Nouvelles promesses de changement ?

Sur le retour des gauches au pouvoir en Amérique latine

Romain Lamel

Sur le retour des gauches au pouvoir en Amérique latine

Romain Lamel

Après la fin de « l’âge d’or » des gouvernements progressistes d’Amérique latine, au milieu des années 2010, et un interlude consécutif de droite, il semblerait que le continent soit en train de vivre un « retour de la gauche ». Mais qu’en est-il, et que signifie ce retour en force des gauches au pouvoir ?

Illustration : "El día y la noche" (1954), peinture murale de Rufino Tamayo (1899-1991), Museo Soumaya, Mexico

On a parlé, dans les médias, d’un « âge d’or » des gouvernements progressistes latino-américains entre la fin des années 1990 ou le début des années 2000 et la seconde moitié des années 2010 : Hugo Chávez au Venezuela (1998-2013), Lula puis Dilma Rousseff au Brésil (2003-2016), Rafael Correa en Équateur (2007-2017), Evo Morales en Bolivie (2006-2019), Nestor puis Cristina Kirchner en Argentine (2003-2015), pour n’évoquer que les plus connus. Aujourd’hui, de nombreux analystes parlent désormais de retour « des gauches » au pouvoir avec l’élection d’Andrés Manuel López Obrador au Mexique (2018), Alberto Fernández en Argentine (2019), Luis Arce en Bolivie (2020), Pedro Castillo au Pérou, Xiomara Castro au Honduras, Gabriel Boric au Chili (2021) et, plus récemment encore, en juin 2022, celle de Gustavo Petro en Colombie. Si, conformément aux prédictions des sondages, Lula emporte les élections présidentielles brésiliennes le mois prochain, tous les principaux États latino-américains auront à leur tête des gouvernements issus de forces progressistes ou classées à gauche.

L’âge d’or des gouvernements progressistes avait été caractérisé par une conjoncture économique favorable, liée aux prix élevés des matières premières, offrant une rente abondante permettant de créer des programmes d’assistance, en faveur des classes populaires, dans les secteurs de l’éducation, de la santé, de l’alimentation ou encore du logement ; mais sans que cela ne se traduise, fondamentalement, par un redimensionnement du poids du capital local et, surtout, impérialiste ; sans prendre aux classes possédantes, sans mener à bien de réforme fiscale redistributive, dans un continent pourtant marqué par des impôts fortement régressifs ; ni même de réformes agraire et urbaine ambitieuses. Ces gouvernements de gauche n’étaient donc pas révolutionnaires quoiqu’ils soient parvenus à améliorer momentanément le quotidien des secteurs les plus précaires et paupérisés des populations, au prix d’un renforcement du paradigme dit « extractiviste » dans chaque pays, c’est-à-dire une spécialisation dans l’extraction et la production des matières premières (soja, céréales et élevage, industrie gazière et pétrolière, secteur minier, industrie forestière, etc.), marchandises à faible valeur ajoutée et essentiellement destinées à l’exportation. Cette politique économique a permis de capitaliser au maximum sur l’essor des matières premières, au prix cependant d’un renforcement de la dépendance à leurs cours extrêmement volatils et des projets de prédation environnementale et de spoliation des terres des communautés paysannes et indigènes. Cette dynamique a été rendue possible grâce à la forte demande de la Chine dans les années 2000, qui, dans le cadre de son rôle essentiel dans la chaîne de valorisation industrielle, est devenue le premier partenaire commercial de la plupart des États latino-américains, devant les États-Unis. Parallèlement, en rediscutant partiellement leur degré de sujétion vis-à-vis de Washington, ces gouvernements progressistes avaient ainsi pu obtenir une certaine autonomie diplomatique, en mettant en échec la Zone de libre-échange des Amériques (ALCA), en 2005, ou en créant des organes d’intégration régionale plus indépendants de la tutelle étasunienne (la CELAC pour l’ensemble de l’Amérique latine, l’UNASUR pour l’Amérique du Sud, l’ALBA-TCP pour les gouvernements de gauche les plus proches du chavisme, entre autres). Mais quelles caractéristiques président à la nouvelle vague progressiste en Amérique latine ? Peut-on pour réellement parler de retour des gouvernements de gauche ? Sera-t-il suivi de changement au niveau économique, social et politique ?

Des gouvernements progressistes issus d’une vague de mouvements sociaux

Avant toute chose, il est important de préciser les fondements de ces gouvernements qui, pour nombre d’entre eux, s’inscrivent dans le sillage des mouvements sociaux de l’année 2019. En effet, quelques mois avant le déclenchement de la pandémie de Covid-19, une vague de mouvements sociaux submerge la planète et l’Amérique latine en particulier : tout d’abord, en Équateur, où les indigènes et la paysannerie se mobilisent contre l’augmentation du prix de l’essence, puis au Honduras et en Haïti, contre la corruption des gouvernements en place et, enfin, dans deux États où le néolibéralisme s’était développé dans sa forme la plus implacable : la Colombie et le Chili.

