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Inflation

SNCF : les organisations syndicales vont-elles signer l’accord salarial ?

Les organisations syndicales doivent annoncer d'ici mercredi si elles signent l'accord salarial scandaleux proposé par la SNCF portant sur 1,8% d'augmentation. Que vont faire la CGT Cheminots, SUD Rail et la CFDT et quelle suite après ce qui est vécu par les cheminots comme un véritable chantage ?

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SNCF : les organisations syndicales vont-elles signer l'accord salarial ?

Crédits photo : Révolution Permanente

Provocation, chantage et fake news

Mercredi 8 novembre, ont eu lieu les négociations annuelles obligatoires à la SNCF pour discuter d’éventuelles revalorisations salariales pour l’année 2024, suite à une année 2023 d’inflation encore galopante. Tout d’abord, il faut partir du fait que l’entreprise a déjà réalisé un premier semestre avec 20,7 milliards de chiffre d’affaires, une augmentation de 2,2% par rapport au premier semestre 2022. Il y a donc fort à parier que comme pour le bilan financier de l’année 2022, qui s’est clôturé avec un bénéfice de 2,4 milliards après impôts et 41,4 milliards de chiffre d’affaires, la direction annonce aussi pour l’année 2023 un nouveau record de profits.

Malgré cette situation de bénéfices record, la direction de la SNCF, par la voix de son nouveau DRH groupe M. Philippe Bru, promu à ce poste après avoir détruit méthodiquement les conditions de travail des cheminots d’Occitanie où il était directeur régional, a fait des propositions totalement dérisoires aux cheminots. Pire, actuellement elle opère un chantage inacceptable. La SNCF a en effet proposé 1,8% d’augmentation, 400 euros bruts de prime de fin d’année, en plus de quelques miettes supplémentaires, tout en menaçant les organisations syndicales sur le fait de rabaisser le pourcentage d’augmentation à seulement 1% et de supprimer les 400 euros de prime, si elles ne signent pas cet accord misérable.

Ce chantage inacceptable est un scandale, au moment où des millions de travailleurs dans le pays plongent dans la précarité à cause de l’inflation. Déjà, la proposition de 1,8% en cas de signature est une véritable provocation, mais quelle est la raison pour ne pas donner 0,8% supplémentaire et la prime de 400 euros, si la direction dit elle-même qu’elle a les moyens de les donner ?

Aujourd’hui, la direction joue avec les nerfs des plus petits salaires de la SNCF, dont ceux qui démarrent avec les plus petites qualifications et trouvent leurs salaires de base en dessous du SMIC, qui est aujourd’hui à 1747 euros bruts. Pour éviter de revaloriser ne serait-ce que les bas salaires de la SNCF, la direction se cache derrière les éléments variables de solde, tels que le travail de nuit, dimanches et fêtes, ou encore la prime de travail, qui aident à porter les salaires des cheminots qui ont parfois 10 ou 15 ans d’ancienneté à à peine quelques dizaines d’euros au dessus du SMIC.

Il faut aussi lier à cette question des salaires, les difficultés pour la SNCF à recruter tant elle est peu attractive aujourd’hui. Elle peine même à maintenir les cheminots, pourtant formés à coût élevés, dans l’entreprise. Ce qui in fine, conduit à une situation permanente de sous-effectif, double punition pour les agents qui ne peuvent faire face à la charge de travail et qui voient leurs congés refusés tout en recevant, avec cet accord, la garantie d’un pouvoir d’achat moindre en 2024.

La direction a par ailleurs produit une communication interne à destination de tous les cheminots, où elle affirme que « sur trois ans, entre 2022 et 2024, les cheminotes et les cheminots auront bénéficié d’une augmentation inédite de leur rémunération de 17% en moyenne et jusqu’à 21% ». Cette affirmation mensongère et en « trompe l’œil » cache une réalité bien différente et est une nouvelle preuve de mépris de la part de la direction envers les cheminotes et les cheminots. Ces sommes, qui paraissent presque astronomiques, sont en réalité calculées en faisant une moyenne de ce que l’ensemble des salariés ont touché ces dernières années, du salaire du PDG à plusieurs centaines de milliers d’euros par an aux petits salaires en bas de l’échelle, mais également les augmentations individuelles, l’ensemble des primes, les éléments variables de solde, etc.

C’est le même mécanisme qui avait amené le PDG M. Jean-Pierre Farandou à expliquer dans les grands médias, lors de la dernière grève, que « les cheminots gagnent en moyenne 3.500 euros », en cachant derrière qu’il touche un salaire astronomique de plusieurs centaines de milliers d’euros annuels, contrairement aux agents commerciaux, aux agents d’entretien ou maintenance ou encore de l’aiguillage, qui galèrent à boucler les fins de mois et à payer leurs factures. Dans un contexte de dégradation permanente de nos conditions de travail, la suppression de plus en plus de postes et les réorganisations, il s’agit donc d’une véritable provocation qui risque de mettre le feu aux poudres.

