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Jeunesse : cinq propositions pour soutenir les migrants.

Une goutte de sang a fait déborder le vase déjà plein à ras-bord : la photo du jeune Aylan, Syrien de trois ans retrouvé noyé en essayant de regagner la Grèce avec sa famille, a embrasé l'opinion publique en Europe ces derniers jours. Les dizaines de milliers de morts aux frontières de l'Europe et le traitement inhumain dont les migrants sont victimes une fois arrivés suscitent une indignation croissante à travers le continent. Des élans de solidarité populaires commencent à se mettre spontanément en place en Autriche, en Allemagne, en Angleterre, en Hongrie et, malheureusement, dans une bien moindre mesure jusque-là, en France.

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Ce retard, la jeunesse pourrait bien contribuer à le combler. C’est elle, à travers des milliers de lycéennes et lycéens, qui s’est mobilisée en automne 2013 contre l’expulsion de Khatchik et Leonarda. Elle, depuis les quartiers populaires notamment, qui a exprimé à l’été 2014 une solidarité exemplaire avec le peuple palestinien de Gaza qui subissait les bombardements sionistes. Elle encore qui a amorcé la mobilisation aux côtés des migrants de la Chapelle, expulsés, chassés et réprimés par la Mairie de Paris et le gouvernement PS. Aujourd’hui, dans les lycées, les universités et les entreprises, la question de la solidarité avec les personnes migrantes se pose avec une acuité brûlante. Voici quelques propositions pour agir.

1/ Faire des collectes de soutien sur nos lieux d’études et de travail

Les besoins des migrants ayant parcouru des milliers de kilomètres pour fuir la guerre, la misère, la répression et pour rejoindre l’Europe, sont importants. D’autant plus qu’ils sont souvent obligés de s’installer dans un campement de fortune, de vivre dans des conditions déplorables et n’ont pas accès facilement à l’alimentation, et encore moins à la santé et aux services sociaux de base.

La collecte des produits de première nécessité (vêtements, nourriture, produits d’hygiène et médicaments) constitue donc un premier moyen de la solidarité, sans lequel le reste de la lutte n’est pas possibles. Mais récolter de l’argent est tout aussi indispensable. Les dons d’argent permettent aux migrants et aux soutiens de financer les besoins les plus urgents, de payer des soins médicaux, les transports, des cartes téléphoniques et d’organiser des activités culturelles et éducatives. Une fois la collecte faite, vous pouvez contacter les collectifs, comme le Comité de soutien des Migrants de la Chapelle ou celui d’Austerlitz à Paris, pour savoir comment leur transmettre les produits et l’argent collectés.

Organiser des collectes sur nos facs, nos lycées, nos lieux de travail permet par ailleurs de populariser la cause des migrants que les médias dominants et les gouvernements cherchent systématiquement à rendre invisible ou à récupérer. Mais les gestes humanitaires ne suffisent pas, car ils s’arrêtent à l’appui au quotidien des migrants. La solidarité est surtout et avant tout un combat contre les causes mêmes de cette situation dramatique !

2/ Rejoindre la lutte sur des bases internationalistes et anti-impérialistes

Les initiatives de rassemblement et de manifestation de soutien se multiplient en Europe. Plus de 20 000 personnes ont manifesté lundi 31 août à Vienne en Autriche en faveur des réfugiés. En Allemagne, des Ultras ont également manifesté leur soutien aux réfugiés en déployant des banderoles « Refugees Welcome ». En France, près de 10 000 personnes, dont nombre de jeunes, ont participé samedi 5 septembre à un rassemblement à la place de la République à Paris, et une autre initiative est prévue pour ce mardi à 18h30 au même endroit.

Face à l’ampleur de l’indignation populaire qui commence à s’exprimer lors de ces rassemblements et manifestations, les gouvernements européens et les partis politiques bourgeois essaient de contrôler la solidarité, de l’enfermer dans des formes plus institutionnelles. C’est le cas de la chancelière allemande Angela Merkel qui se pose en « humaniste bienveillante » ces derniers jours ou, ici, du Parti socialiste, celui-là même qui gouverne depuis 2012, qui voudrait récupérer l’indignation en organisant un meeting de solidarité ce mardi 8 septembre, et à travers la création d’un réseau de « villes solidaires ». Quelle hypocrisie quand on sait que ce sont ces politiciens au service des capitalistes qui sont responsables des guerres et de la misère que fuient les migrants, ainsi que de la création d’une puissance réactionnaire comme l’Etat islamique qui a profité du désarroi causé par la guerre de Bush en Irak. Une situation dramatique qui va empirer maintenant que Hollande et les principaux gouvernements européens ont décidé de lancer de nouvelles frappes en Syrie.

