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Offensive autoritaire

Université du Mirail. La présidence veut faire taire les critiques sur sa gestion des VSS

En février, la commission de traitement des VSS du Mirail démissionnait en bloc dénonçant les blocages de la présidence de l’université. Un nouveau dispositif qui renforce le contrôle de la présidence sur le traitement de ces affaires, dénoncé par plusieurs syndicats, vient d’être adopté.

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Université du Mirail. La présidence veut faire taire les critiques sur sa gestion des VSS

En février, la quasi-totalité des membres de la cellule de Lutte, d’Information et de Prévention contre le Harcèlement Sexuel (CLIPHAS) de l’Université Toulouse Jean Jaurès – le Mirail, ont démissionné dénonçant les empêchements de mener à bien leur mission. Le 23 avril, malgré l’opposition de la majorité des élus étudiants, de syndicalistes enseignants et du personnel, un nouveau dispositif de lutte contre les violences sexistes et sexuelles a été adopté par le Conseil d’Administration.

Ce dispositif, qui cherche à renforcer le contrôle de la présidence sur les signalements, inclut également des mesures pour signaler les « dispositif de radicalisation » et les « atteintes à l’honneur et la réputation de l’université ». Une offensive grave contre les libertés démocratiques à l’université. Très largement critiquée pour sa gestion des violences sexistes et sexuelles, la présidence cherche à faire taire les voix qui s’élèvent.
Le 5 février dernier, les membres de la Cellule de Lutte, d’Information et de Prévention contre le Harcèlement Sexuel (CLIPHAS) publiaient une lettre annonçant la démission de la majorité des membres de la cellule protestant contre le manque de moyens et le mépris de la présidence ne leur permettant plus d’exercer leurs fonctions correctement.

Lors de leur démission, les membres de la CLIPHAS ont dénoncé l’étouffement d’affaires de VSS pour protéger la réputation de l’université. Le communiqué explique ainsi que « les dossiers enterrés sont, sans surprise, ceux qui mettent en cause les membres les plus haut placés  ».

Le communiqué dénonce aussi le manque de moyens pour effectuer leurs missions. En effet, ses membres n’étaient pas indemnisés pour les heures supplémentaires fournies, l’accompagnement des victimes était insuffisant ou absent, les délais de traitement s’étalaient sur la durée, jusqu’à demander à une victime de réitérer son témoignage une dizaine de fois devant des interlocuteurs différents, un poids en plus pour les victimes et témoins.

Dans leur lettre de démission, les étudiantes et personnels qui formaient la commission condamnent une politique de lutte contre les VSS réorganisée « par le haut », sans qu’elles soient consultées. Les bases de la politiques de la cellule ayant été bafouées, elles déclarent « nous ne pouvons plus, par notre silence, être complices d’une inertie institutionnelle douloureuse pour les victimes et témoins  ».

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Un nouveau dispositif pour bâillonner les critiques

Suite à cette lettre, la présidente s’est entretenue avec les anciennes membres de la CLIPHAS. Un entretien pendant lequel la présidente leur a reproché une posture militante et non institutionnelle avant de les accuser d’incompétence. Une attitude scandaleuse alors que l’expérience démontre que c’est bien l’incompétence et les blocages de la présidence qui ont empêché la CLIPHAS d’accomplir son rôle.

Les bilans à tirer de l’échec de cette cellule démontrent la nécessité d’une indépendance totale vis-à-vis des directions d’université, qui privilégieront toujours la réputation de l’université pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles. Le mouvement initié à l’université Bordeaux Montaigne suite à une gestion désastreuse des VSS par la présidence atteste de ce besoin d’une lutte en toute indépendance des présidences, qui cherchent à museler la parole et réprime les mouvements de lutte contre les violences sexistes et sexuelles.

A l’université du Mirail, pour empêcher que la parole se libère et museler les critiques, la présidence de l’université propose une refonte du dispositif de traitement des signalements. Ce dispositif traiterait de la même manière les signalements concernant le harcèlement et les discriminations racistes, sexistes, validistes mais aussi les questions de « déontologie et d’intégrité scientifique » ainsi que les « atteintes à l’honneur et la réputation de l’université ».