La Colombie passe pour être le plus fidèle allié des États-Unis dans la région. Sa bourgeoisie est l’une des plus rapaces du continent et il s’agit d’un des seuls pays qui n’a jamais connu de période social-démocrate ou populiste de gauche durant laquelle une redistribution des richesses, fût-elle minimale, aurait été mise en œuvre, à l’instar d’autres pays de la région au cours du dernier quart de siècle. Ces caractéristiques, en l’occurrence le fait d’être l’un des deux pays les plus inégalitaires en termes de répartition du revenu national, où tout projet de réforme agraire a été tué dans l’œuf et où l’alignement sur Washington a toujours été systématique, expliquent le développement de plusieurs organisations de guérilla (FARC-EP, ELN, M19) depuis les années 1960, la voie institutionnelle, voire simplement légale, étant complètement obstruée. Le conflit armé a d’ailleurs été de tout temps le prétexte tout trouvé pour l’État colombien et ses alliés paramilitaires pour combattre tout militant politique ou syndical, l’assimilant systématiquement à un guérillero et perpétrant plusieurs centaines d’assassinats politiques chaque année. Pourtant, dès novembre 2019, les Colombiens ont réalisé des journées de grève générale contre une réforme fiscale baissant les impôts des entreprises, et une vague de révoltes a traversé le pays, en septembre 2020, suite à des violences policières filmées ayant conduit à la mort de Javier Ordoñez. Mais surtout, la Colombie a connu un mouvement massif en mai-juin 2021 contre la « Loi de solidarité durable », augmentant la TVA sur les produits de première nécessité, y compris le prix des obsèques, suscitant l’indignation dans un pays encore meurtri par les effets du Covid-19. Chaque jour, des manifestations secouaient la plupart des villes de Colombie à l’appel des syndicats et des organisations sociales et indigènes. Fidèle à sa tradition répressive, les forces de l’ordre ont exercé, en 2021, une violence implacable : plus de 50 morts et de 1 000 arrestations arbitraires, près d’une trentaine de blessés oculaires, une vingtaine de cas de violences sexuelles commises par des policiers, dont le cas d’une jeune fille qui s’est suicidée après avoir été victime de viol et l’avoir dénoncé.

Au Chili, après plusieurs processus de mobilisations sectorielles, générationnelles ou locales, le mouvement qui fait déborder le pays dans la rue commence en octobre 2019, contre l’augmentation de 30 pesos du prix du ticket de métro dans la capitale, Santiago. Rapidement, le mouvement se transforme en une remise en cause de l’ensemble de la société néolibérale, privatisée à l’extrême, radicalité qu’exprimera le slogan emblématique de la révolte : « ce ne sont pas 30 pesos, ce sont 30 ans », en référence aux 30 années de gouvernements démocratiques, souvent de centre-gauche, qui ont maintenu en l’état l’essentiel de l’armature économique et sociale héritée de la dictature. Des manifestations de masse parviennent ainsi à regrouper deux millions de personnes dans un pays qui en compte dix-huit. Mi-novembre, une grève massive met à l’arrêt 25 des 27 ports du pays, dans une économie particulièrement dépendante du transport maritime. Elle force les partis de droite et de centre-gauche à accepter une revendication historique du mouvement social chilien : la sortie du carcan constitutionnel imposé par Augusto Pinochet, ce que l’ensemble des partis politiques traditionnels, ainsi que l’actuel président Boric, alors dans l’opposition, instrumentalise pour désamorcer la crise, offrir une porte de sortie au gouvernement Piñera et tenter de faire basculer le centre de gravité de l’affrontement de la rue et des entreprises vers les institutions. Un acteur décisif de ce mouvement social mérite d’être mentionné : le mouvement féministe à l’origine de vagues successives de protestations en faveur du droit à l’avortement ou contre les violences sexistes et sexuelles. La répression qui s’abat sur le mouvement social chilien est particulièrement brutale : en deux mois, 35 personnes sont tuées par les forces de l’ordre, plus de 5 000 arrêtées, 2 500 blessées, des centaines perdent un oeil et 200 cas de violences sexuelles en détention sont dénoncés. Mais le mouvement jette le gouvernement de droite de Piñera dans les cordes. L’élection de la Convention constitutionnelle en mai 2021 montre l’évolution du rapport de forces suite au mouvement social d’octobre 2019 : la droite obtient seulement 20 % des suffrages exprimés et la coalition social-libérale du Parti socialiste, moins de 15 %. Cette dernière est ainsi dépassée par l’alliance du Parti communiste et du bloc de courants qu’anime Gabriel Boric, le Front large, et par un regroupement indépendant de militants du mouvement social. La trajectoire des nouveaux chefs d’État reflète ainsi la puissance du caractère subversif de ces mobilisations : au Pérou, le nouveau président, Pedro Castillo, était un syndicaliste enseignant dans une région andine reculée ; au Chili, Gabriel Boric est un ancien leader étudiant du mouvement de 2011 et en Colombie, Gustavo Petro, un ancien guérillero dans les années 1980.

