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Vers toujours moins de démocratie

Qu’est-ce que la « modernisation » des règles de l’élection présidentielle ?

Il y a un peu plus d’une semaine, jeudi 24 mars, était présentée une loi à l’Assemblée qui prévoit la « modernisation » des règles de l’élection présidentielle. Une pétition circule déjà pour s’y opposer, et des voix très diverses se sont rapidement prononcées pour protester contre ce projet. Le contenu de cette loi, qui pourrait transformer les règles de l’élection présidentielle dès 2017, est, à vrai dire, déconcertant. Jugez plutôt. Nous passons ici au crible les quatre mesures proposées. Aodrène Kergoat

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4 mesures

(1) Les 500 parrainages octroyés par les élus, nécessaires pour concourir comme candidat à l’élection présidentielle, ne seront plus délivrés directement aux équipes militantes qui sillonnent la France peu avant l’élection pour obtenir ces précieux sésames ; les maires des villes et communes devront désormais, suite aux visites des différents partis auxquels ils répondraient favorablement, adresser leurs déclarations de parrainages par la poste au Conseil Constitutionnel. Les parrainages obtenus des élus lors des déplacements des partis pour ‘la course à la présidentielle’ deviendraient donc des promesses verbales.

(2) Jusqu’ici les parrainages effectués par les élus n’étaient que partiellement rendus publics ; 500 parrainages par candidats étaient tirés au sort et publiés à l’issue de la démarche d’investiture. Désormais, les élus verraient leur noms systématiquement associés aux candidats qu’ils ont choisis de parrainer, et leurs parrainages connus au fil de l’eau, rendus publics avec une mise à jour tous les deux jours indique-t-on.

(3) La règle de l’égalité de temps de parole dans les médias de tous les candidats autorisés à se présenter à l’élection, à la télévision ou à la radio, était obligatoire lors des cinq semaines qui précédait le premier tour de l’élection ; cette période pourrait être réduite à deux semaines. Entre la cinquième et la deuxième semaine précédant l’élection, les chaînes de télévision et radios seraient tenues, au lieu de l’égalité stricte du temps de parole des candidats, au principe d’une « équité renforcée avec programmation comparable ». Cette mesure « d’équité » a ce sens que les candidats les plus dotés en intention de vote, ou qui ont totalisé le plus de votes lors des dernières élections, auront proportionnellement le temps de parole le plus important. C’est certainement la mesure la plus scandaleuse.

(4) La dernière mesure, enfin, allongerait l’horaire d’ouverture des bureaux de vote, qui passerait de18 heures à 19 heures dans les communes ; la fermeture des bureaux de vote à 20h dans les grandes villes resterait en revanche inchangée. Cette dernière mesure est surtout intéressante pour ses justifications ; on comprend qu’il s’agit de rendre la procédure de l’élection la plus irréprochable qu’il est possible, s’agissant « d’éviter les fuites » au sujet des résultats dans les petites villes, entre 18h et 19h. Belle ambition politique.

Une caricature dans l’air du temps, avec son cortège de justifications « techniques »

A la lecture de ces nouvelles mesures organisant l’élection présidentielle, on commence par se poser des questions naïves. Comment a t-on pu même oser proposer de telles mesures ? Et puis, comment expliquer un tel manque de subtilité de la part de nos gouvernants, tant le changement proposé a un contenu clair, limpide, et inacceptable, non seulement pour les critiques aiguisées du régime, mais même pour toute personne qui aurait encore un peu de foi dans le principe de l’élection démocratique ? Le prudent législateur est, d’habitude, celui qui ôte des droits aux citoyens sans en avoir l’air. Entre autres choses, il compte sur le temps, et sur l’effet d’accumulation ; il rogne sur un point de détail (ou ce qui en a l’air), puis, plus tard, sur un autre ; avec le temps, les citoyens auront été dépossédés de prérogatives importantes qu’ils n’auraient jamais concédées autrement. Un principe complémentaire est que la réforme proposée doit rester ambiguë dans les esprits : on doit toujours hésiter à la qualifier d’attaque contre des choses auxquelles on tiendrait. Mais le législateur semble actuellement avoir perdu tout sens stratégique, il semble avoir perdu la tête. La loi travail en est un très bon exemple ; elle est si claire, si caricaturale que l’attaque qu’elle porte contre le droit du travail, contre les employées et les plus précaires d’entre eux, ne peut échapper à personne. La loi portant sur la modification des règles de l’élection présidentielles, véritable caricature elle-aussi, en prescrivant des changements qui ôteraient les dernières illusions qui pouvaient demeurer sur le caractère démocratique de l’élection et du régime présidentiel, est donc dans l’air du temps.