Ce nouveau dispositif permettrait de centraliser les signalements par un point d’entrée unique : un site de recueillement de ces signalements et une ligne d’urgence. Différents référents seraient nommés pour gérer chaque problématique. Ces référents seront chapeautés par un coordinateur, dont le poste doit être crée, qui devra notamment suivre les « dossiers d’enquête complexes » qui répondra directement de la présidence.

Aucune des problématiques énoncées par les anciennes membres de la CLIPHAS ne sera résolue. En revanche, c’est la promesse d’un contrôle intensifié de la présidence sur la gestion des cas de VVS. Les anciennes membres de la CLIPHAS affirment d’ailleurs que le dispositif proposé ne protégera pas les victimes mais bien l’université, et cela pour plusieurs raisons.

Dans un premier temps, l’entrée unique proposée par la présidence, qui le présente comme une mesure de simplification pour les victimes et témoins, permet en réalité un contrôle accentué de la direction sur le traitement des signalements. Les syndicats professionnels s’inquiètent notamment du fait que les élus du personnel seront de fait dessaisis de ces prérogatives alors qu’ils jouent un rôle pour suivre les dossiers et le traitement accordé aux affaires. Dans un cadre de concurrence et de népotisme comme celui de l’université, le rôle de ces élus est essentiel pour éviter favoritisme et règlement de comptes. Que se passera-t-il « si c’est un membre de la présidence qui est mis en cause ?  » interroge les syndicats professionnels et étudiants dans un communiqué.

Ce dispositif ne garantit nullement l’indépendance vis-à -vis de la direction de l’université dans sa gestion des signalements et dans le traitement des cas de VSS. La décision finale quant aux mesures à prendre concernant les signalements revient toujours à la présidence, que les anciennes membres de la CLIPHAS accusent d’avoir enterré des affaires et préféré protéger la réputation de l’université plutôt que les victimes.

Lors du Conseil d’Administration du 23 avril, les critiques ont été vives contre le nouveau dispositif, mais la présidence n’a rien voulu entendre. Elle est passée en force, malgré l’opposition des syndicats d’étudiants et personnels. Le protocole a été adopté avec le vote de la CFDT et de l’UNEF, qui se sont une fois de plus alignés sur le programme de la présidence. Dans un mail à l’ensemble des étudiants et personnels, elle a ensuite défendu son dispositif, et effacé les bilans exposés par la CLIPHAS et les limites qui ont été pointées dans le Conseil d’Administration.

Une offensive autoritaire qui s’aggrave à l’université du Mirail

Au-delà de la question des violences sexistes et sexuelles, ce nouveau dispositif est alarmant puisqu’il ouvre une porte à la répression et à la censure sur l’université, notamment puisqu’il compte recueillir et gérer des signalements pour « atteintes à l’honneur et à la réputation de l’université ». Une mesure scandaleuse, qui cherche à bâillonner toute critique envers la présidence. Avec le dispositif de la présidence, toute critique à « l’atteinte à la réputation de l’université » pourra valoir un signalement.

Une attaque autoritaire, dans la continuité du signalement effectué au procureur suite à une action du comité de soutien à la Palestine, pour criminaliser la lutte en soutien au peuple Palestinien. Un signalement qui calomnie les étudiants qui dénoncent le génocide et instrumentalise la lutte contre le génocide à Gaza.

Pour échanger sur le nouveau dispositif de signalement et s’organiser contre cette offensive autoritaire, une assemblée générale est appelée par les syndicats de personnels et d’étudiants le mardi 30 avril à 12h30. Le nouveau dispositif de signalement est une attaque grave contre la liberté de critique des étudiants et des personnels qu’il s’agit de dénoncer avec force. Une lutte à ancrer dans la dénonciation de l’offensive en cours du gouvernement Macron contre les soutiens à la Palestine.


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