réponse pro-patronale du gouvernement face à la précarisation de la jeunesse

« L’émancipation par le travail », telle est la ligne directrice d’Elizabeth Borne en résonance avec celle du patronat qui ne compte pas se priver de tirer profit du programme sur mesure que lui a préparé le gouvernement, les entreprises touchant une aide de 4 000€ par embauche grâce au plan « 1 jeune, 1 solution », à propos duquel la ministre du travail ne tarit pas d’éloges. Cette dernière s’enthousiasme ainsi : « Plus d’un million de jeunes ont été recrutés depuis le mois d’août, on est aussi en train de battre tous les records sur le recrutement des apprentis » ; dans le même temps, cette mesure d’élargissement de l’accompagnement rémunéré qui sera défendue au Sénat la semaine prochaine participe de cette normalisation du travail précaire chez les jeunes et plus généralement chez les travailleur-euse-s, à l’image de ces 400 000 contrats précaires qui ont été offerts pour la jeunesse par le gouvernement.

Cette pseudo-solution que propose le gouvernement illustre donc une nouvelle fois toute l’hypocrisie de ce dernier qui se dit préoccupé de la jeunesse, alors qu’il compte en réalité lui faire payer la crise. Entre précarité, décrochage scolaire et angoisse concernant l’avenir, la jeunesse se retrouve plus que jamais confrontée à une situation de détresse, à laquelle le gouvernement n’est pas capable d’apporter une réponse concrète et satisfaisante du point de vue de la jeunesse.


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