A ces mesures diverses, les initiateurs du projet de loi trouvent des justifications également diversifiées, précises, techniques, c’est-à-dire, il faut le penser, indépendantes de toute stratégie politique quelconque. Il s’agirait seulement de corriger des problèmes récurrents dans l’organisation de l’élection présidentielle, problèmes purement techniques, auxquels il faut apporter une réponse technique ; la politique n’aurait rien à voir dans cette affaire. C’est une vieille recette.

1. La révision des modalités des parrainages contre les partis minoritaires

« Technique » est en effet la mesure numéro (1), qui prévoit que les maires ne délivrent plus directement leurs parrainages aux équipes de militants qui se déplacent pour les obtenir ; les élus devront envoyer ces déclarations de parrainage eux-mêmes par la poste au Conseil Constitutionnel. C’est, dit-on, afin d’éviter les harcèlements et les pressions exercées par les équipes de campagne dont des élus se seraient plains par la passé. On aurait par-là trouvé le moyen technique d’éviter ces regrettables incivilités ; nous pourrons dormir la conscience tranquille. On ne s’interroge pas en revanche sur l’effet de ces démarches supplémentaires, coûteuses en termes de temps et d’organisation qui seront exigées des maires. Et dans ces conditions, pour des partis politiques fortement minoritaires, la tâche déjà ardue de collecter 500 parrainages risque de devenir un casse-tête pire encore, ce qui pourrait conduire de fait à les écarter de la perspective d’une candidature, voir les en décourager d’avance, laissant la place aux deux grands partis majoritaires, en confirmant une tendance de la politique française que manifestement il n’est plus lieu de combattre.

Les défenseurs de cette première mesure, d’autre part, omettent, et on comprend pourquoi, de s’interroger sur les causes des pressions exercées sur les élus lors des démarches pour l’investiture, qui ont peut-être eu lieu. Ils se contentent de remarquer que des harcèlements se sont produits, et qu’il faut les éviter. Mais pourquoi donc ‘la course à la présidentielle’ donne-t-elle lieu à de tels comportements (si on admet qu’ils se sont produits) ? Pour des candidats des grands partis, obtenir 500 parrainages, en payant certainement leurs ‘militants’, voir des entreprises privées qui effectueront ces déplacements, ne doit poser aucune difficulté ; mais pour les partis qui n’ont pas ces financements, et qui s’adresseront à des élus de communes issues des grandes tendances majoritaires, la tâche, encore une fois, est bien plus difficile, à tel point que c’est déjà un pari pour les petites formations de proposer un candidat. Que dire enfin des raisons qui font qu’un élu donne son parrainage à un candidat qui n’est pas de son parti ? Est-ce parce que le candidat ‘a l’air sympa’, ou plutôt parce que l’élu estime que c’est un devoir démocratique de permettre la tenue d’une élection opposant des candidats de différents partis ? Mais alors pourquoi des refus sont-ils enregistrés ? Cette part d’arbitraire est-elle justifiable par des principes démocratiques ? A moins d’avoir pour but de stabiliser un partage du pouvoir sans heurts entre les deux grands partis traditionnels, la règle du parrainage était, déjà dans son état initial, incompréhensible.

Les règles initiales de l’élection présidentielle fixées par la Constitution, d’un strict point de vue démocratique, étaient déjà aberrantes. On propose de les rendre encore plus antidémocratiques.