Les organisations syndicales vont-elles signer cet accord ?

Face à cette mascarade, la direction de l’UNSA Ferroviaire s’est empressée de communiquer qu’elle allait signer cet accord de la honte, se contentant simplement de consulter le « bureau national du syndicat », qui aurait validé l’accord à 88%, et non pas l’ensemble de leurs adhérents. Quant à la CFDT, il est très probable qu’elle signe également, dans la continuité de leur signature de l’accord salarial de l’année dernière, d’ores et déjà très en deçà de l’inflation, qui avait octroyé une augmentation de 2% aux cheminots. La direction de la CFDT Cheminots a d’ailleurs déclaré publiquement que « l’accord comporte des avancées concrètes ». Même s’ils doivent communiquer leur position officielle le 21 novembre, ces déclarations laissent présager de la suite.

Cette probable signature par ces deux syndicats, en plus de céder à un chantage scandaleux de Philippe Bru, s’appuie sur le discours de certains cheminots qui pensent qu’il serait possible de signer pour s’assurer la prime de fin d’année et de se mobiliser ensuite pour obtenir une augmentation digne de ce nom. Mais c’est se bercer d’illusions, car si cet accord était entériné, les éventuelles revendications futures sur les salaires seraient repoussées aux prochaines NAO, à la fin de l’année 2024.

Pour ce qui est de la CGT Cheminots et SUD-Rail, les deux syndicats les plus combatifs à la SNCF, n’ayant pas signé l’accord salarial de l’année dernière, il est probable qu’ils ne soient donc pas signataires de cet accord non plus, étant donné qu’il propose un pourcentage encore plus dérisoire. Pour ce qui est de SUD-Rail, une consultation des adhérents et adhérentes est en cours et le bureau fédéral devrait communiquer sa décision le 21 novembre.

Les cheminotes et les cheminots doivent se préparer à la grève pour arracher des vraies augmentations de salaire !

Il apparaît comme une évidence que la signature d’un tel accord de la honte, encore moins après le chantage de la direction, ne peut pas être une solution face à une inflation qui ne cesse de grimper. La réalité c’est que la différence entre 1,8 ou 1% pour les cheminots qui gagnent entre 1400, 1500 ou encore 2000 euros brut est complètement dérisoire, au regard des enjeux réels de précarité et d’une inflation qui ne risque pas de régresser dans les mois à venir. Ce que les cheminotes et cheminots comprennent de plus en plus est le fait que rien de considérable en termes d’augmentation salariale ne pourra être obtenu sans un rapport de forces qui oblige la direction à lâcher une partie plus conséquente des bénéfices qu’elle a fait grâce au travail des cheminots.

La lettre adressée par la Fédération SUD-Rail aux autres organisations syndicales à la sortie de la table de négociations où elle affirme qu’il devient urgent de « construire une puissante mobilisation, exclusivement sur le sujet des salaires », avec « plusieurs journées d’action en décembre, qui engloberaient les grands départs » a fait beaucoup parler les éditorialistes et commentateurs des grands médias. Ces derniers ont tenté d’accuser les cheminots de « prendre en otage encore une fois » les usagers pendant les fêtes de fin d’année. Pourtant, si un mouvement de grève devait voir le jour au mois de décembre et pendant la période des grands départs en vacances, celui qui fait du chantage et qui prend les usagers « en otage » c’est bien la direction de la SNCF car elle refuse de répondre aux revendications légitimes des cheminots. Car rien ne l’empêche, d’ici décembre, de lâcher des véritables augmentations de salaires, à la hauteur de ce que les cheminots auraient besoin pour vivre dignement.

Une chose est sûre : le PDG Jean Pierre Farandou, le DRH groupe Philippe Bru et l’ensemble de la direction de la SNCF ne céderont pas sans que les cheminotes et les cheminots se donnent les moyens de construire le rapport de force, sans que l’on s’organise à la base au-delà des organisations syndicales qui décideraient de signer cet accord qui ne répond en rien aux attentes des cheminots.

Au-delà de ce qui sera décidé, voire signé, il s’agit donc de se préparer à la grève. Pour cela, nous devons également nous adresser aux usagers pour exiger, ensemble, des solutions de la part de la direction, non seulement pour augmenter les salaires des cheminots, et permettre ainsi d’améliorer les conditions de transport des usagers, mais aussi pour commencer à poser la nécessité d’une lutte d’ensemble pour les salaires, de l’ensemble du monde du travail, dans le public comme dans le privé. Une mobilisation d’ensemble qui doit poser sur la table la question de la nécessaire indexation automatique des salaires sur l’inflation afin de ne pas être obligés d’être à la merci des patrons une fois par an lors des NAO.


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