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Palestine

Marseille. La mairie vote la suspension des aides à l’UNRWA et acte son soutien au génocide

Alors qu’elle s’était engagée à rétablir les 80 000€ d’aides suspendus à l’UNRWA, la mairie se range derrière la droite et l’État français en votant au conseil municipal pour plutôt verser cette somme à l’UNICEF, et de verser une subvention équivalente à une association juive. L’aide à l’UNRWA, elle, reste suspendue.

Anna Nolite

23 février

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Marseille. La mairie vote la suspension des aides à l'UNRWA et acte son soutien au génocide

Crédit photo : Mairie de Marseille

Alors que l’offensive de Tsahal à Rafah marque un nouveau saut dans le génocide à Gaza, sur fond d’une crise humanitaire catastrophique, les élus locaux de Marseille ont confirmé le choix de leur camp.

Vendredi 26 janvier, quelques heures après la décision historique de la Cour Internationale de Justice affirmant le « risque » génocidaire à Gaza, la mairie marseillaise décidait face aux pressions du groupe d’opposition Une Volonté pour Marseille de suspendre son aide financière de 80 000 € à l’UNRWA, agence d’aide aux réfugiés palestiniens. Ceci avant même toute déclaration de la diplomatie française.

Une décision scandaleuse dénoncée par de nombreuses organisations dont Urgence Palestine Marseille, que la mairie a reçue il y a quelques semaines. Lors de ce rendez-vous, celle-ci avait alors confirmé qu’elle verserait cette aide, votée par la majorité municipale en décembre.

Le 2 février, le maire a donc annoncé qu’il verserait bien ces 80 000 €. Mais c’était avant de faire volte-face pour finalement se ranger derrière la droite et l’État français : vendredi 16 février, le conseil municipal de Marseille vote à l’unanimité une aide de 80 000 € à l’UNICEF. Elle sera, conditionnée au versement d’une « subvention miroir », équivalente à une association juive, et se range derrière l’avis du gouvernement concernant l’aide à l’UNRWA qui se voit alors suspendue.

Dénier et se faire complice du génocide

Tentant de dissimuler le coup porté à l’UNRWA, principale organisme d’aide aux palestiniens, le maire Benoît Payan (PS) a choisi de justifier le choix de l’UNICEF en déclarant : «  Les enfants sont les premières victimes de ce drame. Il n’y a qu’une seule urgence : c’est préserver les vies humaines  ».

Pourtant, ce sont bien les enfants palestiniens—et l’UNRWA, qui gère de nombreuses écoles, centres de santé, et de distributions alimentaires—qui sont des cibles privilégiés dans ce génocide. Tsahal multiplie les bombardements contre les structures de l’agence depuis le 7 octobre, et a tué plusieurs centaines de ses employés. Présente à Gaza, en Cisjordanie, au Liban, en Syrie et en Jordanie, l’UNRWA a pour objectif d’assister les 700 000 réfugiés palestiniens de la Nakba, puis des différentes guerres qui ont opposé Israël aux Palestiniens, ainsi que de leurs descendants.

C’est elle qui accorde une existence administrative aux réfugiés Palestiniens et peut garantir leur droit au retour. Affaiblir l’UNRWA revient à condamner des millions de personnes à la famine, au froid et la maladie, soit être partie prenante de l’entreprise génocidaire d’Israël. Substituer cette aide à l’UNRWA, seule organisation implantée dans la bande de Gaza sous blocus à une association généraliste qui peine à y intervenir est une marche en arrière délétère pour la population palestinienne.Comme le rappelait Sarah, membre de Urgence Palestine Marseille et du Comité Étudiant Palestine à la manifestation marseillaise du 18 février :

«  Suspendre l’aide à l’UNRWA s’apparente à punir des civils pour des faits non avérés avec lesquels ils n’ont aucun lien... Choisir l’UNICEF, c’est sciemment choisir une organisation dont qui n’est pas en capacité d’aider les civils à Gaza.  »

À l’heure où le directeur de l’UNRWA alerte sur l’effondrement imminent de la structure, Payan a précisé qu’il ne faisait que «  se ranger derrière le pays auquel [il appartient]  » et qu’il verserait les 80 000€ prévus «  dès lors que la France effectuera ces prochains versements.  »

