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Retraites complémentaires

Agirc-Arcco : les syndicats entérinent la possibilité d’une baisse des pensions par rapport à l’inflation

Ce mercredi, les négociations des retraites complémentaires entre organisations patronales et syndicales se sont clôturées par un accord actant d’une probable baisse des pensions réelles dès 2024. Un nouveau signal de l’impasse du dialogue social.

Alexis Taïeb

6 octobre 2023

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Agirc-Arcco : les syndicats entérinent la possibilité d'une baisse des pensions par rapport à l'inflation

Ce mercredi, les négociations bipartites entre les organisations patronales et syndicales sur le régime de retraite complémentaire de l’Agirc-Arrco, commencées il y a cinq semaines, se sont conclues par un accord autour d’un texte dont la ratification finale est prévue pour le 11 octobre, et l’application pour le 1er novembre.

Si certaines organisations font mine de marquer une distance avec l’accord en raison de l’ingérence de l’Etat dans les discussions, comme la CPME et l’U2P du côté du patronat, ou encore la CGT et de FO du côté des syndicats, personne ne s’est y opposé formellement. Sauf coup de théâtre, toutes les organisations devraient signer ce texte qui fixe les règles de l’organisme pour les quatre prochaines années (2023 – 2026).

Parmi les mesures annoncées, le texte acte d’abord de la suppression du bonus-malus. Une mesure créée en 2015 par le gouvernement Hollande, qui incitait les gens à travailler trois ans de plus pour percevoir un bonus de 20% sur leur retraite complémentaire durant un an, ou alors à subir un malus de 10% pendant trois ans. Ensuite, c’est l’instauration d’un cumul emploi-retraite qui a été acté et qui permettra, selon le nouveau modèle appliqué au régime général, d’accéder à de nouveaux droits pour les retraités qui décideront d’avoir un emploi, tant que le salaire reste inférieur à 3 666 euros brut.

Une augmentation minimale de 4,9% des pensions en 2023 et des revalorisations en dessous de l’inflation après 2024 !

Mais l’annonce la plus importante de cet accord concerne la revalorisation des pensions. En effet, alors que l’inflation se maintient à des niveaux élevés depuis de longs mois, notamment pour les produits de première nécessité comme le carburant ou de les agroalimentaires, et que les hausses de salaires en deçà de l’inflation entérinent des pertes réelles, les retraités subissent, eux aussi, les effets de la crise.

Dans ce contexte le gouvernement, fin septembre, a annoncé une hausse minimale de 5,2% des pensions versées par l’Etat dans le cadre du régime général des retraites à partir du 1er janvier 2024. Jusqu’à ce mercredi, la question des pensions complémentaires était, elle, encore en suspens, alors même qu’elles représentent une part importante de la somme totale perçue par les retraités qui travaillaient dans le privé (entre 20% pour les salariés précaires et 60% pour les cadres).

Les organisations syndicales qui réclamaient une augmentation de 5% des pensions, ont accepté que cette augmentation soit fixée à 4,9% pour 2023, soit pile poil au niveau de l’inflation sur un an au mois de septembre. Mais surtout, l’accord prévoit que, pour les prochaines années, les pensions pourront être revalorisées au niveau de l’inflation moins 0,4%. Concrètement, les syndicats actent la régression sociale.

En guise de couverture, l’accord prévoit bien que le Conseil d’Administration de l’Agirc-Arrco puisse combler ce manque de 0,4%, mais seulement en fonction de l’état des finances de l’organisme. Une mise à niveau d’autant plus hypothétique que le gouvernement a prévu de faire des économies sur les petites pensions du régime général en ponctionnant les fonds de l’organisme.

Le gouvernement nous enfume et veut prendre sur la retraite complémentaire pour augmenter les petites pensions du régime général

Le gouvernement en effet, a décidé de se mêler à ces négociations et d’exiger auprès des organisations patronales et syndicales que chaque année l’Agirc-Arrco verse une somme de 1 à 3 milliards d’euros à l’Etat afin d’augmenter les petites pensions du régime général. Un véritable scandale et ce à plusieurs niveaux. D’abord parce qu’un milliard d’euro correspond environ à 1,1% de revalorisation. Autrement dit, avec un telle ponction le gouvernement s’assure quasiment que le CA de l’Agirc-Arrco ne compense jamais la diminution annuelle des revalorisations de 0,4% prévue dans le cadre de l’accord.

Une réalité dénoncée par l’ensemble des directions syndicales. « Le gouvernement nous impose une réforme violente avec la retraite à 64 ans, et là maintenant il veut nous empêcher d’améliorer la pension des salariés du privé. Il ne faut pas se moquer du monde » a ainsi expliqué Sophie Binet sur France Info.

Ensuite, parce que l’augmentation des petites pensions du régime général constituait la seule promesse « sociale » de la réforme des retraites. Concrètement, le gouvernement veut donc ponctionner le régime complémentaire de l’Agirc-Arrco pour augmenter les pensions du régime général. Ou comment déshabiller Paul pour habiller Pierre.

En guise de réponse, les organisations patronales et syndicales ont prévu la mise en place d’un groupe de travail paritaire au premier semestre de 2024, afin d’étudier un la possibilité d’appliquer une « mesure de solidarité » envers les petites pensions dans le cadre de l’organisme. Une annonce on ne peut plus floue qui n’engage à rien pour le moment. Par ailleurs, tout cela ne changera pas grand-chose, étant donné que le gouvernement a d’ores et déjà prévu de passer en force avec la loi de financement de la Sécurité sociale pour instaurer cette mesure.

S’il fallait une nouvelle démonstration, voilà en tous cas un nouvel exemple de l’impasse constituée par le « dialogue social ». Celui-ci en effet, ces dernières années, n’a cessé de prouver qu’il n’était qu’une courroie de transmission des contres réformes sociales et un moyen de protéger les profits du patronat. Aussi, la ratification de la baisse des pensions réelles pour les retraites complémentaires cette semaine doit définitivement nous convaincre qu’à rebours de cette logique, l’heure est à la construction d’un plan de bataille pour aller chercher des augmentations des salaires et des pensions de 400 euros et leur indexation sur l’inflation, seule mesure à même d’endiguer réellement ses effets.


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