Des gouvernements progressistes sans marge de manœuvre

Pourtant, après seulement quelques années, voire simplement quelques mois au pouvoir, ces nouveaux gouvernements progressistes semblent se trouver dans une impasse, et cela pour plusieurs raisons. Ils souffrent tout d’abord, au niveau économique, d’une conjoncture morose dans un continent épuisé par la baisse du cours des matières premières depuis 2014 et par les effets de la pandémie. À cette configuration globale défavorable s’ajoutent des difficultés spécifiques au niveau étatique. Ainsi, l’endettement massif de l’Argentine, lancinant depuis la crise de 2001 et fortement aggravé ces dernières années par Mauricio Macri auprès du FMI limite d’autant les ambitions de son successeur de centre-gauche qui, à aucun moment, bien entendu, n’envisage de ne pas payer la dette, et ce alors même que ses origines s’établissent durant la période où la junte militaire dirigeait le pays, de 1976-1983 et qu’elle est, par conséquent, criminelle, illégitime et impayable. La nomination au ministère de l’Économie, au mois d’août, de Sergio Massa, représentant de l’aile droite de la coalition présidentielle, va dans le sens d’une plus grande soumission aux marchés. Il a ainsi négocié un nouveau prêt de 5 milliards de dollars avec la Banque interaméricaine de développement.

Au niveau politique, ces nouveaux gouvernements progressistes s’inscrivent dans le cadre institutionnel et, à ce titre, donnent la priorité à trouver des accords avec les forces politiques modérées voire conservatrices plutôt que de mobiliser les classes populaires pour « déborder » le cadre, faire pression sur les classes dominantes et les impérialistes et avoir davantage de marge de manœuvre, comme ont pu le faire, au cours du XX° siècle, un certain nombre de gouvernements bonapartistes de gauche en Amérique latine. Ainsi, ni Pedro Castillo, ni Gabriel Boric ne disposent de majorité parlementaire. La recherche de soutiens au sein des différentes chambres tend à aseptiser leurs programmes déjà très modérés. Le président péruvien a même déjà dû essuyer deux tentatives de destitution, pour l’heure avortées, sans pour autant cesser d’espérer arriver à un accord avec certaines des forces conservatrices et réactionnaires qui rêvent de l’éjecter. En Colombie, Gustavo Petro est parvenu à obtenir une majorité parlementaire avec la droite modérée. Pendant le mouvement de mai-juin 2021, il ne demandait pas la démission du président Ivan Duque, issu de la droite dure, aux multiples connexions avec les narcotrafiquants et les paramilitaires, revendiquée par les manifestants, mais une transition dans le cadre des institutions. Au Brésil, Lula n’est pas encore au pouvoir mais avant même d’être élu, il cherche le soutien de la bourgeoisie en désignant comme son prochain vice-président potentiel Geraldo Alckmin, pourtant candidat de la droite brésilienne contre lui lors des présidentielles de 2006, libéral pro-privatisations et conservateur anti-avortement.

Au Chili, l’échec du référendum constitutionnel le 4 septembre dernier doit se comprendre comme l’issue d’une politique conciliatrice du gouvernement Boric et, parallèlement, d’une offensive de la droite la plus réactionnaire. Dès la convocation de la constituante, les partis de droite et de centre-gauche, mais également le Front large de Gabriel Boric, ont fixé des limites et des entraves aux marges de manœuvre de la Convention constitutionnelle, qui n’était pas, d’ailleurs, une réelle Assemblée constituante, libre et souveraine. On songera ainsi au respect des traités de libre-échange avec les États-Unis, exclus des discussions, ou encore qu’un tiers des élus de la Convention puisse bloquer toute discussion. Les premiers mois du gouvernement Boric ont sans doute largement contribué à démobiliser les révoltés d’octobre 2019 : la réforme fiscale progressiste promise n’avance pas ; l’engagement d’amnistier les prisonniers politiques issus de la répression du mouvement de 2019 a été reniée ; dans le sud du pays, où vit la grande majorité de la communauté mapuche, l’état d’exception a été déclaré et l’armée envoyée, à l’instar de ce que faisait le président de droite précédent, Sebastián Piñera. La victoire des forces réactionnaires et du centre anti-nouvelle Constitution, dans la récente campagne référendaire, s’est fondée sur un certain nombre de fake news autour des droits des populations indigènes ou fantasmant à propos d’une remise en cause de la propriété privée. Dans sa dynamique conciliatrice, Gabriel Boric a remanié son gouvernement à la suite de la défaite référendaire. Il a ainsi remplacé des anciens leaders étudiants issus de la révolte de 2011 par des politiciens issus du gouvernement social-libéral de Michelle Bachelet à des postes aussi décisifs que le ministère de l’Intérieur et le secrétariat général du gouvernement.