C’est alors bel et bien à la position de l’Etat français, qui s’est illustré dans la criminalisation du soutien à la Palestine, la légitimation du massacre mené par Tsahal, l’instrumentalisation du mouvement féministe ou contre l’antisémitisme et la vente d’armes à l’Israël que s’en remet la majorité de gauche. La mairie confirme donc son appartenance au régime, comme en témoigne la réaction du maire à l’usage du terme « génocide » : «  Je demande de la mesure et ne partage pas ce terme.  »

Suite au conseil municipal du 16 février, Payan et son groupe DVG le Printemps Marseillais se sont félicités de ce vote, au même titre que la droite, avec la présidente de la métropole Martine Vassal (DVD, une Volonté pour Marseille) en tête.

La droite diabolise les palestiniens pour fustiger la mairie

Les élus de droite et de l’extrême droite, eux, avaient profité de la séquence pour attaquer la mairie, reprenant les accusations de complicité terroriste venant de Tsahal à l’encontre de l’UNRWA sans qu’elles aient pu être avérées.

Une véritable campagne de déshumanisation des palestiniens est lancée. En tête, Valérie Boyer (sénatrice LR), adepte aux accusations complotistes à l’encontre des associations humanitaires comme l’UNRWA, qu’elle a qualifiée de «  proche du terrorisme  ». En décembre, lors du vote au conseil municipal sur le versement d’une aide à cette structure, elle avait déclaré : «  Cet organisme entretient des relations plutôt ambiguës avec les terroristes du Hamas, lesquels se serviraient régulièrement dans les aides humanitaires acheminées par cette association précisément.  » En février, elle avait déclaré que soutenir l’UNRWA revenait à bafouer la mémoire des victimes

Tout en implorant cette suspension d’aide effective à la Palestine, elle appelle au soutien des enfants israéliens en soutenant Les enfants et [les] femmes n’ont pas de frontière dans la souffrance . Ceci tandis que l’UNICEF elle-même déclare refuser les dons fléchés pour Israël qui n’en présente pas le besoin. Apparemment tout dépend de la frontière, une rhétorique qui empreinte la désignation de «  bonnes  » et de «  mauvaises  » victimes.
Elle s’empare également de la chasse aux sorcières instiguée par Aurore Bergé pour s’en prendre aux organisations féministes qui oseraient sur prononcer pour la Palestine.

Stéphane Ravier de Reconquête !, lui, s’est dit prêt à porter l’affaire devant le tribunal administratif pour suspendre définitivement l’aide à l’UNRWA si elle arrivait un jour à être versée.

Instrumentalisation de l’antisémitisme pour légitimer le statu quo

Volet particulièrement cynique de la décision votée au conseil municipal : l’aide versée à l’UNICEF sera conditionnée à une subvention équivalente à «  une association juive pour aider les enfants victimes des attentats  », selon les propos de Martine Vassal et le compte rendu de la plénière.

Cette condition devrait apparemment répondre à une recrudescence des actes antisémites. Il s’agit d’une instrumentalisation totale de la lutte contre l’antisémitisme, qui répond à la même démonstration hypocrite que la cérémonie organisée par Macron le 7 février à Paris. A l’heure où la lutte contre l’antisémitisme devrait évidemment être un enjeu important face à la multiplication d’actes racistes visant les personnes juives, lier ce combat à la lutte contre les instrumentalisations génocidaires mais aussi pro-Israël est fondamental. Faire des victimes israéliennes une justification pour les 30 000 morts palestiniens dans le cadre du massacre toujours en cours à Gaza est insoutenable.

Pourtant, c’est de cette même rhétorique abjecte dont use et abuse les élus marseillais. Martine Vassal (LR) et Une Volonté pour Marseille multiplient les rassemblements et manifestations avec le CRIF.

Le vote unanime du comité municipal confirme donc les positions des élus locaux de gauche comme de droite, qui s’alignent sur la position de l’État français et son soutien à la politique génocidaire de Netanyahou. «  Depuis quelques semaines la mairie a choisi son camp. Aujourd’hui il n’y a plus de doutes  », a déclaré un militant de Révolution Permanente à la manifestation de dimanche. «  La neutralité dans un tel massacre n’existe pas, il n’y a que deux camps possibles. Nous aussi on a choisi notre camp : celle de la libération de la Palestine et de l’auto-détermination des palestiniens.  »


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