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Education nationale

« Pas de retrait, pas de rentrée » : à Toulouse, les grévistes de l’éducation suivent la voie du 93

Ce mardi à Toulouse, près de 200 grévistes de l'éducation nationale ont voté pour faire grève le 22 avril prochain afin d'exiger le retrait de la réforme du « choc des savoirs » et un « plan d'urgence pour la Haute-Garonne », sur le modèle du 93.

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« Pas de retrait, pas de rentrée » : à Toulouse, les grévistes de l'éducation suivent la voie du 93

Ce 2 avril, une nouvelle journée de grève était appelée au niveau national par les syndicats de l’éducation (SNES-FSU, SNEP-FSU, FNEC FP FO, CGT Educ’action et SUD éducation). Alors que la réforme dite « choc des savoirs » est désormais publiée au Journal Officiel, actant la fin du collège unique avec la mise en place des groupes de niveaux en 6è et 5è, la mobilisation se poursuit. Une mobilisation aux taux de grève légèrement plus faibles que ceux du 19 mars dans l’ensemble, bien qu’ils se maintiennent dans le secondaire (36% d’après le SNES-FSU, 15% selon le ministère). À Toulouse, plusieurs centaines de grévistes sont venus manifester. Les personnels du collège se sont largement mobilisés, avec un nombre significatif de cortèges d’établissements au départ de la manifestation.

Au cœur de la colère : le rejet catégorique des groupes de niveaux (ou « de besoins », selon le dernier élément de langage du gouvernement) en français et en mathématiques pour les 6è et les 5è. Une mesure dont la mise en œuvre a déjà commencé, et qui consiste à imposer aux enseignants du primaire (puis du collège) de trier les élèves entre les « bons » et les « nuls » pour la rentrée 2024. « Cette mesure est totalement injuste pour les enfants et très compliquée à mettre en œuvre. Pour nous, ça voudrait dire que 10 élèves seulement seraient dans le groupe dit des "forts" et le groupe des élèves en difficulté serait beaucoup trop chargé. C’est complètement contre-productif, et pour des élèves en difficulté c’est décourageant. », explique Laure, enseignante en français au collège Stendhal, classé REP+.

Plus largement, c’est la question des moyens qui est soulevée, dans la continuité des journées « bahuts morts » qui ont vu un nombre important de grévistes autour de revendications locales, à l’image du lycée Rive Gauche du Mirail et du collège Clémence Isaure à Saint-Cyprien. Classes surchargées, personnel non remplacé, locaux vétustes, équipements délabrés : c’est là le lot d’une grande part du personnel et des élèves, alors que seulement 3 établissements sont classés REP+ dans l’académie de Toulouse. « On a essayé de quantifier ce qui manquait dans notre département pour avoir des conditions de travail acceptables : 3000 enseignants et enseignantes, 500 AESH et 300 AED sont nécessaires pour travailler dans de bonnes conditions et pour offrir aux élèves les meilleures conditions de travail possibles », explique Basile pour la CGT Éduc’action 31.

Également au centre des préoccupations, l’inquiétude de voir le gouvernement prendre des mesures de plus en plus conservatrices et autoritaires sur le terrain de l’éducation, pavant la voie à l’extrême-droite. L’annonce de la mise en place du port de l’uniforme, de la généralisation du SNU ou encore de la « labellisation » des manuels sont largement perçus comme de nouvelles attaques à l’encontre des élèves et du personnel, à l’heure où le gouvernement martèle la perspective du « réarmement de la nation ».

En fin de parcours, devant la Bourse du Travail, place Saint-Sernin, près de 300 grévistes ont été consultés par les organisations syndicales sur les suites à donner à la mobilisation. En amont, l’intersyndicale éducation 31, avait diffusé un « bulletin de vote », visant à ouvrir la discussion avec les collègues sur les établissements. Ces derniers pouvaient se prononcer pour ou contre le choc des savoirs, le plan d’urgence de l’intersyndicale 31 et le mot d’ordre « 22 avril : pas de retrait, pas de rentrée ! ». La majorité des grévistes présents se sont prononcés pour une nouvelle journée de grève le lundi 22 avril. Une prise de position qui, d’après Basile de la CGT 31, envoie un « signal fort » à l’intersyndicale locale. Il est attendu que, après discussion, cette dernière publie un appel à faire grève le jour de la rentrée au niveau du département.

La perspective d’une nouvelle journée de grève donne le cap à suivre d’ici la rentrée : il faut chercher par tous les moyens à élargir la grève à l’ensemble des collègues ainsi qu’aux élèves et à leur familles, qui sont en première ligne des mesures que le gouvernement veut imposer. En ce sens, plusieurs initiatives ont déjà été prises au niveau des établissements pour ancrer la mobilisation localement, avec une adresse particulière à l’intention des parents d’élèves qui a déjà porté ses fruits dans certains établissements qui montrent la voie à suivre. « Il faut amplifier le mouvement et surtout que les parents d’élèves comprennent à quel point cette mesure est injuste et viennent nous apporter leur soutien », explique Laure, enseignante en collège REP+.

Cependant, comme le montre la mobilisation en cours dans le 93 où de nombreux enseignants sont en grève et s’organisent avec les élèves et leurs parents depuis plusieurs semaines, de telles initiatives sont grandement limitées par l’absence de plan de bataille national à la hauteur. Alors que les travailleurs de l’éducation ont déjà exprimé leur ras le bol des calendriers « saute mouton », à l’image des 6000 sondés de la base de la FSU ayant affirmé que « la stratégie de grèves perlées ne marche pas », la perspective d’une nouvelle journée de grève isolée peine à convaincre les collègues. Et à raison : si le passage en force de la réforme des retraites avait déjà prouvé que Macron ne reculera pas sans un rapport de force conséquent, le fait que les travailleurs de l’éducation du 93 n’aient toujours pas obtenu satisfaction après 5 semaines de grève, parfois reconductible, le confirme une nouvelle fois.

Pour obtenir ne serait-ce que le retrait du choc des savoirs et des moyens massifs pour l’ensemble des élèves et des personnels de l’éducation nationale, y compris des salaires qui permettent de vivre convenablement, il faut que les directions syndicales cessent de renvoyer la responsabilité de la grève au niveau individuel, comme le fait notamment Sophie Vénétitay en appelant à la « désobéissance » vis à vis de la mise en place des groupes de niveaux.

Il faut rompre avec les stratégies de la défaite et opposer un plan de bataille sérieux, à même de faire monter en puissance la mobilisation en cessant d’appeler à des journées de grève espacées de plusieurs semaines qui ne font qu’épuiser les collègues. Un plan de bataille d’ensemble, contre la casse de l’école et la mise au pas de la jeunesse, à même d’unir personnels, élèves et familles. Un plan de bataille pour mettre un coup d’arrêt aux innombrables attaques portées par Attal et ses prédécesseurs, mais aussi pour ouvrir la voie à une victoire bien plus ample et durable : celle d’une éducation qui ne vise plus à former une chair à patron ni une chair à canon, mais qui soit mise au service de la majorité.


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