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Offensive réactionnaire

Université. Au Mirail, un raid en ligne de l’extrême-droite fait annuler un colloque féministe

Le 6 novembre à Toulouse, des trolls d'extrême droite inondent de propos misogynes le colloque féministe "Cinquante ans de Mouvement de Libération des Femmes", organisé par des enseignantes chercheuses de l’Université Jean Jaurès, jusqu’à son interruption totale.

Ana Barelli

12 novembre 2020

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L’événement est survenu lors de la troisième session virtuelle du colloque, comptant environ 70 participants. En plein milieu de l’intervention, les organisatrices ont dû faire face à l’arrivée soudaine d’une quarantaine de nouveaux participants, aux pseudos inspirés de figures nazis ou négationnistes (Mein Führer, Heil Hitler, Alain Soral, Faurisson...).

Pseudos sous lesquels les trolls déversent menaces, insultes et images déplacées (notamment l’image d’un sexe masculin légendé de propos sexistes). L’historienne Sylvie Chaperon, qui organisait l’événement, précise dans un témoignage relayé par France 3, qu’un hacker « s’est montré avec la moustache d’Hitler et une croix gammée dessinée sur le torse et sur le front ».

Ces attaques odieuses, alors devenues incontrôlables, ont contraint les organisatrices d’interrompre prématurément le colloque, laissant les participants sous le choc. Ils apprendront plus tard que l’agression avait été très probablement organisée à l’avance par l’intermédiaire d’un forum du site jeuxvidéos.com, et tenu responsable de cette déferlante de propos sexistes et antisémites. Une plainte devrait être déposée auprès du procureur de la République de Toulouse.

Malheureusement, cette attaque n’a rien d’un acte isolé, elle s’inscrit bien au contraire dans la lignée de l’offensive réactionnaire du gouvernement, qui favorise la montée des discours haineux d’extrême droite. En effet, les lois sur le séparatisme religieux et l’instrumentalisation du meurtre de l’enseignant Samuel Paty instillent un climat propice aux attaques de groupuscules d’extrême-droite fascisants. Ainsi, le processus de dissolution du Collectif contre l’Islamophobie en France, que Jean Castex présente comme l’emblème de son combat contre “l’ennemi de l’intérieur", parmi d’autres mesures islamophobes du gouvernement, a créé un terreau favorable à des attaques décomplexées de l’extrême droite.

Les exemples de cette logique ne manquent pas à l’appel. Parmi eux l’agression de deux femmes voilées au couteau le 22 octobre, ou encore les croix gammées taguées sur le portail du domicile du maire de l’île Saint-Denis il y a quelques jours.

Et ce climat réactionnaire ne se limite pas au racisme et à l’islamophobie, il crée un terreau fertile à la diffusion décomplexée des idées d’extrême droite, illustrée entre autres par l’interruption à caractère sexiste du colloque organisé à Toulouse sur le Mouvement de Libération des Femmes.

Cette offensive de la fachosphère dans le cadre universitaire intervient également après des attaques répétés du gouvernement qui s’acharne à mettre au pas les enseignants chercheurs et les étudiants. Cela s’est notamment traduit par une proposition d’amendement à la Loi de Programmation de la Recherche – finalement retiré – qui visait à soumettre le contenu des cours aux “valeurs républicaines”, et qui faisait suite à des propos de Blanquer associant la gauche antiraciste dans les universités au « terrorisme islamiste ». Quoi d’étonnant dans le contexte où le gouvernement lui-même assume sa volonté de museler tout enseignement critique et s’en prend à la liberté d’opinion des enseignants-chercheurs, à ce que l’extrême-droite se sente pousser des ailes ?

Les militants féministes et antiracistes font donc face autant à des offensives réelles et matérielles qu’à une offensive idéologique, facilitée par un contexte où l’État prend des mesures toujours plus liberticides. Ainsi, lutter contre ce climat réactionnaire implique de lutter en définitive contre ce gouvernement, qui favorise la banalisation des idées de l’extrême-droite, et les conséquences odieuses qui en découlent.


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