Une crise organique dans toute l’Amérique latine

Cette configuration correspond davantage à ce qu’Antonio Gramsci appelle une crise organique qu’à un retour d’une hégémonie des gouvernements progressistes. La crise organique se définit dans le cadre d’une crise économique persistante, où les gouvernements, quelle que soit leur couleur politique, ne parviennent pas à obtenir le consentement de la population et où le degré de coercition dans le mode de gouvernance augmente de la part des États, sur fond d’émergence d’une situation politique caractérisée par une forte polarisation et de forts affrontements de classes. Á gauche, les mouvements sociaux ne perdent pas de leur vigueur : rien que cet été, deux pays ont connu des vagues de protestations majeures. Au Panama, le mois de juillet a été le moment de mobilisations puissantes contre la hausse des prix, d’abord dans le secteur de l’éducation et qui se sont ensuite généralisées à l’ensemble des classes populaires, du jamais vu depuis 35 ans. En Équateur, la principale organisation indigène, la Confédération des nationalités indigènes de l’Équateur (CONAIE) a appelé à trois semaines de grève contre la hausse des prix, dans un mouvement de pression contre le gouvernement de droite en place. Á l’instar de la révolte de 2019 ou des mouvements semblables en Colombie et au Chili, la répression sanglante a coûté la vie à six personnes. Le cycle de mobilisations s’est achevé par la signature d’un accord par la direction de la CONAIE pour « pacifier le pays ». La dynamique donnée par la direction de ces mouvements n’est clairement pas révolutionnaire, mais la capacité de mobilisation des classes populaires montre combien l’Amérique latine demeure dans une période de convulsions.

Qui dit polarisation, dit radicalisation de part et d’autre. L’émergence de l’extrême-droite comme force politique majeure de certains pays peut s’avérer un obstacle majeur pour les processus d’émancipation. Au Brésil, Jair Bolsonaro, s’il n’a pas réussi à s’implanter localement, menace de ne pas rendre le pouvoir en cas de défaite face à Lula en octobre prochain. Au Chili, le candidat d’extrême-droite, José Antonio Kast, lui aussi nostalgique de la dictature militaire, est arrivé en tête du premier tour des présidentielles et a obtenu 44 % des suffrages exprimés au second. Au Pérou, les soutiens de Keiko Fujimori, fille de l’ancien président autocrate, condamné pour crimes contre l’humanité, ont contesté durant de longs mois l’élection de Pedro Castillo en tentant d’entacher sa légitimité. Les moteurs de ces forces politiques réactionnaires sont multiples. Dans certains pays, la revanche contre la gauche est une des caractéristiques majeures de celles-ci, en rejet, par exemple, du pouvoir jugé « corrompu » du PT au Brésil (qui l’était toutefois beaucoup moins que les partis de droite), ou encore contre le supposé « désordre » créé par le mouvement social chilien (en oubliant surtout la féroce répression étatique dont il a fait l’objet) ; les millions de Vénézuéliens hors de leur pays sont la cible d’une xénophobie croissante au Chili et au Pérou ; enfin, le développement des Églises évangélistes contribue à l’avancée des idées les plus réactionnaires sur les problématiques de genre.

Ainsi, les conquêtes ou les avancées de ces derniers temps sont davantage le fait des mobilisations des classes populaires que des nouveaux gouvernements progressistes, qui ne sont en rien des remparts contre l’avancée des idées les plus réactionnaires. Ce n’est pas en tentant de modérer son programme, de chercher des accords avec les forces conservatrices, que les processus d’émancipation avancent, mais par la mobilisation, la grève et les luttes, en vue d’une transformation de la société qui s’inscrivent dans un mouvement pour le renversement du système, fondé sur des gouvernements ouvriers, populaires et paysans, combattant pour un programme réellement socialiste et émancipateur. Définir l’Amérique latine comme le lieu d’une crise organique plutôt que celui d’un retour des gouvernements progressistes a des implications politiques : penser que ce ne sont ni Petro, ni Boric, ni Castillo, ni demain Lula qui représentent une issue, mais l’organisation en toute indépendance vis-à-vis de ces exécutifs et la mise en place de partis révolutionnaires du monde du travail et de la jeunesse.

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