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Colonialisme vert

Les industriels profitent de la COP28 pour s’accaparer les forêts des pays semi-coloniaux

Alors que la COP 28 zigzague entre les polémiques, les mécanismes d’accaparement et d'exploitation des terres des pays semi-coloniaux par les multinationales se concrétisent. Sous prétexte de « compensation carbone » et de préservation, le pillage des ressources se repeint en vert.

Matthieu Victor

7 décembre 2023

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Les industriels profitent de la COP28 pour s'accaparer les forêts des pays semi-coloniaux

Crédits photo : UNclimatechange

Après une semaine de COP 28 à Dubaï, marquée par la présidence de l’Emirati climatosceptique Sultan Al-Jaber, PDG de la firme pétrolière ADNOC et la présence, historiquement accrue, de près de 2500 lobbyistes des énergies fossiles, la vingt-huitième édition de la conférence sur le climat de l’ONU n’en finit plus de verdir les intérêts économiques des états et des multinationales.

Hormis les négociations qui patinent sur la responsabilité des énergies fossiles dans le réchauffement climatique, un autre sujet semble, quant à lui, avancer à vitesse grand V : le marchandage et l’exploitation des forêts équatoriales.

Une mise aux enchères des forêts sous prétexte de la « compensation carbone »

Ainsi, la COP sert aussi à négocier des contrats pour s’accaparer les terres et les forêts des pays d’Afrique et d’Amérique du Sud. A l’image de l’hôte, la pétromonarchie émiratie a acheté [les droits d’exploitation de forêts africaines au travers de l’entreprise Blue Carbon, dirigée par un membre de la famille royale. Un achat, réalisé en amont de la COP 28, justement où les termes d’exploitation et les « droits à polluer », les crédits carbones, sont négociés. En résumé, un achat d’une usine à greenwashing sur une surface couvrant jusqu’à 20% du territoire de certains pays africains dont 5% du Zimbabwe, 10% du Liberia, 10% de la Zambie et 8% de la Tanzanie, au mépris du climat et des populations autochtones.

En effet, cet accaparement se fait autour d’un concept : « la compensation carbone ». Un concept permettant de continuer à polluer et utiliser des énergies fossiles à la condition, illusoire, de capturer via les forêts les émissions de CO2 produites.

De plus ce procédé permettrait à ces derniers de faire des bénéfices sur le marché carbone où les droits sont revendus à des entreprises polluantes. Une logique gagnante-gagnante pour les profits des entreprises capitalistes, augmentant par ailleurs la dépendance économique des pays semi-coloniaux.

De la même manière, ces procédés sont portés également par des dirigeant-es des pays du Sud, notamment Lula. Le président brésilien souhaite ainsi créer un marché carbone au Brésil, pour marchander l’Amazonie et le Cerrado, savane au Nord du Brésil. Bien que la déforestation de la forêt amazonienne a baissé de 42,5%, en comparaison à la même période sous Bolsonaro, la vente aux enchères des forêts vient garantir les intérêts de l’agrobusiness et des multinationales, au même titre que la loi de facilitation de l’utilisation des pesticides, votée par le sénat brésilien et félicitée par le gouvernement de Lula, 2 jours avant la COP 28.

Par ailleurs, ces nouveaux modèles d’accaparement des forêts sont calqués sur la politique coloniale des accords du One Forest Summit, porté par Macron lors de sa visite au Gabon en mars dernier. Ils servent en réalité à verdir l’exploitation impérialiste des forêts primaires des pays semi-coloniaux, l’expulsion des populations autochtones, et le saccage de l’environnement.

Cette exploitation des forêts repose sur la monoculture d’arbres à croissance rapide, appauvrissant les sols et détruisant les sources d’eau à cause de l’usage d’engrais et de pesticides. En résumé, il s’agit de la continuité de l’exploitation coloniale des ressources naturelles des pays sous domination.

La « wilderness » et le colonialisme vert

En plus de la compensation carbone, l’accaparement des terres se caractérise aussi par la création de parcs naturels, niant le droit à la terre de populations ancestrales. Au XXe siècle, le nombre de personnes expulsées de ces territoires s’élèvent à plus de 14 millions de personnes, rien que sur le continent africain. La création de ces parcs repose essentiellement sur la politique coloniale de la « wilderness », introduite par la loi américaine de protection de la nature en 1964. Ainsi, l’Afrique serait un paradis naturel, vierge et surtout sans population vivant dessus, nécessitant alors la sanctuarisation de ces espaces. Un moyen de s’accaparer ces espaces pour permettre à des entreprises de les piller au nom de la préservation de parcs naturels artificiellement créés.

À l’heure où les négociations patinent à Dubaï, la COP 28 nous démontre une nouvelle fois que son seul objectif est de favoriser le pillage des pays semi-coloniaux par les entreprises des pays impérialistes. Cela relance la nécessité d’une écologie anti-impérialiste aux côtés des pays opprimés et exploités contre le colonialisme vert et ses conséquences.


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