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Répression coloniale

Après l’offensive palestinienne, l’État d’Israël prépare un massacre colonial

L'offensive palestinienne contre Israël surgit en réponse à la politique de l'État colonial, qui ne fait que s'accentuer ces dernières années.

Mariam Amel

9 octobre 2023

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Après l'offensive palestinienne, l'État d'Israël prépare un massacre colonial

Crédits Photos : EpA agency

La situation en Palestine entre dans une nouvelle phase qui remodèlera complètement le rapport avec l’État colonial suite à l’offensive menée par le Hamas et d’autres groupes armés palestiniens ce samedi, laissant Israël dans un état de choc total. « Il s’agit d’une attaque stratégique sans précédent, dont la fin est difficile à prévoir en raison de la nature inhabituelle de l’escalade », déclare ainsi Ameer Makhoul, un analyste palestinien, ajoutant « même si l’attaque palestinienne prend fin, son impact à long terme changera les règles du jeu ».

Retour à la réalité cauchemardesque des Palestiniens ces dernières années

Pour la première fois depuis 50 ans, c’est la Palestine qui est à l’offensive. Mais pour comprendre les raisons de cette opération militaire, il est important de faire un retour sur la réalité que vivait le peuple palestinien ces dernières années. Depuis 2020, les Palestiniens subissent en effet le plus sanglant acharnement de leur histoire depuis la seconde intifada. Après les grandes mobilisations à Sheikh Jarrah en 2021, un saut dans la radicalité et une union du peuple palestinien ont inquiété Netanyahou et son régime, qui cherche à briser toute solidarité entre les Palestiniens vivant dans les camps de réfugiés, en Cisjordanie, à Gaza et les dits « Palestiniens d’Israël ».

2023 a ainsi été l’année la plus meurtrière depuis près de 20 ans pour les Palestiniens, avec au moins 230 Palestiniens tués, dont 37 étaient des mineurs, suite aux incursions militaires israéliennes dans les camps de réfugiés de différentes villes de Cisjordanie, aux attaques de colons juifs contre des villages palestiniens, ainsi qu’aux attaques et bombardements israéliens sur la bande de Gaza. Symbole de cette situation, l’attaque sans précédent au village de Huwara en février, où des colons israéliens s’étaient rassemblés et avaient incendié toute la ville avec le soutien matériel de Ben Gvir, ministre israélien de la Sécurité nationale.

En avril dernier, les policiers israéliens ont attaqué la mosquée d’al-Aqsa pendant le mois de Ramadan et interpellé 350 Palestiniens, justifiant leur intervention par la présence d’« agitateurs ». En juillet 2023, Israël a mené les attaques et bombardements les plus importants en 20 ans dans le camp de réfugiés de Jénine, dans le nord de la Cisjordanie, s’ajoutant aux incursions permanentes de l’armée israélienne et aux pogroms des colons contre la population palestinienne. Le gouvernement conservateur et d’extrême droite de Netanyahu avait à l’époque annoncé au même moment la construction de nouvelles colonies, et sa coalition flirtait avec l’idée d’une annexion totale de la Cisjordanie.

Enfin, il y a seulement 10 jours, à l’occasion du 23e anniversaire de l’Intifada palestinienne, Israël a bombardé à l’aide de drones, d’hélicoptères et de chars différentes positions de surveillance et d’autres installations palestiniennes à la frontière de la bande de Gaza. Tout cela dans un contexte d’occupation qui dure depuis 75 ans et qui est soutenu par l’impérialisme américain, européen et les gouvernements de la région, tels que la monarchie saoudienne. Si aujourd’hui l’offensive palestinienne contre Israël est historique, elle n’est que la conséquence naturelle de la politique terroriste menée par l’État colonial et ses alliés au cours des dernières années.

Cette situation commence d’ailleurs à inquiéter jusqu’à certains analystes israéliens qui craignent que les groupes de colons juifs extrémistes, encouragés par les politiciens d’extrême-droite au pouvoir, finissent par exposer Israël plus souvent à ce type de conflits et affaiblissent les capacités de dissuasion et de défense d’Israël. Ainsi, l’analyste israélien Ben Caspit écrit : « Le gouvernement extrémiste n’essaie pas de freiner les colons, qui sont enhardis par la présence de leurs représentants dans les hautes sphères du gouvernement. Le cycle sans fin des attaques et des représailles absorbe une grande partie des investissements et de l’énergie des FDI (forces de défense israéliennes). Gaza a été laissée à la merci de la formidable barrière qui a été construite, des caméras de surveillance et d’autres technologies sophistiquées. Cela n’a manifestement pas suffi ».

Netanyahu déclare l’état de guerre, un massacre colonial se prépare

Face à l’opération de ce samedi, Benjamin Netanyahu a déclaré : « citoyens d’Israël, nous sommes en guerre. Et nous la gagnerons », lors de sa première intervention publique. « Ce n’est ni une opération ni une escalade, c’est une guerre », a-t-il ajouté dans une vidéo diffusée sur ses réseaux sociaux. Le gouvernement israélien veut transformer l’offensive en grande opportunité de reconstruire une « unité nationale » derrière la figure de Netanyahu, affaiblie par la crise politique en Israël.

Toutes ces coordonnées sont alarmantes pour Netanyahou qui cherche à tout prix un plan de vengeance surtout afin de maintenir l’image de son Etat puissant et invincible. En promettant une vengeance brutale et totale, Israël continue de bombarder Gaza en réponse à des échanges d’attaques qui ont abouti à plus que 400 morts palestiniens à l’heure actuelle et des milliers de blessés. Le porte-parole de l’armée colonial a fait aussi appel à des dizaines de milliers de réservistes, avec plusieurs divisions qui se préparent à une éventuelle invasion terrestre de Gaza, a rapporté l’agence de presse Haaretz d’Israël. L’armée a déclaré qu’elle est également prête à recruter des centaines de réservistes supplémentaires.

