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Surenchère sécuritaire

Marseille : Contre le trafic de stupéfiants, Darmanin mise sur le tout-répressif

Après une polémique avec des élus municipaux, Darmanin s’est rendu à Marseille ce jeudi pour annoncer l’arrivée de 300 policiers de plus pour lutter contre le trafic de stupéfiants. Une mesure dans la lignée de la politique ultra-sécuritaire déployée par le ministre depuis les lois séparatisme et sécurité globale.

Camille Lupo

25 février 2021

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Crédit photo : Jacques Paquier

Ce jeudi, le ministre de l’Intérieur est descendu en personne à Marseille pour annoncer 300 policiers de plus sur la ville, dont 100 dès 2021. Une annonce qui a réjouit non seulement des élus municipaux qui dénoncent le « manque criant » d’effectifs policiers, mais aussi provoqué l’« euphorie » des syndicats de police, selon des déclarations à 20 Minutes. Cette annonce soudaine fait suite à un débat entre Darmanin et la municipalité de Marseille : le ministre avait clairement remis en cause sur RTL le moratoire sur la vidéosurveillance porté par la municipalité.

Une polémique sur la « meilleure répression »

« Nous considérons la vidéoprotection comme un des moyens les plus efficaces pour lutter contre la délinquance. Le ministre va se rendre à Marseille et pourra aborder ce point avec la municipalité », a déclaré le Ministère de l’Intérieur, toujours au journal 20 Minutes. Un élu de la majorité PS de la mairie de Marseille rétorque quant à lui que « jusqu’à preuve du contraire, une caméra n’a jamais arrêté le moindre voleur, et encore moins un trafic de drogue. C’est plutôt des effectifs de police présents sur l’ensemble du territoire de Marseille dont nous avons besoin ».

Derrière la polémique entre le ministre LREM et la majorité municipale PS de Marseille, il s’agit sur le fond d’un débat dont les protagonistes partagent la même logique : celle de la « guerre contre le trafic de drogues » et de la surenchère sécuritaire. Un domaine dans lequel Darmanin tient à assurer sa position de leader.

Le ministre avait déjà annoncé la mise en place d’une amende de 200 euros pour l’usage de stupéfiant cet été, et la mise en place en décembre dernier d’une politique de signalement des lieux de deal au nom de reconquête des « territoires perdus de la République ». Dans une séquence marquée par l’offensive sécuritaire du gouvernement autour des lois séparatisme et sécurité globale, la descente à Marseille de Darmanin s’inscrit dans la lignée d’une volonté affichée de stigmatisation des quartiers populaires au nom de la guerre contre la drogue et les trafics. Une stigmatisation qui sert en retour pour le gouvernement à désigner ceux que Darmanin a déjà décrits comme « les ennemis de la République » et justifier ainsi le tournant ultra-sécuritaire du gouvernement.

Pas d’issue sécuritaire aux problèmes sociaux

« Ce qui est tragique, c’est que pour un jeune, dans ces cités, la réussite est beaucoup plus simple dans le réseau de stupéfiants que dans la vie normale », a expliqué Jean-Baptiste Perrier, directeur de l’institut de sciences pénales et de criminologie à l’université d’Aix-Marseille, au Figaro.

Les habitants des quartiers populaires sont en première ligne face à la précarité, avec des taux de chômage particulièrement élevés et des emplois précaires et peu rémunérés. Une situation accentuée par la crise sanitaire et économique, et que le premier confinement avait déjà mis en lumière. À Marseille, on avait pu voir d’énormes files d’attentes pour des colis alimentaires en particulier dans les quartiers nords, où s’ajoutent à la précarité et la pauvreté un quadrillage policier qui vise notamment à réprimer les jeunes racisés de ces quartiers.

Le sociologue Marwan Mohammed expliquait dans Le Monde à propos du déchainement de violences dans les quartiers populaires que « si on veut agir en profondeur, on retombe sur les questions fondamentales, mais délaissées, de la ségrégation, de l’échec scolaire, du manque de perspectives, des difficultés d’insertion ou de situations familiales compliquées ». Un raisonnement qui peut s’étendre aux problématiques des trafics de drogues, car face à un phénomène structurel, la question qui se pose est celle du système qui donne naissance à ces pratiques.

Comme nous l’écrivions déjà en décembre dernier : « Cela fait bien longtemps que la logique de répression et de « guerre contre le trafic de drogues » a montré son incapacité à lutter réellement contre les trafics de stupéfiants. Cette logique et ces mesures servent en réalité un agenda politique réactionnaire, qui, loin de traiter les causes profondes du trafic de drogue, vise à renforcer la répression et la stigmatisation des quartiers populaires ».


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