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Ecolonialisme

One Forest Summit. Macron tente de cacher l’impérialisme français derrière les arbres gabonais

Lors de sa tournée en Afrique aux côtés notamment d’un représentant de Total, Macron a promu la préservation de la forêt gabonaise. Une opération de com’ pour verdir le capitalisme français qui derrière les opérations de « préservation » pille, détruit l’environnement et réprime les populations.

James Draoust

3 mars 2023

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Crédits photo : AFP

En tournée en Afrique pendant 4 jours, Emmanuel Macron a profité de son passage à Libreville au Gabon, et du One Forest Summit qui s’y tenait pour tenter de développer son image de leader internationale en matière d’écologie à grand coups de vidéos-selfies et de déclarations hypocrites.

Après avoir vanté sa volonté de transformer les relations avec les pays d’Afrique Macron n’a pas annoncé de changements majeurs sur le fond, notamment sur les questions militaires où derrière des annonces de réduction des effectifs, il a réaffirmé la présence militaire française, via le maintien de toutes les bases dans la région. Son passage au Gabon, fief de la famille Bongo, historiquement liée au régime français, s’inscrit aussi dans l’ambition de renforcer la présence des entreprises et projets français. A commencer par l’exploitation de la forêt du bassin du Congo, qui recouvre 88% de la surface du pays. Dans cette forêt tropicale, la deuxième plus vaste du monde, s’étendant sur six pays, le potentiel géostratégique attise l’appétit des entreprises du monde entier, et Macron cherche à se positionner.

Pour cela, il utilise la préservation de l’environnement comme un vernis vert qui cache mal sa tentative de défendre les intérêts économiques français dans la région. Dans une vidéo selfie, tournée dans la réserve Raponda Walker et mise en scène à la djeuns comme il en a l’habitude lorsqu’il s’attaque au terrain de l’écologie, il explique la nécessité d’aider à préserver « un trésor de biodiversité ». Pour cela, la solution est toute trouvée : les « crédits de biodiversité » et les « partenariats de conservation positive ». La vidéo est aussi l’occasion de distribuer bons et mauvais points aux différents régimes de la région, en bon représentant de la Françafrique, et d’annoncer la tenue du sommet du One Forest Summit.

Ce sommet international, qui a pris place les 1er et 2 mars à Libreville, s’inscrit dans cette perspective. Lancé en 2017 dans le cadre de la période Make Our Planet Great Again de Macron et dans la lignée du One Planet Summit, ce sommet à l’initiative du président de la République pour se placer en leader de l’écologie néo-libérale n’a jamais été autre que la chambre d’enregistrement du capitalisme vert international. La fameuse formule du bla bla, popularisée par Great Thunberg pour dénoncer l’hypocrisie de ces grandes messes internationales avait ainsi été utilisée pour la première fois par la figure de l’écologie pour désigner la quatrième édition du One Planet Summit en 2021.

Le sommet a cette année pour objectif de mettre en place des financements, à hauteur de 100 millions d’euros, pour la préservation de la forêt du bassin du Congo. Un programme en lien avec les résolutions prises pendant la COP 15 de la biodiversité à Montréal, qui actaient une gestion coloniale des zones naturelles à préserver, au détriment des populations.

Ces programmes de « gestion » et de « préservation » de la biodiversité sont en effet une mainmise exercée sur des territoires, par des Etats ou des entreprises au détriment des populations et de leur survie. Dans un communiqué condamnant les résolutions de la COP15, l’ONG Survival International rapportait ainsi que rien que sur le continent Africain, le nombre de personnes expulsées de chez elles pour laisser place à des réserves naturelles atteint les 14 millions. Des opérations qui impliquent la répression des population, avec des cas d’intimidations, menaces, tortures et viols couramment rapportés.

Au côtés de Macron pour son excursion Africaine, et dans les délégations du sommet, des représentants du capitalisme français, comme Nicolas Terraz, directeur Exploration & Production de Total Energies. Une logique dénoncée par de nombreux militants, dont Bernard Christian Rekoula. Dans un entretien avec Survie, cet activiste gabonais des droits humains qui a attaqué en justice le pétrolier français Perenco pour les destructions engendrées dans la région explique :

« Le Gabon est aussi en train de vendre des portions de forêt à des multinationales telles que Total : émettre un permis de pollution à Total, soi-disant pour purifier l’air que Total est en train de polluer dans le monde, quelle aberration ! Ces mécanismes sont mis en place pour continuer à piller le peuple gabonais et fournir un permis de pollution aux entreprises. »

Bien implantée dans la région, la multinationale française mène en effet des politiques d’exploitation de la forêt, sous motif de préservation, à base de destruction environnementale et d’expropriation de fermiers dans la forêt du bassin du Congo. Elle s’est d’ailleurs associée avec la Compagnie des Bois du Gabon en juin 2022, pour exploiter la partie gabonaise de la forêt.

Révélateur de l’hypocrisie de Macron, pendant qu’il joue les sauveteurs des forêts au Gabon, sa police et ses services d’Etats détruisent la forêt amazonienne en Guyane. Une opération de déforestation d’ampleur et d’expropriation y est en effet menée pour mener le projet de la construction de la centrale électrique EDF de l’Ouest Guyannais (CEOG). Un projet pour lequel la police française réprime les populations autochtones, arrêtant entre autres des enfants s’opposant aux destructions.

Dans un interview à Reporterre, Christophe Yanuwana Pierre, porte-parole de la Jeunesse autochtone, dénonce un « écolonialisme » mené par la France : « Les projets dits “verts” que nous imposent les autorités sont en réalité de l’”écolonialisme”. Sous couvert d’installer une centrale hydrogène ou des panneaux solaires, ils rasent notre forêt et sapent notre souveraineté ».

Du Gabon à la Guyane, « l’écologie » du gouvernement n’a que des discours de publicitaire et des pillages et des destructions au service des entreprises françaises à offrir. Pour mettre un coup d’arrêt à cet impérialisme vert, il est urgent de s’organiser contre l’Etat et les Total et autres Perenco. Alors que le 7 mars et ses suites offre une possibilité de mettre en déroute le gouvernement, le mouvement écolo doit se saisir de la bataille contre la réforme des retraites pour y combattre au côté des travailleurs, et par la grève, ces grands destructeurs de l’environnement.


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