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Hommage à un camarade

Hommage à Esteban Volkov (1926-2023), gardien de la mémoire de Léon Trotsky

Esteban Volkov, petit-fils du militant communiste révolutionnaire Léon Trotsky et conservateur de la maison-musée León Trotsky à Coyoacán, est mort ce vendredi 16 juin. Il avait dédié sa vie à la préservation et à la diffusion de l’héritage de son grand-père.

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Hommage à Esteban Volkov (1926-2023), gardien de la mémoire de Léon Trotsky

Esteban Volkov est mort ce vendredi 16 juin à l’âge de 97 ans. Petit-fils de Léon Trotsky, il n’avait jamais cessé de défendre l’œuvre de son grand-père. En 2019, à 93 ans, il participait encore à impulser, aux côtés du Centro de Estudios, Investigaciones y Publicaciones León Trotsky, une campagne pour dénoncer le documentaire mensonger Trotsky que Netflix diffusait alors en partenariat avec le gouvernement russe. Une initiative dans la continuité du travail qu’il a mené tout au long de sa vie pour faire vivre la mémoire de son grand-père, notamment en tant que conservateur de la maison-musée Léon Trotsky. Un rôle souligné en mars 2021, à l’occasion d’un hommage en présence de Esteban, alors âgé de 95 ans, à Mexico.

Une enfance d’exil et de deuil

Vsevolod Volkov, qui hispanisera plus tard son prénom en Esteban, dit Seva, naît le 7 mars 1926, en pleine lutte contre l’emprise croissante de la bureaucratie en URSS. Il est le fils de Zinaida Lvovna Bronstein, première fille de Léon Trotsky, et de Platon Volkov, tous deux militants révolutionnaires russes. Dès 1927, Léon Trotsky, grand-père de Esteban, est exclu du parti bolchévique et exilé à Alma-ata. En 1928, alors que Seva n’a que 2 ans, son père, membre de l’Opposition lui aussi, est déporté en Sibérie. En 1929 Trotsky est définitivement expulsé vers la Turquie.

Zinaida, mère d’Esteban et opposante au régime comme Trotsky, lui rend visite en 1931 après de nombreuses tractations avec les autorités et après que ces dernières aient exigé qu’elle n’emporte avec elle qu’un seul de ses enfants (elle en a alors deux, Esteban et Alexandra). Elle choisit alors d’emmener avec elle son fils. Une fois arrivée en Turquie elle est déchue de sa nationalité soviétique, ce qui l’empêche de retourner chercher sa fille qu’elle ne reverra plus jamais.

Expulsés fin 1932 de Turquie, Trotsky part en France tandis que Esteban et sa mère s’en vont à Berlin chez Lev Sedov, demi-frère de Zinaida. Cette dernière se suicide en janvier 1933, rongée par la tristesse d’avoir perdu sa fille et son mari et brisée par la persécution stalinienne. Forcés de fuir l’arrivée au pouvoir des nazis, Esteban et son oncle partent en Autriche, qu’ils doivent à nouveau fuir lors de la « guerre civile autrichienne » de 1934, à l’issue de laquelle le mouvement ouvrier autrichien est écrasé par le régime. Ce nouvel exil forcé les conduits en France, où Sedov est assassiné par des agents staliniens en 1938.

En parallèle d’autres nouvelles tout aussi tristes parviennent de Russie : Aleksandra et Platon, respectivement la grand-mère et le père de Esteban, meurent dans les goulags staliniens en 1935 et 1936. A la mort de Sedov, Esteban, qui n’a alors que 12 ans et a déjà perdu la plupart de sa famille proche, est enlevé par Jeanne Martin, veuve de Lev Sedov. Finalement retrouvé en 1939 par des proches de Trotsky, le garçon arrive en août de cette année-là au Mexique, où son grand-père vit depuis 1937.

Un témoin et un passeur de mémoire

Esteban Volkov est alors hébergé par son grand-père. Bien qu’ils ne soient restés qu’une année ensemble, il a souvent témoigné que Trotsky avait en tous points remplacé son père. Il est par ailleurs durant cette période un témoin de premier plan de plusieurs attaques d’agents staliniens contre son grand-père : le 24 mai 1940 un commando de 25 hommes pénètre dans la maison de Trotsky pour l’assassiner. Bien qu’ils échouent, Esteban est touché par une des balles des assaillants. Jusqu’à son décès, il était surtout le dernier témoin vivant de l’assassinat de son grand-père en août de la même année, un drame dont il a souvent raconté les détails avec émotions.

Après cette énième tragédie, il continue de vivre au Mexique avec Natalia Sedova, veuve de son grand-père. Il y étudie le génie chimique et fait partie des chimistes ayant fabriqué les premières pilules contraceptives. Il ne quittera plus jamais ce pays d’accueil, où il aura 4 filles et où il fondera le musée León Trotsky ainsi que l’Institut du droit d’asile qu’il dirigeait encore il y a quelques années.

Durant toute sa longue vie il se fera le gardien résolu de l’héritage de son aïeul, publiant de très nombreux ouvrages, collectant autant d’archives qu’il le pouvait et ne cessant jamais d’entretenir la maison-musée Léon Trotsky. Bien que n’ayant jamais rejoint d’organisation trotskyste, le traumatisme de la persécution l’ayant trop durement affecté, Volkov avait toujours été très admiratif des militants trotskystes et de leurs combats. Il avait ainsi déclaré pour les 76 ans de la mort de Trotsky « les trotskystes portent en eux une particule de l’humanité future ».

Nous, qui nous réclamons du courant fondé par Léon Trotsky, nous rendons hommage à l’importance du travail d’Esteban « Seva » Volkov, avec qui notre courant international a eu l’honneur de collaborer à de nombreuses reprises, dans le cadre notamment des publications des œuvres de Trotsky par le CEIP Léon Trotsky. Il aura su avec brio conserver la mémoire du révolutionnaire russe, et n’aura jamais cessé de mener un combat âpre mais nécessaire face aux calomnies, d’où qu’elles viennent, visant son grand-père


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