2. Une pression contre ce qui subsistait de « pluralisme »

La mesure numéro (2) va dans le même sens ; tous les parrainages octroyés par les élus seront désormais rendus publics, et, ont le lésine pas sur la peine, ils le seront presque en temps réel, mis à jour tous les deux jours ! Un rien de jugeote suffit à en déduire que les maires de villes et communes réfléchiront à deux fois avant de donner leur parrainage, si l’association de leur noms à des candidats n’arrangeait pas leurs affaires locales, ou encore leurs rapports au pouvoir central, ce qui conduirait encore une fois à écarter des partis des présidentielles, même si, hé non, ce n’est pas le but de la mesure. Les conséquences de ces mesures s’opposent, si ouvertement que c’en est étonnant, à un principe élémentaire des démocraties, qu’on appelle le « pluralisme ». Le « pluralisme » désigne ce principe selon lequel toutes les opinions politiques (si elles ne font pas la promotion de la violence ou de la haine notamment) ont par principe la même valeur, et doivent par conséquent avoir accès aux mêmes procédures leur permettant de s’exprimer ; contester par le fait le principe du pluralisme, c’est donc afficher du mépris pour les formations politiques qui ne sont pas au pouvoir, et pour ceux qui les soutiendraient. C’est juger également qu’on peut faire tout à fait l’économie du « débat démocratique » entre des positions politiques en opposition. On se rappelle pourtant que des candidats du PS faisaient campagne il y a quelques années en soutenant la revendication de « plus de démocratie », et d’une « démocratie participative » ; ce genre de thème n’est manifestement plus nécessaire à leur agenda. Il doit leur paraître plus urgent de verrouiller les portes de la prochaine élection, qui a lieu en 2017.

Il serait pourtant ridicule de crier à une manœuvre qui viserait à écarter n’importe quel parti de la prochaine élection. Les grands partis ne sont évidemment pas menacés par les formations politiques minoritaires ; la constitution de la Cinquième République y veille, elle a été conçue pour offrir le monopole du pouvoir aux mains des grands partis, ce que les experts en science politique appellent aussi par euphémisme le principe de « l’alternance ». La Constitution, plus simplement, permet que nous observions ce spectacle habituel, tous les 5 ans, d’une lutte réglée entre deux partis, le grand parti de droite, qui change de nom quelquefois, et le parti de gauche, qui devrait lui aussi y songer. Si le partage du pouvoir entre ces deux grands partis fonctionnaient déjà si bien, pourquoi en vouloir d’avantage ? A quoi bon ces nouvelles règles de l’élection présidentielle ? L’élection présidentielle, en France, est aussi l’événement politique au cours duquel des discours peuvent être portés, entendus, de la part de partis qui ne bénéficient pas de leurs entrées réservées dans les médias le reste du temps, et qui n’ont pas les moyens financiers des grands partis pour porter leurs revendications. Faire l’économie de ce semblant de débat démocratique, dans des conditions déjà si largement biaisées, pourrait être l’enjeu de ce projet de loi. Éviter ‘l’éparpillement des voix’ sur les extrêmes, s’éviter la peine d’un appel au ‘vote utile’ au profit des grands partis quand les partis minoritaires auraient disparus de la scène électorale serait le second motif.

Mais tout de même, on reste perplexe. Ce projet de loi manque de subtilité, d’ambiguïtés, de points aveugles. Depuis plusieurs décennies on feint de regretter que les français ne soient pas plus soucieux d’accomplir leur « devoir citoyen » en allant voter ; on se permet quelques remarques, parfois, sur le manque de sens que revêt l’élection présidentielle pour les populations qui ne votent pas, on tente d’en saisir les causes, on publie quelques statistiques en guise d’illustration, on observe les courbes. Ces interrogations et ces pieux regrets avaient leur importance. Ces précautions permettaient que l’élection présidentielle garde malgré tout une sorte de légitimité. Cette légitimité de l’élection présidentielle est balayée par le projet de lois débattu actuellement.

3. La parole minoritaire encore plus invisibilisée

Le législateur est trop cynique, ne prenant plus la peine de dissimuler ses intentions de gouverner sans le consentement de qui que ce soit, il risque d’écœurer ceux qui n’oseraient pas encore s’en tenir pour quitte de tout rapport avec ce régime politique. Comment pourra-t-on encore prétendre regretter que la moitié de la population française ne se déplace pas pour voter lorsque le débat « démocratique » - encore une fois avec toutes les énormes limites qui s’attachent à la signification bourgeoise du terme - aura été rendu structurellement impossible, et lorsque les deux grands partis de France se seront arrogés par la loi le droit d’exercer un gouvernement héréditaire ? Le mot n’est pas abusif, la mesure numéro (3) organisant les nouvelles élections présidentielles aurait pour conséquence d’introduire dans la Constitution une sorte d’hérédité du gouvernement aux deux grands partis qui régnaient déjà sans partage depuis 1958. Cette mesure prévoit de diminuer la période légale de temps de parole égal des candidats dans les médias, à la télévision et à la radio, de cinq semaines jusqu’à présent, à deux semaines.