Ces tentatives de récupération ont une fonction bien précise : elles visent à empêcher que l’indignation face à la situation subie par les migrants ne débouche peu à peu sur une détermination à lutter contre leurs bourreaux, c’est à dire les Etats impérialistes, leurs frontières et ceux qui les gardent. C’est pourquoi faire entendre la voix de l’internationalisme dans les mobilisations est une tâche à part entière. No one is illegal ! Notre lutte doit rester indépendante des classes dominantes, et les combattre.

3/ Inciter les organisations étudiantes et lycéennes, vos structures syndicales, à prendre la défense des migrants à bras-le-corps

Le mouvement ouvrier et les structures syndicales en particulier ont un rôle central à jouer dans la construction du mouvement de solidarité envers les migrants. C’est notre classe, celle qui n’a que son travail pour vivre – et encore, quand on en trouve – qui a intérêt à abolir les frontières et en finir avec ce monde. Si le PS et son univers peut tenter de récupérer la solidarité populaire, c’est parce que les directions du mouvement ouvrier n’ont pas été jusque là à la hauteur de l’enjeu.

Dans les universités, les lycées et les entreprises, nous pouvons pousser à ce que les syndicats à l’échelle locale comme nationale prennent en charge la question de la défense des migrants et se mettent en pointe de l’expression de solidarité populaire. Concrètement, le mouvement étudiant et les organisations syndicales devraient lutter pour l’arrêt des expulsions, la régularisation de tous les sans-papiers, l’ouverture des frontières qui tuent et nous suffoquent, la liberté de circulation et d’installation. D’autant plus que les gouvernements et les patrons européens cherchent à favoriser le développement du racisme et de la xénophobie dans le contexte actuel pour mieux nous diviser entre travailleurs et chômeurs, selon notre couleur de peau, etc., et que le FN cherche à gagner encore de l’audience en faisant monter la haine des migrants.

Face à Valls qui joue la carte de la répression, le rapport de force permettant d’entourer les migrants de solidarité et de leur assurer un accueil digne dépend en bonne partie de la capacité du mouvement ouvrier, mais aussi du mouvement étudiant, de se mettre en mouvement. Les travailleuses de l’hôpital Bretonneau avaient fait une belle démonstration cet été en venant témoigner leur solidarité auprès des migrants de la porte de la Chapelle. Il faut suivre leur exemple !

4/ Ouvrir nos universités et nos lycées pour mettre à mal les frontières

Le mouvement étudiant organisé et les étudiants ont un rôle particulier à jouer dans la construction d’un rapport de force en faveur des migrants. Cela passe par la lutte pour ouvrir les universités à ces derniers.

L’université subit depuis plusieurs décennies une transformation profonde qui tend à la fermer de plus en plus aux classes populaires mais aussi aux populations marginalisées comme les migrants et les sans-papiers. Quand elles acceptent des étudiants étrangers, elle ne leur garantissent pas pour autant de papiers. Ainsi, ceux qui ne sont pas arrivés par les chemins administratifs « légaux » ou qui ne remplissent pas les critères draconiens de la préfecture pour obtenir un titre de séjour, vivent quotidiennement sous la menace de la reconduction à la frontière, d’un retour forcé dans les pays qu’ils ont fui.

Cette situation n’est plus acceptable. Le mouvement qui s’amorce doit permettre d’ouvrir les portes des facs en grand, à tout le monde ! Nous voulons pouvoir étudier côte à côte avec des migrants, qui doivent pouvoir accéder à tous les services d’accompagnement, à l’apprentissage de la langue, ainsi qu’au reste des services publiques. N’hésitons pas à prendre des initiatives audacieuses pour ouvrir nos facs, car dans le contexte austéritaire actuel rien ne sera possible sans mobilisation, sans dissidence vis à vis des règles établies.

5/ Mettre nos facs et nos lycées au service de la lutte !

Le système éducatif est l’un des principaux vecteurs de l’idéologie dominante dans la société actuelle, il sert au jour le jour à discipliner la jeunesse. C’est cette même idéologie qui rend invisible et inaudible tout ce qui ne va pas dans son sens, qui nous ferme les yeux et les cerveaux à la question politique posé à ce monde-là par la situation subie par les migrants.

En nous mettant de leur côté, nous pouvons aussi faire de nos lieux d’étude de véritables tribunes à partir desquelles le combat de la solidarité gagne en visibilité et en légitimité. En organisant des conférences et en invitant les migrants à venir parler de leurs combats au sein de nos universités, nous les mettrons au service de la transformation de cette société, loin de la fonction de gardiennes de l’ordre établie qu’elles jouent au quotidien.

Pour proposer d’autres idées, nous faire une remarque ou prendre contact, écrivez à : [email protected]


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