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Sécurité globale

Même le conseil de l’Europe estime que l’article 24 est « une atteinte à la liberté d’expression »

Pas franchement connu pour son caractère démocratique, le conseil de l'Europe a sévèrement taclé, dans la lignée de la presse internationale, l'article 24 de la loi Sécurité Globale, le qualifiant d' « atteinte à la liberté d'expression ». Une critique qui épargne cependant le reste de la loi.

Sara Yuki

19 décembre 2020

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Depuis l’annonce de la Loi Sécurité Globale des plus liberticides, le gouvernement a dû faire face aux nombreux manifestants descendus dans la rue. C’est dans ce contexte que des organismes institutionnels pourtant peu démocratiques, comme le Conseil de l’Europe, ou de grands médias internationaux libéraux que l’on peut difficilement taxé d’être des organes de propagande gauchistes, comme le New York Times ou le Financial Times, taclent Macron et sa loi Sécurité Globale, focalisant en particulier sur le très polémique article 24. 

Macron un président “illibéral” ?

La commissaire au droit de l’Homme du Conseil de l’Europe Dunja Mijatovic va droit au but. Pour lui, l’article 24 de la loi Sécurité Globale est une « atteinte à la liberté d’expression, laquelle inclut la liberté d’informer ». Alors que l’institution exhorte le Sénat français à amender ce texte, Mijatovic poursuit, dans une lettre adressée au président de ce dernier : « La compatibilité d’une telle ingérence avec l’article 10 de la [Convention européenne des droits de l’homme], qui garantit ce droit, apparaît pour le moins douteuse ». Difficile de faire plus clair.

Dans les grands noms de la presse internationale, notamment anglo-saxonne, naissent des florilèges d’articles dénonçant la tournure autoritaire du gouvernement. Le New York Time dénonce une « alarmante dérive autoritaire » tandis que le Financial Time consacre un éditorial en décrivant cette loi comme « plan illibéral de Macron pour protéger la police française ». Nous pouvons lire plus loin à quel point ce journal libéral est déçu de la tournure de la politique de Macron en le qualifiant d’illibéral, adjectif attribué à des dirigeants de pays comme la Hongrie ou la Pologne. Macron serait ainsi un « modernisateur disruptif ressemble de plus en plus à un conservateur français traditionnel, quoique teinté d’un peu de vert ».

Quittant définitivement son manteau de président défenseur des libertés, Macron se place à l’avant garde avec une politique autoritaire, liberticide et raciste, comme avec la loi Séparatisme, l’objectif inavoué étant de chercher à apparaître fort sur le terrain régalien, et à capitaliser politiquement sur le terrain de la droite et de l’extrême droite. Il faut avoir les moyens de ses ambitions, et, Macron le sait, imposer son lot de réformes anti-sociales, faire payer la crise sanitaire et économique aux travailleuses et aux travailleurs se fera par la matraque.

Pour autant, il est clair que ni le conseil de l’Europe, ni les journaux internationaux libéraux cité, ne sont en soi « plus démocratique » ou « moins réactionnaire ». En effet, la logique de fond qui prédomine à ces prises de positions est avant tout une divergence de point de vue sur le maintien de l’ordre, craignant avant tout que le renforcement autoritaire et sécuritaire du gouvernement Macron n’approfondisse en définitive le discrédit grandissant entre la police et la population. En d’autres termes, la préoccupation principale de ces institutions politiques et médiatiques est avant tout de ne pas voir l’institution policière, l’un des piliers central du régime français, remise en cause à une échelle de masse, ce qui pourrait ouvrir à une crise aux répercussions internationales.

Face aux attaques liberticides, construire la contestation dans la rue !

Le 16 décembre, Castaner au micro de France Info nous annonçait que « ce n’est pas nécessaire d’aller manifester » car « l’article 24 n’existe plus, nous allons le réécrire en totalité ». Il omet de préciser que cet article est simplement transféré dans la loi contre les séparatisme, une loi tout autant liberticide, et ô combien islamophobe. Plus que recopiée, elle est élargie à toute personne travaillant dans la fonction publique. Ainsi, d’après cet article 24 (désormais article 25 ou 18 dans la loi séparatisme), il sera impossible de filmer une personne dans l’exercice de ses fonctions, qu’il soit policier ou fonctionnaire. 

Par ce transfert dans la loi séparatisme, le gouvernement cherche à garder la main sur la rédaction de celui-ci. C’est le Sénat aujourd’hui qui s’occupe de traiter la Loi Sécurité Globale, or Macron n’a pas la majorité au Sénat qui est détenue par Les Républicains. La droite veut s’occuper de cette rédaction surtout pour batailler l’espace politique en dispute avec LREM, sur le terrain régalien et sur les thématique sécuritaire, en vue de 2022. Une offensive déjà bien entamée avec l’amendement à la Loi Pour la Recherche (LPR) qui menace de trois ans d’emprisonnement et de 45.000€ d’amendes tout "trouble" dans les universités.

Dans ce contexte général, il est clair que la mobilisation de ces dernières semaines a été une inflexion progressiste dans la situation. S’il s’agit de poursuivre à la construction, cantonnée à une avant-garde, et à l’élargissement du mouvement, avec la prise en compte des questions sociales et contre l’offensive islamophobe labellisée « loi séparatisme ». C’est pourquoi, loin de se limiter à l’article 24, il s’agit d’exiger le retrait total de la loi Sécurité Globale, de la loi séparatisme et l’abrogation de toutes les lois sécuritaire et racistes. Un combat qui est lié à l’exigence d’un plan sanitaire alternatif et à la question du désastre social en cours, avec des centaines de milliers de licenciements partout dans l’hexagone. C’est par ce biais qu’il sera possible d’imposer un rapport de force à la hauteur, et ouvrir la voie à une réelle alternative au monde liberticide, raciste et de misère promis par la politique de Macron.


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