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Surenchère belliciste

Un an après le début de la guerre en Ukraine, l’Europe en voie de militarisation

53 milliards d’aide militaire à l’Ukraine, 100 milliards de budget militaire au Royaume-Uni, 400 milliards d’euros pour la défense en France d’ici 2030… Un an après le début de la guerre en Ukraine, toutes les puissances impérialistes sont en train de se réarmer jusqu’aux dents.

Irène Karalis

24 février 2023

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Crédits photo : AFP

Alors que la guerre en Ukraine dure depuis maintenant un an, l’Europe continue son réarmement massif. Face à la perspective d’une escalade guerrière toujours plus meurtrière et à l’intensification des conflits dans le monde, les puissances impérialistes nous préparent à un avenir fait de crises et de guerres.

Une aide militaire à l’Ukraine toujours plus importante

Depuis le début de la guerre, l’aide militaire de la part des puissances impérialistes s’est fait de plus en plus grandissante. Récemment, le secrétaire général de l’OTAN Jens Stoltenberg a réaffirmé le soutien militaire indéfectible de l’alliance transatlantique à l’Ukraine : « Les chars, l’artillerie, les systèmes de défense antiaériens promis doivent devenir réalité et arriver en Ukraine avant que la Russie ne passe à l’offensive. » À Kiev, Joe Biden est allé dans le même sens, affirmant que le soutien des États-Unis à l’Ukraine durerait « aussi longtemps qu’il sera nécessaire. »

Or, selon l’ancien ambassadeur Pierre Vimont, interviewé par Les Échos : « Il faut éviter une guerre longue, car chaque succès ukrainien entraîne une escalade russe. Cela rend les positions difficiles à tenir et pourrait risquer d’entraîner la lassitude des alliés. » Et c’est justement pour cette raison qu’il existe un enjeu à finir rapidement la guerre en utilisant un moyen privilégié : fournir davantage d’armes à l’Ukraine. Pour les États-Unis, et plus généralement pour l’OTAN, l’aide militaire à l’Ukraine constitue une façon de continuer l’écrasement de la Russie et préserver l’ordre mondial dominé par l’impérialisme nord-américain. Les États-Unis se sont particulièrement fait remarquer avec 53,1 milliards de dollars d’aide militaire. Cette aide constitue également une manière de maintenir la cohésion de l’OTAN, ravivée par la guerre en Ukraine et de rassurer les pays de l’Est qui se sentent menacés par la Russie. Parallèlement, l’aide militaire nord-américaine est un moyen puissant de l’impérialisme yankee de maintenir son leadership en Europe et de forcer les impérialismes européens à s’aligner derrière lui.

Face au risque d’une escalade et à l’intensification des conflits, les puissances impérialistes se réarment

À la suite de la visite de Joe Biden à Kiev, Vladimir Poutine a annoncé la suspension de la participation de la Russie au traité sur les armes nucléaires stratégiques ; une manière de rappeler que la Russie possède un arsenal militaire important. Il a également assuré que son pays développerait les technologies les plus modernes de son armée et mènerait la guerre « jusqu’au bout ». Ces affirmations réactualisent la possibilité d’une escalade chaque jour plus meurtrière, au fur et à mesure que les puissances impérialistes fournissent plus d’armes à l’Ukraine. Le cap qui a déjà été franchi avec la livraison de chars lourds pourrait à nouveau être dépassé si les puissances occidentales venaient à céder aux injonctions de Volodymyr Zelensky et décidaient de livrer des avions de combat à l’Ukraine.

Face à ce risque d’escalade et d’intensification des conflits à échelle mondiale, les puissances occidentales ont donc entamé un réarmement d’ampleur. Les États-Unis sont ainsi en tête des cinq pays qui investissent le plus dans la défense et à la fin de l’année dernière, le Congrès américain a approuvé l’investissement de 816 milliards de dollars au Pentagone et de 30,3 milliards de dollars supplémentaires pour la surveillance des infrastructures critiques dans le cadre du programme Homeland Security. La loi d’autorisation de la défense nationale de 2023, finalisée le 6 décembre, prévoit également la mise en place d’un système de contrats pluriannuels sans appel d’offres qui permettra notamment à Boeing et d’autres fabricants d’armes d’étendre leur base industrielle et leurs activités.

Ce réarmement a une visée claire, que le principal acheteur d’armes de l’armée américaine Doug Bush a très bien résumée expliquant : « Je pense que nous sommes plus proches d’un mode de temps de guerre, ce que j’ai travaillé à construire. » D’autant plus que derrière la guerre par procuration contre la Russie se cache également l’objectif de contrecarrer la Chine, qui a été caractérisée comme la « menace à long terme » par plusieurs PDG d’entreprises de défense, membres du Congrès et responsables militaires américains lors d’une réunion.

L’Europe et les autres puissances impérialistes ne sont pas en reste dans cette course à l’armement. L’Allemagne a ainsi débloqué 100 milliards de dollars pour un fonds spécial de défense qui dépassera les 2% de son PIB, quand le Japon a augmenté ses dépenses de plus de 50% pour les années à venir. Le Royaume-Uni prévoit de doubler son budget militaire pour atteindre les plus de 100 milliards d’euros d’ici la fin de la décennie, tandis qu’en Espagne, le gouvernement du PSOE et d’Unidas Podemos s’est également associé à cette escalade militaire en décidant d’une augmentation de 26% de ses dépenses militaires. En France, Emmanuel Macron a annoncé une augmentation de plus de 35% des dépenses militaires pour atteindre un total de 400 milliards d’euros entre 2024 et 2030.

Cette augmentation des budgets va évidemment bénéficier aux grandes entreprises de l’industrie militaire, mais également aux multinationales de pays impérialistes. Et pour cause : le réarmement de leurs États respectifs garantit la possibilité de pouvoir continuer à mener leurs opérations de pillage à travers le monde, à l’instar du projet EACOP de Total en Ouganda et en Tanzanie soutenu par l’armée française.

L’urgence d’une politique anti-impérialiste et indépendante

Pour l’instant, l’issue de la guerre est difficile à envisager. Il est possible que nous assistions à un enlisement des positions ou à un cessez-le-feu et à l’instauration d’une zone tampons sans qu’un accord de paix soit signé. Dans tous les cas, il est fort peu probable que des négociations soient entamées avant des mois.

Quoiqu’il en soit, une donnée n’a pas changé : le fait que les premières victimes soient les populations d’Ukraine, de Russie et d’Europe. En Ukraine, 12 millions de personnes ont déjà fui le pays, tandis que des dizaines de villes continuent d’être bombardées tous les jours. En Russie, la population fait les frais des sanctions décidées par les puissances occidentales et subit la mobilisation partielle des réservistes qui pourrait s’étendre à l’ensemble de la population. En Europe, les classes populaires font les frais depuis un an de la flambée des prix de l’énergie et de l’alimentation. En somme, il reste impératif de continuer à exiger le retrait des troupes russes d’Ukraine mais aussi des forces de l’OTAN ainsi que la dissolution de cette alliance militaire inter-impérialiste.


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