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Gestion coloniale

Répression en Guyane : le préfet ferme les stations service suite au blocage de dépots de carburant

Suite au blocage de deux sites de dépôt de carburants par des manifs anti-pass, le préfet de la Guyane a décidé de fermer toutes les stations-service de la région, jusqu’au 20 octobre, puis de limiter les approvisionnements à 10 litres par véhicule. Une manœuvre pour briser le mouvement, tout en faisant subir les conséquences de ce lock-out à l'ensemble de la population, dans la plus pure tradition coloniale.

Inès Rossi

19 octobre 2021

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Crédits photo : Pascal GUYOT (AFP/Archives)

Lundi matin, la Caravane de la Liberté, et des membres de l’Union des Travailleurs Guyanais, éléments moteurs du mouvement contre le pass sanitaire en Guyane, ont bloqué des dépôts de carburant de la Société anonyme de la raffinerie des Antilles Guyane (SARA). En représailles, le préfet de la Guyane, Thierry Queffelec, a signé un arrêté de fermeture administrative de toutes les stations-service du département, et ce jusqu’au mercredi 20 octobre, prétendument pour éviter une « pénurie potentielle de carburant ». Par la suite, l’achat de carburant sera limité à 10 litres par véhicule et par jour.

Le blocage des dépôts a été organisé pour protester contre le pass sanitaire, et contre la gestion autoritaire de la crise sanitaire en Guyane, où certaines zones sont encore soumises à un couvre-feu et à la fermeture de certains lieux publics et commerces. Surtout, le blocage intervient après la condamnation de quatre militants anti-pass, dont les bloqueurs exigent l’exonération : « Il est inadmissible de lutter pour avoir des moyens de réanimation et qu’aujourd’hui les camarades soient sanctionnés pour un feu de palettes » explique Yannick Xavier, secrétaire général de l’UTG.

La décision soudaine a évidemment entraîné des ruées immédiates vers les stations-service, qui se sont vite retrouvées débordées, et ont souvent dû fermer, par manque de carburant disponible. Si le préfet voulait éviter la pénurie, c’est raté.

En réalité, la fermeture des stations-service ne sert pas à préserver les stocks d’essence, mais a un rôle politique bien réfléchi. Elle équivaut ni plus ni moins à une punition collective pour l’ensemble des Guyanais, qui souffrait déjà de la hausse des prix du carburant, d’autant plus que la moitié de la population vit sous le seuil de pauvreté, et que le réseau de transports en commun reste minime.

La décision du préfet sert avant tout à affaiblir le mouvement contre le pass sanitaire, particulièrement fort en Guyane. Il s’agit à la fois d’atténuer l’impact que pourrait avoir leur action de blocage, en diminuant de force la demande en carburant, et de retourner la population guyanaise contre les militants, qui se retrouvent accusés de les pénaliser et de mettre la région à l’arrêt. En Guyane, où le niveau de vie est faible, et où le coût de la vie déjà très élevé, particulièrement en cette période de hausse des prix, la fermeture des stations service est une décision lourde de conséquence pour la population. La manœuvre vise donc également à retourner l’opinion publique contre les manifestants.

Cette brusque décision est typique de la gestion coloniale de la crise sanitaire depuis le début de la pandémie, où les décisions sont systématiquement prises par le haut, par l’Hexagone. Ces décisions sont subies par la population guyanaise, dépeinte comme récalcitrante et responsable de la flambée épidémique, dans un des départements les plus pauvres et dénués d’infrastructures de France.

Il y a pourtant urgence à mettre en place une véritable politique sanitaire en Guyane, durement affectée par le Covid, et cette politique ne peut pas être le fait d’un gouvernement autoritaire. La population, très jeune, est non vaccinée à 67 %. Le département d’Amazonie manque cruellement d’infrastructures médicales, et une proportion non négligeable de la population pauvre vit dans des conditions catastrophiques d’un point de vue sanitaire (en squat ou dans des bidonvilles sans eau courante, notamment). Comment, dans ces conditions, faire confiance à un État qui n’agit pas et laisse les hôpitaux se détériorer depuis des années ?

Le faible taux de vaccination en Guyane n’est pas le résultat d’une « nature » récalcitrante de la population, mais il a des bases matérielles bien réelles auxquelles le gouvernement n’apporte aucune réponse. Il est urgent de revendiquer l’auto-organisation démocratique des travailleurs, en particulier des travailleurs de la santé, afin de pouvoir établir un véritable plan à la hauteur de la crise qui priorise la vie et la santé de la population au lieu de veiller sur le profit des grandes entreprises de l’impérialisme français.


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