Ce n’est pas tout ; les justifications à cette mesure sont encore plus édifiantes, elles réservent même une nouvelle surprise. Deux justifications à ce changement ont été invoqués. La première est que la trop grande durée de la période d’égalité stricte de temps de parole des candidats est une trop grande contrainte pour les chaînes de télévision et de radios, qui les conduit à diminuer leurs temps de programmes consacrées aux élections. La seconde est que l’égalité serait déjà rompue dans le choix de programmer un candidat à une heure de grande écoute ou à une heure de faible audience. La première justification parait animée par une intention politique légitime : il s’agit d’encourager les médias à consacrer d’avantage de temps d’antenne aux discours politique avant les élections ; la seconde est la reconnaissance d’une injustice permise jusque-là par le fonctionnement des médias et la trop grande liberté laissée par la loi, car ce n’est pas, en effet, égal, qu’un discours politique soit diffusé à 20 heures ou plutôt à 9 heures du matin. Mais la solution proposée est étonnante, car elle est de nature à renforcer le mal qu’elle prétend combattre.

La solution adoptée est la suivante : entre la cinquième et la deuxième semaine avant l’élection, au lieu de l’égalité stricte du temps de parole des candidats, on substituera le principe de « l’équité renforcée avec programmation comparable ». Mais « l’équité », il faut le préciser, n’est pas l’égalité, c’est un concept complexe qui associe le principe d’égalité et le principe de différence. Quand, par exemple ‘l’homme bienveillant’ est loué, et ‘le prétentieux’ blâmé, les deux hommes sont traités également, avec une même règle de justice, mais différemment, car leurs actions sont différentes, et il en est tenu compte. Dans notre cas, la différence, entre les candidats, serait établie par le CSA, d’après les critères notamment de la représentativité des candidats et des précédents scores électoraux de ces derniers. Pour le dire simplement, les candidats n’auraient donc plus un temps de parole égal dans les médias avant les élections, mais un temps de parole (également) proportionnel aux intentions de vote les concernant, et à leurs scores aux dernières élections. Pour le dire encore plus brutalement, les candidats PS et Les Républicains inonderont les chaînes de télévision et les radios, et on aurait bien du mal à apercevoir les candidats des partis plus minoritaires. Mais ne s’agissait-il pas de procéder à de menus ajustements techniques ? Et surtout, n’était-ce pas pour corriger des inégalités existantes entre les candidats que ces mesures ont été proposées ? Alors pourquoi diable des mesures censées s’opposer à des inégalités auraient-elles pour effet de les accroître ? Plus que d’un accroissement des inégalités entre les formations politiques lors de l’élection présidentielle, on peut donc parler d’une ratification explicite dans la Constitution du principe de l’hérédité du gouvernement attaché aux deux grands partis de France, expression supplémentaire du bonapartisme déjà intrinsèque de la République. On le saisit plus clairement par un détour. C’est un principe typiquement libéral qu’un individu doit être jugé actuellement à la lumière de ses actes passés. Ce principe donne lieu à des phénomènes amusants. Un élève qui a séché le premier jour de la rentrée, par exemple, ne devrait jamais pouvoir retourner en cours de l’année, car lors du prochain cours, il ne sera accepté que s’il a une justification à son absence, qu’il ne peut fournir car il a séché ; lors du troisième cours il devra désormais fournir une justification à ses deux absences, ce qu’il ne pourra pas faire d’avantage, de sorte que l’année devrait s’achever là pour lui, dès le premier jour. C’est un phénomène semblable qu’on observerait dans le droit à la parole des candidats qui précède l’élection présidentielle : ceux qui auraient une seule fois remporté les élections, ou qui auraient eu une fois un grand nombre d’intentions de vote, seraient assurés d’avoir le monopole de la parole la fois suivante, et puisque les outsiders ne pourront pas alors la leur disputer, les gagnants d’un jour auraient la parole en fin de compte pour la postérité. C’est d’une telle manière que la loi entend accorder le principe de l’hérédité du pouvoir politique au Parti Socialiste et au parti Les Républicains.

