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À bas le racisme d'État

Loi immigration : la bataille des retraites doit être l’occasion de faire reculer Darmanin

Alors que la bataille des retraites est lancée, le gouvernement prépare une autre offensive de taille, xénophobe et raciste : la loi immigration portée par Darmanin qui devrait être examinée courant avril à l’assemblée nationale. Deux batailles qui sont profondément liées.

Gabriel Ichen

1er février 2023

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Crédits photo : Révolution Permanente/ Banderole déployées à Calais le 19 janvier 2023 à l’occasion de la mobilisation contre la réforme des retraites

Dans le cadre de la campagne « antiracisme et solidarité » plusieurs organisations associatives, des collectifs de travailleurs sans-papiers et des syndicats appellent à la mobilisation contre la loi immigration, nouveau projet de loi anti-migrants porté par Darmanin qui vient d’être présenté en conseil des ministres ce mercredi 1er février avant d’être examiné courant avril à l’assemblée nationale. Des assemblées générales à Paris, Marseille et Toulouse ont également été organisées et animées par la campagne « antiracisme et solidarité ». Elles appellent à plusieurs dates de mobilisation nationale, les 18 février, 4 mars et 25 mars contre ce nouveau projet de loi xénophobe et raciste qui promet une attaque d’ampleur contre les immigrés.

La loi immigration : une attaque d’ampleur contre les immigrés et contre l’ensemble de notre classe

Après la réforme des retraites, la loi immigration qui doit être débattue en avril à l’assemblée nationale constitue bien la prochaine attaque de taille prévue par le gouvernement contre notre camp social. En effet, le projet prévoit centralement de durcir les conditions de régularisation et d’aller toujours plus loin dans la chasse aux sans-papiers mis en place par le gouvernement.

Pour ce faire, Darmanin veut notamment intensifier l’exécution des expulsions en réduisant les recours possibles contre les obligations de quitter le territoire français (OQTF) et en étendant les cas d’application d’OQTF « sans délais » (à contester dans un délai de 48h). Il veut aussi étendre la « double peine » en systématisant les expulsions d’étrangers qui feraient l’objet de condamnations en justice. La loi prévoit également de soumettre l’obtention d’un titre de séjour pluriannuel à un test de français ou encore de pouvoir retirer un titre de séjour en invoquant le prétexte « de rejet des principes de la République » dans lequel à peu près tout et n’importe quoi pourra être invoqué pour expulser un étranger.

L’un des piliers de la loi est la création d’un titre de séjour « métiers en tension ». Ce nouveau titre de séjour ne facilitera en rien l’accès à la régularisation des travailleurs sans-papiers mais cherche seulement à répondre aux besoins en main d’œuvre des patronats du BTP et de l’hôtellerie-restauration, des secteurs où les travailleurs immigrés sont surreprésentés et où les conditions de travail et de salaires sont les plus difficiles. Darmanin a d’ailleurs tenu à rassurer : « si le métier n’est plus en tension, la personne perdra son titre de séjour ». Ce nouveau titre de séjour entérine donc le fait que les travailleurs immigrés seront soumis aux besoins du patronat, licenciables et expulsables à tout moment.

Cette énième loi immigration a donc pour objectif de poursuivre trente ans de politique migratoire visant à précariser et à pressuriser toujours plus les immigrés qui doivent faire face à des situations administratives intenables, pouvant risquer à tout moment l’expulsion. Cette « fabrique de sans-papiers » mise en place par l’État répond en dernière instance aux intérêts du patronat. Face à leur situation toujours plus précaire les immigrés sans-papiers sont sans cesse poussés à accepter les emplois les plus mal payés et aux conditions les plus difficiles. Les récents témoignages des conditions de travail et de salaire d’ouvriers sans-papiers exploités sur les chantiers des Jeux Olympiques 2024 de Paris en sont un exemple frappant.

Le mouvement contre la réforme des retraites : une opportunité pour faire reculer le gouvernement sur la loi immigration

Sans majorité à l’assemblée nationale, et pour s’assurer le soutien de la droite qui a pour le moment annoncé qu’elle ne votera pas le projet de loi car n’étant pas assez dur, Darmanin a d’ores et déjà annoncé être prêt à faire des concessions qui impliqueraient un texte toujours plus dur avec potentiellement l’instauration de quotas. De son côté la gauche institutionnelle demeure pour le moment silencieuse sur la loi immigration, et certaines voix à la France Insoumise se disent même être prêtes « à co-construire le texte ».

