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La Izquierda Diario
26 de mai de 2020 Twitter Faceboock

Allemagne : un mois de grève contre la fermeture de l’usine Voith
Typhaine Cendrars

Depuis le 23 avril, les ouvriers de l’usine de métallurgie Voith Turbo située en Bavière, mènent une grève illimitée contre la fermeture du site. La lutte devient peu à peu un indicateur de la force avec laquelle les travailleurs allemands pourraient répondre aux prochaines attaques.

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En octobre 2019, le patron de l’usine de métallurgie Voith qui produit des engrenages pour turbine à gaz, a annoncé qu’il fermerait l’usine de 500 travailleurs de Sonthofen située dans l’état de Bavière en Allemagne, alors même qu’elle a réalisé 100 millions d’euros de ventes et un bénéfice de 7 millions d’euros l’année passée. Une partie de la production sera délocalisée dans une autre usine du groupe afin d’économiser les coûts et renforcer la production.

Sonthofen fabrique des boîtes de vitesse très spécialisées, notamment pour les centrales d’électricité au gaz. Jusqu’en 1989 elle faisait partie de l’entreprise d’Etat BHS, mais a été progressivement privatisée. Depuis 2007 elle appartient totalement au groupe Voith.

La famille Voith, propriétaire de l’entreprise, est une des familles les plus riches d’Allemagne. Son actif s’élève à 2.3 milliards d’euros. Cela serait théoriquement suffisant pour payer les salaires des employés pour encore au moins 100 ans, mais ils préfèrent augmenter encore plus la rentabilité de leur entreprise aux dépens de centaines de travailleurs.

La fermeture de Sonthofen s’inscrit dans le cadre d’une vague de licenciements et de fermetures d’usines annoncées dans l’industrie du sud de l’Allemagne. Cela avait déjà commencé en 2019, bien avant la crise du coronavirus, notamment à Osram, Michelin et BMW.

Avec l’actuel effondrement de l’économie mondiale et des exportations allemandes, la tendance des licenciements et des fermetures d’usines va s’intensifier dans les prochains mois. En ce moment en Allemagne c’est déjà 10 millions de personnes qui travaillent en journée réduite, c’est à dire qu’elles ne travaillent pas à temps pleinmais à temps partiel et qu’elles reçoivent un salaire par conséquent beaucoup moins élevé.

Dans ces circonstances, 98% des travailleurs de Voith Sonthofen ont voté la grève illimitée le 23 avril dernier. Ils veulent défendre leur travail ! C’est un signal fort dans la lutte contre la gestion arbitraire de l’entreprise, et ce particulièrement en Allemagne où ces dernière années il n’y a pas eu une grande tradition de lutte contre les fermetures des usines. C’est pour cela que nous pensons que cette bataille peut se convertir en une lutte exemplaire pour les travailleurs de tout le pays qui se voient menacés de licenciements.

Une solution dans l’intérêt des travailleurs pas des bénéfices !

Les patrons de l’usine continuent d’insister pour qu’elle ne soit ni entretenue ni vendue. Ils veulent fermer à tout prix et exploiter les connaissances particulières de l’industrie, les brevets, … . Mais s’ils veulent renoncer à une usine qui fonctionne bien, les travailleurs ne devraient ils pas eux-mêmes la prendre en charge et ainsi sauver leur poste de travail ?

Au lieu de se soumettre constamment aux intérêts des propriétaires privés, les ouvriers pourraient contrôler l’usine eux-mêmes. L’Etat, qui en était déjà propriétaire sous le nom de BHS jusqu’en 1989, pourrait la reprendre et les 500 ouvriers pourraient continuer à produire sous leur propre contrôle.

Si les travailleurs combinent leur grève intense avec une campagne de nationalisation sous contrôle ouvrier, cette perspective pourrait devenir réalité. En effet, si le ministre du travail de Bavière, Hubert Aiwanger, veut réellement « sauver le plus grand nombre d’emplois possible », alors son ministère devrait soutenir la nationalisation de l’usine par l’Etat de Bavière !

De plus, comme la famille Voith souhaite fermer l’usine uniquement pour récupérer les bénéfices, il n’y a aucune raison de les indemniser pour la nationalisation. Alors l’Etat n’aurait rien à débourser pour exiger cela. Le slogan serait alors : Expropriation sans indemnisation et nationalisation sous contrôle des travailleurs !

Les travailleurs pourraient alors essayer d’utiliser les ateliers et machines pour la production d’équipements médicaux. Cela pourrait résoudre la dépendance de l’usine aux canaux de distribution de Voith et contribuer à la lutte contre la pandémie mondiale du coronavirus.

Avec solidarité jusqu’à la victoire !

Comme l’annonce de la fermeture d’une usine n’est pas légalement reconnue comme motif valable de grève en Allemagne, l’exigence officielle du syndicat IG Metall est qu’il y ait un plan social. Ce plan social se traduirait par une meilleure indemnisation des licenciements et d’autres mesures comme une « société de sauvetage » pour les travailleurs licenciés. Cependant les travailleurs n’ont aucun intérêt objectif à une indemnisation des licenciements, ce qui est dans leur intérêt c’est plutôt le maintien de leur emploi.

Dans cette situation il est nécessaire que les grévistes et leurs syndicats revendiquent offensivement la nationalisation de l’usine par le gouvernement de Bavière. Malheureusement et sans surprise, la bureaucratie syndicale de IG Metall paraît pour le moment accepter la fermeture du site, au lieu de lutter constamment pour sa préservation. Il y a aussi deux autres usine de Voith, plus petites qui devraient être fermées. Jusqu’à maintenant les deux autres petites usines n’ont pas été contactées alors qu’elles font une grève commune pour elles aussi préserver les emplois.

Les politiciens locaux des partis réformistes comme le SPD et Die Linke déclarent verbalement leur solidarité avec la grève, mais n’ont rien de concret à offrir sinon que de supplier l’entreprise. Ils veulent exercer une pression en rejetant l’aide étatique donnée à Voith pour la crise du coronavirus, mais l’entreprise ne dépend pas uniquement de cette aide dans tous les cas.

Au contraire, les grévistes ont besoin d’une campagne de solidarité d’ampleur de la part des syndicats, d’autres usines, de l’hôpital, des écoles, des universités et des organisations politiques et sociales. Encore plus spécifiquement en Allemagne ou la grève de Voith doit être soutenue comme une lutte exemplaire contre les licenciements. La solidarité internationale peut elle aussi aider à obtenir la victoire !

Raúl Godoy ouvrier de l’usine de céramique autogéré Zanon, et d’autres travailleurs militants d’Argentine ont envoyé leur soutien aux grévistes de Voith.

L’ampleur de la crise et des fermetures d’usine en Allemagne est encore très loin de celle vécue par les Argentins en 2001, quand Zanon et d’autres usines ont été occupées. Mais si la classe ouvrière Allemande ne veut pas tout perdre elle doit prendre exemple sur ces luttes victorieuses !

Traduction depuis notre site frère "Klasse Gegen Klasse" en Allemagne, tenu par l’Organisation Internationaliste Révolutionnaire (RIO pour son sigle Allemand).

 
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