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Réforme des retraites

Pensions de réversion. Un dossier inflammable que le gouvernement tente d’étouffer

Alors que le gouvernement s'est déjà mis à dos nombre de retraités avec la hausse de la CSG, la modification du système des pensions de réversions qui, sous couvert d'harmonisation, risquent de subir un nivellement par le bas, provoque dés aujourd'hui inquiétudes et contestations chez ces derniers.

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Crédit Photo : Zakaria Abdelkafi

Le gouvernement peine à rassurer sur sa future réforme des retraites. En effet, ce dossier hautement inflammable des retraites commence à provoquer inquiétudes et remises en question, notamment autour de la modification des pensions de réversion que ce projet de loi prévoit. Les pensions de réversion permettent à une veuve ou un veuf de cumuler sa retraite et une partie de celle de son conjoint disparu.

Les inquiétudes autour d’une possible remise en cause de cette pension, qui bénéficie essentiellement aux femmes (à près de 90 %) ont émergé suite aux déclarations de Jean-Paul Delevoye, Haut-Commissaire à la réforme des retraites, qui en juin dernier déclarait ceci : « Compte tenu évolutions en matière taux d’emploi femmes et conjugalité, doit-on maintenir des pensions de réversion […], avec quels objectifs et sur quels critères ? ».

Si le premier a allumé la mèche, les suivants ont tenté de rassurer : « En aucun cas nous ne travaillons à remettre en cause les pensions réversion qui existent aujourd’hui », a promis lundi Edouard Philippe, agacé. Il en fut de même pour Agnes Buzyn ainsi qu’Emmanuel Macron qui, preuve des difficultés que rencontre aujourd’hui le gouvernement, se sont vus obligés de déclarer publiquement que les pensions de réversion ne seraient pas remises en cause.

Cependant, Benjamin Griveaux, porte-parole du gouvernement, a déclaré ce mardi matin chez Bourdin que la pension de réversion ferait effectivement « sûrement l’objet de discussion ». Quelques jours avant, Christophe Castaner qui, interrogé sur LCI, a annoncé clairement que ces pensions de réversion pourraient « baisser pour certains futurs bénéficiaires par rapport au système actuel, et augmenter pour d’autres », démontrant que les déclarations des autres membres du gouvernement ne sont qu’un écran de fumée visant à ne pas réveiller la colère des retraités. Ajoutant : « Évidemment la pension de réversion […] sera modifiée », twittant ensuite ceci : « Nous voulons construire un système de retraite + juste et + égalitaire pour les futurs retraités. Les pensions de réversion futures, étant une part des pensions principales, évolueront comme les retraites ».

De même que pour justifier la future réforme des retraites et le démantèlement des régimes spéciaux que celle-ci prévoit, l’argument de l’égalité, de l’harmonisation des différents régimes spéciaux, est ici utilisé – les pensions de réversion dépendant de 13 régimes spéciaux différents. Cependant, on voit qu’avec la future réforme des retraites qui va attaquer les différents régimes spéciaux et les acquis sociaux de certains secteurs du monde du travail, comme les fonctionnaires, et qui sera, avec son système à points, calculée sur l’ensemble de la carrière professionnelle et non plus les 25 meilleures années comme c’est le cas aujourd’hui, cette harmonisation se fera à travers un nivellement par le bas.

Dans la continuité de la politique antisociale menée depuis le début du quinquennat par Macron et ses ministres, cette réforme des retraites s’inscrit effectivement dans une logique de coupes budgétaires, de réduction des dépenses publiques et de casse des acquis sociaux. Cette pension de réversion équivaut aujourd’hui à 11 % du budget des retraites, c’est-à-dire environ à 36 milliards d’euros par an, une enveloppe que l’État aimerait bien pouvoir alléger, et ce au risque de pénaliser les retraités, et avant tout les retraitées.

En 2015, un rapport de la Cour des comptes préconisait déjà « d’harmoniser » les pensions de réversion, avec le but in fine de réduire les coûts du système de retraite. Ainsi, les propositions étaient les suivantes : une condition d’âge minimum unique de 55, voire 57 ans pour en bénéficier, un plafonnement des conditions de ressources dans la fonction publique et les régimes spéciaux et un taux de réversion unique à 54 %, alors qu’aujourd’hui des taux s’élèvent jusqu’à 60 %…
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Aujourd’hui les syndicats craignent effectivement cette « harmonisation par le bas », qui pourrait se traduire par exemple par un nivellement à 50 % ou 54 % de la pension. Cela jouerait en défaveur des régimes spéciaux s’élevant jusqu’à 60 %, par la généralisation d’un âge minimum à l’ensemble des conjoints, ce à quoi échappent aujourd’hui la plupart des régimes spéciaux, et de manière générale par des conditions d’obtention plus contraignantes.

Ainsi, si le gouvernement justifie cette modification du système des pensions de réversion à travers une recherche d’égalité, c’est bel et bien un entérinement des inégalités que celui-ci va sûrement engendrer. Aujourd’hui, les principales bénéficiaires de cette pension de réversion sont les femmes, - elles représentent 89 % des bénéficiaires. Cette pension de réversion, unique source de revenus – et de survie – pour certaines d’entre elles, devient dès lors un outil, certes insuffisant et avec un caractère palliatif, de « rééquilibrage » contre les inégalités de revenus selon le sexe, à l’heure où les inégalités professionnelles persistent à la retraite. Ainsi, si les pensions des femmes « restent inférieures de 40 % à celles des hommes », la réversion permet de « compenser » cet écart, le réduisant à 25 %, selon le Haut commissariat à la réforme des retraites.

Aujourd’hui, les déclarations des membres du gouvernement ne suffisent pas à rassurer l’opinion et les retraités. Un fait qui pourrait fragiliser d’autant plus Macron et le couper véritablement de » ce secteur, qui est pourtant un secteur social ayant majoritairement voté pour lui, et ce à l’heure où sa cote de popularité ne cesse de baisser et où ce dernier éprouve, depuis le début du quinquennat, de nombreuses difficultés à se consolider une base sociale. Les oppositions espèrent par ailleurs bien en profiter. Les Républicains, qui disputent entre autre avec Macron cette frange de l’électorat, ont sauté sur l’occasion, dénonçant, au travers d’Emmanuel Maquet, député de la Somme, la « brutalité » de cette retraite et « l’obsession du gouvernement à considérer les retraités comme des privilégiés ».


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