Plus tôt dans la journée du samedi, le ministre de l’Énergie d’Israël a annoncé des plans pour couper l’électricité dans la bande de Gaza. Les responsables de la santé ont soulevé des inquiétudes quant aux conséquences potentiellement graves pour les blessés cherchant un traitement dans les hôpitaux. Finalement, ce lundi, le ministre de la défense nationale a annoncé un « siège total » de Gaza.

Beaucoup d’analystes s’accordent pour dire qu’Israël pourra difficilement échapper à une opération terrestre à Gaza après une offensive d’une telle ampleur par les forces palestiniennes. Cependant, une telle action présente beaucoup de risques et de dangers, non seulement pour la population palestinienne, mais aussi pour les soldats israéliens. Le territoire de Gaza densement peuplé pourrait constituer un piège pour les forces israéliennes dont le moral est mis à l’épreuve par le succès militaire palestinien.

Une autre question complique les plans d’Israël. Si personne n’a de doutes sur la capacité israélienne de commettre des massacres contre la population de Gaza, cette fois les forces palestiniennes détiennent un nombre important d’otages militaires, dont des officiers, et de civils. La libération de ces citoyens israéliens est déjà en train de devenir un sujet brûlant en Israël. Plus les jours vont passer, plus la pression de la population israélienne sera forte pour la libération des otages, dont le nombre pourrait s’élever à plusieurs centaines. Des bombardements aériens pourraient mettre en danger les otages israéliens eux-mêmes. Dans ces coordonnées, le succès militaire israélien est tout sauf sûr.

Finalement, il existe des inquiétudes très grandes au sein de la population palestinienne d’Israël. Alors que les Palestiniens constituent 20% de la population d’Israël, il y a un véritable risque d’attaques de la part de groupes de colons extrémistes. Des groupes d’extrême-droite sioniste sont en train d’envoyer des messages incitant au meurtre des Palestiniens : « Cher peuple juif, le temps est venu d’agir contre l’autre camp. Enlevez les Arabes, assassinez sans crainte. Vous voyez un Arabe dans la rue ? Jetez-le dans la voiture, maltraitez-le et n’oubliez pas de le photographier et de l’afficher. Les enfants, les femmes et les adultes sont tous concernés. Sans pitié, vous devez immédiatement kidnapper et tuer tout Arabe, quel que soit son sexe ou son âge. Brûlez les entreprises qui emploient des Arabes et affichez-les en ligne pour leur faire honte et travailler contre eux ».

Les impérialistes toujours aux côtés de leur gendarme régional

Dès les premières nouvelles de l’opération lancée depuis Gaza et de la déclaration de l’« état de guerre » par Netanyahu, les grandes puissances européennes et les États-Unis ont exprimé leur soutien inconditionnel à l’État d’Israël. « Je condamne sans équivoque l’attaque perpétrée par les terroristes du Hamas contre Israël. Il s’agit du terrorisme dans sa forme la plus méprisable. Israël a le droit de se défendre contre de telles attaques atroces », a déclaré la présidente de la Commission européenne, Ursula Von Der Leyen.

Les États-Unis, les principaux financiers de l’État colonial, ont exprimé leur « engagement indéfectible » envers le droit d’Israël « à se défendre » et se sont engagés à lui fournir les moyens de le faire. « Notre engagement envers le droit d’Israël à se défendre demeure inébranlable », a déclaré le secrétaire à la Défense, Lloyd Austin. Dans la foulé Washington a décidé d’envoyer des munitions pour aider Israël, et en même temps d’envoyer sa marine vers Israël.

Du côté français, sans surprise, Macron et la droite ont assumé leur soutien inconditionnel et leur solidarité avec leur allié colonial, qualifiant les attaques du Hamas de « terroristes », cherchant ainsi à occulter la guerre historique provoquée par l’occupation coloniale israélienne au sein des territoires palestiniens. Un cynisme flagrant de la part d’un État impérialiste, qui, malgré sa crise, ne cesse pas de maintenir un discours de soutien aux projets impérialistes tout en parlant de « liberté » et de « valeurs démocratiques », alors qu’ils détiennent Georges Ibrahim Abdallah, le plus ancien prisonnier politique de France libérable depuis 1999, derrière les barreaux ou qui interdit systématiquement toute expression de solidarité avec la Palestine.

Tous les discours sur le caractère « terroriste » de la résistance palestinienne ainsi que ceux sur le « droit d’Israël à se défendre » visent à délégitimer la lutte pour la libération de la Palestine et en même temps légitimer les massacres perpétrés par Israël dans une logique de « punition collective ». En même temps, ces discours tendent à identifier la résistance palestinienne au seul Hamas, qui n’est qu’une de ses composantes. Nous avons exprimé à plusieurs reprises nos désaccords politiques profonds avec le Hamas, son projet politique, sa stratégie et ses méthodes, notamment vis-à-vis des populations civiles. Une mobilisation révolutionnaire, ouvrière et populaire, basée sur l’auto-organisation et indépendante des projets bourgeois conciliateurs, est en effet le seul moyen de faire face aux tâches politiques et militaires de la lutte palestinienne.

Cependant, nos désaccords avec les organisations qui dirigent aujourd’hui une partie importante de la résistance palestinienne ne limitent aucunement notre soutien indéfectible au droit des Palestiniens à se battre contre le colonialisme et l’apartheid israéliens. La principale violence vient du colonialisme israélien soutenu par toutes les puissances impérialistes. Dans ce contexte parler du « droit à se défendre » pour Israël n’est autre chose que devenir un complice du massacre de la population palestinienne.


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