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Le Grenelle de l’éducation

Salaire des profs. Après le bâton, Blanquer manie la carotte

Une promesse ressortie chaque année sans que n’arrive rien d’autre que des contre-réformes et répression.

Christa Wolfe

7 octobre 2020

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Depuis 2010, avec le gel du point d’indice, le salaire des profs ne suit plus et partout on constate une baisse du pouvoir d’achat - environ 15% selon les syndicats. Après avoir gravé son nom dans l’histoire de la destruction de l’éducation nationale, avec sa réforme du lycée et la fin du baccalauréat, Blanquer ne cesse d’annoncer que le Grenelle arrive et qu’il va discuter salaire. Manière d’amadouer la fronde qui s’est accumulée depuis 2017, sans doute. Mais peut-être aussi moyen de faire passer la pilule des dernières entames à faire à l’éducation nationale - le soupçon vient spontanément quand on sait que le candidat Macron disait que le maintien des "statuts" le gênait. Ce qui est sûr, en revanche, c’est que cette revalorisation est nécessaire : à comparer les revenus des profs en Europe, on voit que la France est bien à la traine.

Aux profs, Blanquer demande beaucoup : depuis le #pasdevagues jusqu’au confinement improvisé, on constate que le ministre considère le métier avec une grande désinvolture. Pour rappel, à la suite de la campagne #pasdevagues, il avait promis une affiche en A3 du texte de la Marseillaise : face à la gronde des profs sur les classes surchargées et le manque de moyens humains et matériels, le ministre exhibait sa pirouette, une Marseillaise et ça va bien. Avec la réforme du lycée, passant outre toutes les remarques des profs sur les nouveaux contenus des programmes et les questions des personnels administratifs sur sa mise en oeuvre, Blanquer a avancé au bulldozer - là aussi, une gronde massive, des grèves au moment des E3C, une répression inouïe des profs mobilisés, avec carrément la police à l’intérieur des établissements - pour faire passer une épreuve du bac... Les moyens paraissent démesurés, ils sont en réalité révélateurs : un passage en force, une mise au pas. Comme si ce gouvernement avait renoncé à enrober l’exercice de son pouvoir dans la contrainte d’avoir à convaincre : un pouvoir qui se passe de mots. En tout cas, à l’adresse des personnels. Parce que le ministre de l’éducation nationale ne se prive pas d’aller chanter des louanges dans les médias, quitte à dire un peu n’importe quoi - qui vérifiera, après tout ?

Depuis cet été, c’est une petite musique qui revient : il va y avoir des discussions, un Grenelle des profs, des revalorisations. En réalité, c’est la même chanson qu’au moment de faire avaler aux profs la réforme des retraites, à la rentrée 2019 - on craint ce gouvernement, même quand il dit venir avec un cadeau. Pourtant, une revalorisation serait bien nécessaire : quand on compare les salaires des enseignants français avec leurs voisins européens, on se dit qu’en effet, quelque chose est foutu dans la maison France. En Allemagne, les profs gagnent en moyenne entre 50 000 et 58 000 € par an en début de carrière - contre 26 000 à 28 000 € en France, en début de carrière. En Espagne, en Belgique, Irlande, Autriche, Islande les mêmes perçoivent en moyenne entre 30 000 et 40 000 € par an comme le montre le rapport Eurydice cité ces derniers jours par plusieurs médias comme Ouest France ou Marianne.

Revalorisation nécessaire, donc, mais on soupçonne d’avance qu’il y aura des "contreparties" - le mot gentil pour parler du chantage à l’argent qui est le mode de fonctionnement ordinaire du capitalisme. Or, c’est justement parce qu’elle est nécessaire qu’elle doit être sans condition. Et que le Grenelle, où le ministre compte sans doute témoigner de son amour irrépressible pour les enseignants, doit aussi être l’occasion d’imposer la révision des sujets qui fâchent : la répression qui s’abat sur les profs grévistes en premier lieu. Parce que ce que le ministère a démontré avec la crise sanitaire et le confinement, c’est bien que ce sont l’ensemble des personnels qui font exister, y compris dans des situations chaotiques, l’école, quand lui s’occupe de communication et de commander à distance. Au Grenelle, il serait bon de rappeler au ministère qu’il n’est rien et que les profs sont tout.


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