4. Repousser l’heure de fermeture des bureaux de vote pour éviter les « fuites »

Ces trois premières mesures qui fixeraient les nouvelles règles de l’élection présidentielle étaient difficiles à avaler ; il était prévu de nous ménager avec la lecture de la quatrième, en apparence seulement cocasse. La mesure numéro (4) prévoit de ne fermer aucun bureau de vote les jours d’élections avant 19 heures, alors que certains bureaux, dans les petites villes, fermaient dès 18h. Mais que se passait-il donc, entre 18h et 19h, dans les petites communes de l’hexagone ? Ce serait un parfait sujet pour le journal de 13 heures : il y a avait « des fuites ». D’après les promoteurs du projet, il semble que l’on ne puisse pas tout à fait éviter de telles fuites, dans ce contexte ‘d’effervescence politique’ que l’on connaît, quand la moitié de la population préfère profiter du dimanche pour rester un peu plus longtemps au lit, mais du moins on pourrait, en fermant les bureaux de vote plus tardivement, éviter que les premiers résultats anticipés ne se propagent trop tôt, et faussent peut-être les derniers votes, si la tendance était déjà connue des derniers votants. Cette dernière mesure n’a en réalité rien d’anodin, car elle montre la parfaite cohérence entre deux mouvements.

D’un côté, c’était l’objet des trois premières mesures, l’élection présidentielle est rigoureusement verrouillée, la parole politique confisquée, et toute possibilité de débat « démocratique » ôtée. De ce côté l’événement de l’élection devient un pur exercice de passation du pouvoir, à un degré inouï dans l’histoire française. Mais, d’un autre côté, les formes de l’élection deviennent plus régulières et plus justes que jamais, la procédure devient même impressionnante de régularité. C’est un peu comme si nous pouvions être dédommagés qu’un jeu truqué soit sauvé par l’observation de règles scrupuleuses qui ponctuent son déroulé. Les gagnants des élections seraient encore davantage connus d’avance, sans aucun doute possible, mais ils se plieraient à des règles de justice encore plus strictes lors de la passation de pouvoir. C’est encore une vieille recette. C’est faire comme si la justice dans l’élection présidentielle se jouait le jour de l’élection présidentielle, et non, par exemple, lors de la course à l’investiture, qu’on s’emploie à rendre plus tracassière que jamais pour les partis minoritaires afin de les en écarter. Donner plus d’apparence de justice à l’élection dans ses formes, d’un côté, en l’ayant évidé de l’autre de tout contenu démocratique qui pouvait lui rester, est un vieux tour qui ne peut pas toujours marcher.

Un tel cynisme nous rappelle Manuel Valls lâchant dernièrement ce « Hé bah vous l’aurez » en réponse aux luttes contre la Loi El Khomri. Un tel pouvoir facilite tâche de ceux qu’il gouverne, il a le mérite d’être clair, et ainsi d’ôter chez eux les illusions à son sujet qui les paralysaient. La Loi Travail a déclenché un vaste mouvement de protestation, notamment pour de telles raisons. On peut espérer que le projet de « modernisation » des règles de l’élection présidentielle, qui a déjà beaucoup choqué, non seulement suscite lui aussi de l’opposition, mais conduise à une remise en cause plus profonde du régime politique actuel, que nous acceptions ou tolérions par routine, ou parce que nous pensions sincèrement qu’il constituait encore le cadre possible de la démocratie et d’une politique juste.

Dans l’immédiat, c’est d’abord dans l’opposition à ce projet de « modernisation » des règles de l’élection présidentielle que la bataille contre la rigidification inacceptable du régime pourra être menée, et que des enjeux politiques bien plus importants que celui de l’heure de fermeture des bureaux de vote les jours d’élection pourraient être soulevés. Dans le contexte de ces dernières semaines en France où les protestations semblent trouver leurs voix et une nouvelle énergie pour les défendre, pour l’accueil des réfugiés, contre la Loi Travail, l’opposition à un tournant autoritaire du régime pourrait trouver la sienne. Les promoteurs de la loi portant sur l’élection présidentielle l’auraient en tout cas bien cherché.


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