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Guerre en Ukraine

Non à la guerre ! Non aux sanctions ! Les populations n’ont pas à en payer le prix !

Depuis l’invasion russe en Ukraine, l’OTAN et les puissances impérialistes ont imposé un régime de sanctions économiques sévères contre la Russie. S’il faut condamner sans condition la guerre menée par Poutine, il faut dans le même temps dénoncer ces sanctions qui touchent en premier lieu la population civile.

Damien Bernard

3 mars 2022

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Suite à l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les membres de l’OTAN ont adopté des sanctions économiques sévères contre le régime de Poutine. Parmi les premières figure la déconnexion du système de paiement international SWIFT, ainsi que le gel des réserves de la Banque centrale russe.

Cet ensemble de mesure vise, selon les termes même du ministre français de l’Economie, Bruno Le Maire, à « provoquer l’effondrement de l’économie russe », qu’il est nécessaire de frapper « vite » et « fort ». Premières conséquences de ces sanctions, « le rouble s’est effondré de 30% » tandis que « les réserves de change russe sont en train de fondre comme neige au soleil ». « Le fameux trésor de guerre de Vladimir Poutine est déjà réduit à presque rien », explique Le Maire, tout en disant constater « l’effondrement du marché », la hausse des taux d’intérêt et « l’augmentation de l’inflation » en Russie.

S’il a été obligé de rétropédaler sur les aspects « guerriers » de son propos, le ministre de l’Économie a au moins le mérite de la franchise : le peuple russe « en paiera aussi les conséquences ».

Asphyxier l’économie russe : des sanctions qui toucheront en premier lieu les populations

Ces sanctions ne visent pas seulement Poutine et les oligarques russes, mais « toute l’économie » du pays. L’effondrement de l’économie aura pour « effets collatéral » immédiat une hausse très importante du coût de la vie pour le peuple russe, ainsi que l’explosion du chômage et de la pauvreté. Ces « conséquences » économiques et sociales, le gouvernement français les assume parfaitement, affirmant même ne pas savoir « faire autrement ».

De fait, les sanctions ont un effet quasi immédiat. A titre d’exemple, la chute de la monnaie russe va renchérir considérablement le prix des produits importés, touchant directement la population au porte-monnaie. « Les sanctions sur la banque centrale russe vont limiter sa capacité d’intervention notamment sur les marchés des changes et provoquer la baisse de la monnaie russe », pointe Philippe Waechter, économiste des marchés financiers. Avant d’ajouter : « cela se traduira par davantage d’inflation puisque les produits importés coûteront beaucoup plus chers. »

A ces sanctions sur la banque centrale s’ajoutent la déconnexion du système SWIFT des principales banques russes. Cette dernière aura un effet inflationniste supplémentaire, comme le pointe encore Philippe Waechter : « l’incapacité des banques à utiliser Swift, et donc à financer les exportations et importations russes, va peser encore davantage sur la disponibilité des produits dans les boutiques russes accentuant les pressions inflationnistes. » Il conclut donc : « Le Russe moyen va s’appauvrir »

Outre l’hyper-inflation, ces sanctions ouvrent parallèlement la voie aux pénuries : comme le pointe TV5monde, « d’ici quelques semaines, les rayons des magasins devraient se vider peu à peu de leurs denrées non-essentielles. Les vêtements ou certains produits d’hygiène pourraient venir à manquer, frappant directement la population. Car derrière ces sanctions économiques, ce sont bien les Russes qui payent le prix pour les décisions de leur dirigeant. »

Des sanctions économiques pour préparer la voie à une semi-colonisation de la Russie ?

Plus en général, loin de défendre « l’indépendance de l’Ukraine », les sanctions économiques imposées par les puissances impérialistes de l’OTAN, au premier titre les Etats-Unis, ont un autre objectif. Il s’agirait d’utiliser l’occupation actuelle de l’Ukraine pour se positionner en vue d’une semi-colonisation non plus seulement de l’Ukraine, mais de la Russie en tant que telle, s’appuyant pour cela sur un possible échec des calculs politiques et militaires de Poutine.

C’est en ce sens qu’il faut comprendre le revirement de la politique de l’Allemagne qui, après avoir été réticente à l’idée de prendre des sanctions, est désormais l’aile marchante du programme de sanctions contre la Russie. Une opportunité que l’Allemagne a aussi saisie sur le terrain militaire, en opérant « un revirement historique en approuvant l’envoi d’armes létales à un pays en guerre, et en allouant 100 milliards d’euros à son budget militaire, qui dépasserait 2 % de son PIB ».

Cette politique de sanctions vise essentiellement à priver de liquidités le régime de Poutine, en visant les banques et le secteur financier russes. Premier impact, la principale banque de Russie, Sberbank, présente dans huit pays européens, s’est déjà retirée du marché européen. Sur le terrain industriel, les puissances impérialistes préparent le terrain pour agir sur plus long terme. C’est en ce sens que Joe Biden a annoncé sa volonté de couper l’approvisionnement de la Russie en puces et semi-conducteurs pour « dégrader ses capacités industrielles sur des années ».

Non aux sanctions ! La population russe ne doit pas payer le coût de la guerre !

Une chose est sure : il n’existe pas de bonnes ou de mauvaises sanctions. Si le régime russe et les oligarques sont eux aussi visés par les sanctions, ils sauront en définitive se recomposer. Pour exemple, la déconnexion du système SWIFT suivant une approche sélective permet déjà à certains secteurs, comme celui des hydrocarbures, de tirer leur épingle du jeu. C’est ce que pointe un article de La Tribune : « La déconnexion du système SWIFT selon une approche sélective ne devrait pas (trop) pénaliser les exportations en gaz et pétrole de la Russie ».

Du côté de la population, les portes de sorties n’existent pas, et elles paieront très cher le prix de la guerre. Les mesures restrictives prises contre la Russie après 2014 ont déjà eu pour principale conséquence une baisse du pouvoir d’achat de la classe ouvrière russe, qui a reculé de près de 10% en dix ans. Aux nouvelles sanctions s’ajouteront l’inflation galopante, qui renchérira le coût de la vie. C’est ce qu’illustre l’explosion du coût des matières premières et de l’énergie : le cours du baril de pétrole a dépassé la barre des 100 dollars pour la première fois depuis 2014 quand le prix du gaz, lui, a considérablement augmenté. Le marché des céréales est également en hausse, et le cours du blé a atteint les 344 euros la tonne sur le marché européen.

Comme toujours, ce sont les populations locales qui vont payer le prix fort des sanctions économiques. S’il est indispensable de dénoncer l’occupation russe, il est tout aussi nécessaire de dénoncer ces sanctions qui, sous le prétexte de mettre la pression sur le régime russe, affament les populations, renforcent la précarité et sèment la misère. Non à la guerre ! Troupes russes hors d’Ukraine ! Non aux sanctions !


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