C’est pourquoi, pour faire reculer Darmanin sur la loi immigration, une mobilisation massive et large menée par les travailleurs immigrés et sans-papiers et par l’ensemble du mouvement ouvrier est indispensable. Sans une telle mobilisation de l’ensemble de notre camp social, il sera difficile de faire reculer le gouvernement. Or la journée du 19 janvier dernier, lors de laquelle plus de deux millions de personnes se sont mobilisées contre la réforme des retraites ainsi que celle du 31 janvier, qui a mobilisé encore plus massivement, ouvrent la possibilité d’un mouvement massif en capacité de faire reculer le gouvernement sur son projet de réforme des retraites, mais aussi sur la loi immigration.

Comme nous l’écrivions au sujet de la journée du 19 janvier : « la réforme des retraites sert de catalyseur à l’ensemble des questions qui travaillent en profondeur le prolétariat français. Non seulement contre le gouvernement et sa réforme, mais également pour les salaires, contre la dégradation des services publics, contre un régime politique toujours plus autoritaire, etc. Le contenu de la mobilisation du 19 janvier apparaît ainsi plus politique que revendicatif, et dépasse largement la question de la réforme des retraites »

Le caractère politique de la mobilisation qui dépasse le simple retrait de la réforme des retraites laisse donc toute sa place à la revendication du retrait de la loi immigration ainsi qu’à la régularisation immédiate de tous les sans-papiers. À ce titre, il est intéressant de noter la présence des travailleurs sans-papiers dans la mobilisation parisienne du 19 janvier ainsi que la présence dans la manifestation de Marseille de banderoles avec des mots d’ordre du type « avec ou sans papiers, même classe, même lutte », ou encore l’appel de la marche des solidarités à manifester ce 31 janvier. Cette présence montre que les travailleurs sans-papiers et immigrés sont prêts à se battre, comme ils l’ont montré ces derniers mois et années en se mobilisant à plusieurs reprises pour des régularisations à l’image de la grève des travailleurs de Chronopost, ou de la grève victorieuse des travailleurs sans papiers de Planett Interim en 2021.

Cependant, une telle revendication ne pourra pleinement émerger dans la mobilisation actuelle qu’à la condition que le mouvement ouvrier et ses organisations qui se mobilisent contre la réforme des retraites s’emparent des revendications du retrait de la loi immigration et de la régularisation de tous les sans-papiers et qu’elles soient portées à la base, au sein des cadres d’auto-organisation de la grève, dans les assemblées générales et les assemblées générales interprofessionnelles. Seule une telle prise en charge des revendications des luttes des travailleurs sans-papiers par le mouvement ouvrier pourra permettre de gagner face aux projets de Macron et Darmanin.

Retraites et loi immigration, même logique, même combat

La loi immigration et la réforme des retraites se suivent dans le calendrier du gouvernement et répondent à une même logique : pressuriser et attaquer toujours plus les conditions de vie de la classe ouvrière et de ses franges les plus exploitées dont font partie les travailleurs immigrés et sans-papiers. En effet, en rendant toujours plus impossible la vie des sans-papiers et en rendant toujours plus difficiles les possibilités d’être régularisés, le gouvernement permet au patronat de dégrader toujours plus des conditions de travail déjà très difficiles auxquelles les travailleurs sans-papiers sont contraints de se soumettre du fait de leur statut extrêmement précaire.

Les travailleurs sans-papiers et immigrés feront partie de ceux les plus durement impactés par la réforme des retraites. Du fait qu’ils aient peu cotisé, ils sont souvent contraints de devoir travailler jusqu’à tard alors que leurs corps sont déjà abîmés par des années de travaux pénibles. En reculant l’âge de départ et en accélérant l’allongement de la durée de cotisation, l’espoir pour les immigrés de toucher même une pension misérable est toujours plus réduit. Ajouté à la loi immigration, c’est un véritable enfer que promet le gouvernement aux travailleurs sans-papiers.

Dès lors, la bataille pour des retraites dignes pour toutes et tous ne peut se faire sans prendre en compte la situation des travailleurs immigrés et sans papiers qui ne pourront espérer avoir une retraite qu’à la condition d’obtenir leur régularisation.


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