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Tourisme. Booking et Accor annoncent la suppression de milliers d’emplois

Alors que l’ensemble des secteurs liés au tourisme et à la culture n’en finissent pas de subir les répercussions de la crise du Covid-19, les grands groupes hôteliers et de réservation en ligne, Accor et Booking, ont annoncé la suppression de milliers d’emplois. Les grandes entreprises continuent ainsi de chercher à faire payer la crise à leurs salariés.

Eli Sand

5 août 2020

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Crédit photo : DENIS CHARLET / AFP

Une annonce en duo : de nouvelles suppressions d’emplois dans le secteur du tourisme

Booking.com, plateforme de réservation d’hébergement en ligne, déclarait hier dans un communiqué envoyé à l’AFP : « La crise du Covid-19 a dévasté l’industrie du voyage, et nous continuons à en ressentir l’impact avec les volumes de voyages qui restent considérablement réduits. » Aussi a-t-elle décidé de réduire ses effectifs à un niveau pouvant aller jusqu’à 25% des 17.500 salariés dans le monde sous couvert de faire face à la crise, comme le rapporte Capital.

Des licenciements qui font des salariés une variable d’ajustement face à la crise et qui suscitent encore davantage l’indignation quand on sait que des milliers d’employés de la plateforme travaillant aux Pays-Bas ont été subventionnés par l’Etat de mars à mai, drainant 65 millions d’euros à Booking.com, selon le journal néerlandais Volkskrant. Dans le même article, le journal souligne que Booking ne souhaite plus bénéficier de ces aides étatiques puisqu’elles sont désormais assorties de conditions plus strictes qu’auparavant. Surprenant…

En outre, Booking est connu pour ses pratiques d’évasion fiscale au point de devoir des centaines de millions d’euros au fisc français, tandis que durant la crise du Covid-19 les pratiques commerciales de la plateforme ont été dénoncées. Dans une tribune libre, le directeur général de Logis Hotels (qui regroupe des hôteliers indépendants en Europe), Karim Soleilhavoup dénonçait en avril les pratiques des plateformes de réservation comme Booking, Expedia ou Egencia pendant la crise Covid-19 et révélait leur modèle très lucratif. Pour chaque réservation via ces plateformes, un hôtelier indépendant verse en moyenne 18% de commission, rapportant l’année dernière 400 millions d’euros à ces dernières. Un modèle qui explique les chiffres insolents de l’entreprises qui affichait en 2019 un résultat de 4,86 milliards d’euros et une trésorerie 7,3 milliards comme l’observait Artiref début 2020.

Des bénéfices que Booking n’a évidemment pas souhaité réinvestir pour amortir « l’impact » de la crise, choisissant de faire peser celle-ci sur les épaules des salariés. Mais la plateforme n’est pas la seule à adopter de telles mesures.

N’ayant pas non plus échappé à la pandémie, le grand groupe hôtelier français Accor a dû fermer pendant plusieurs mois la plupart de ses hôtels dans le monde entier, et affiche aujourd’hui une perte de 1,5 milliard d’euros au premier semestre 2020. La société qui regroupe plus de 5 000 hôtels sous diverses enseignes (Ibis, Mercure, Novotel etc) et qui emploie près de 18.000 de salariés à travers le monde a annoncé hier la suppression de 1 000 postes. Des licenciements « justifiés », selon Sébastien Bazin - PDG d’Accor – dans une interview pour Les Echos, par un plan d’économies annuelles de 200 millions d’euros.

Dans cette même interview, le PDG précise néanmoins que ce plan, et donc ces licenciements, ne sont pas une réponse à la crise sanitaire mais « un plan en gestation avant », visant notamment à revoir l’organisation du groupe « en profondeur ». Autrement dit, alors que l’ensemble des salariés employés par le groupe ont subi la crise de plein fouet et ont été mis au chômage partiel, ceux-ci se voient désormais menacés de perdre leur poste pour permettre à Accor de faire des économies alors même que la crise n’a pas empêché le groupe d’ouvrir 86 hôtels, soit 12 000 chambres depuis le début d’année.

Le même jour ce sont donc deux grands groupes qui ont annoncé la suppression de milliers de postes, s’inscrivant dès lors dans la continuité d’une « vague d’austérité sans précédent ».

Une vague massive de licenciements : une nouvelle pandémie qui frappe le tourisme ?

La fermeture des frontières à l’échelle internationale ainsi que les mesures de confinement ont durement impacté le tourisme et l’ensemble des secteurs qui lui sont liés (transports aériens, hôtellerie, culture) depuis le début de la crise. L’Organisation Mondiale du Tourisme (OMT) chiffre à 195 milliards de dollars la perte de recettes pour le tourisme international pour les mois de janvier à avril 2020, en comparaison à l’année 2019.

Pour redresser leurs comptes, les grands groupes touristiques mettent alors en œuvre des plans de relance bien particuliers. C’est ainsi que ces derniers mois dans ce secteur extrêmement touché par la crise, les plans de licenciements massifs ont fleuri et se sont multipliés : le 4 mai la société américaine de location de logement, AirBnb ouvrait le bal en annonçant le licenciement d’un quart de ses salariés dans le monde (soit 1 900 postes), suivis par la plateforme Tripadvisor et par le voyagiste allemand TUI avec une suppression respective de 900 et 8 000 emplois. Une danse macabre qui se poursuit donc par les annonces de Booking et Accor, mardi 4 août. Un bouquet final fait de milliers de licenciement. Grandiose.

Avec un capital financier se comptant en milliards d’euros, contrairement à des PME et des hôteliers indépendants, les grands groupes hôteliers donnent pourtant l’impression de subir la crise sans autre possibilité pour la surmonter que la suppression d’emplois… Injustifiable et inacceptable, cette vague de licenciement qui s’abat sur de nombreux secteurs (hôtelleries, transports aériens et autres) doit être stoppée. Dans le monde parfait du capitalisme, les salariés ne sont que des variables d’ajustement dans une crise et le chômage, un outil pour redresser l’économie. Après les rassemblements et mobilisations des salariés d’Airbus, Nokia ou encore TUI France, les mobilisations des salariés constituent une réponse essentielle. Après avoir donné congé à 25% de ses salariés le 4 mai dernier, Brian Chesky - PDG d’Airbnb – leur écrivait par courrier : « Je suis vraiment navré. Sachez que ce n’est pas votre faute. ». Effectivement ce n’est pas la faute des salariés, pourquoi serait-ce donc à eux de payer les pots cassés ?

En outre, si la lutte contre les licenciements devrait se coordonner, elle doit aussi s’étendre pour poser la question des conditions de travail et du lien entre salariés et sous-traitants. Ainsi, depuis un an déjà, une vingtaine de femmes de chambre et gouvernantes travaillant dans l’hôtel Ibis Batignolles – sous-traitant du groupe Accor -, dans le 17ème arrondissement de Paris, sont en grève pour dénoncer leurs conditions de travail intolérables, leurs heures non payées ainsi que les discriminations dites « raciales » qu’elles subissent. La période de confinement n’ayant pas terni leur lutte, il est de toute évidence nécessaire de les soutenir et d’étendre les contestations afin que cette crise sanitaire et économique ne devienne prétexte pour renforcer la précarisation des salariés.


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