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Edito

Y a-t-il quoi que ce soit à espérer du retour du dialogue social entre syndicats et patronat ?

Ce mercredi, les syndicats et le patronat étaient réunis à Matignon pour relancer le dialogue social. Malgré toutes les preuves d’autoritarisme du régime, les syndicats continuent de croire en la possibilité de gagner de nouveaux droits par le dialogue social.

Arthur Nicola

13 juillet 2023

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Y a-t-il quoi que ce soit à espérer du retour du dialogue social entre syndicats et patronat ?

Crédits photos : Sophie Binet en direct sur BFM TV à la sortie de Matignon

Mais pourquoi diable les directions des syndicats continuent-elles de croire à la possibilité de faire avancer nos droits grâce au dialogue social ? C’est la question qu’on peut légitimement se poser en ce début d’été, alors qu’une réunion avait lieu ce mercredi entre syndicats et patronat, sous le patronage d’Elisabeth Borne.

Une discussion où les cinq syndicats représentatifs (CFE-CGC, FO, CFDT, CGT et CFTC) étaient présents aux côtés des trois chambres patronales (Medef, CPME, U2P), d’Elisabeth Borne et d’Olivier Dussopt, afin de discuter un calendrier de travail entre « partenaires sociaux » pour aboutir au « nouveau pacte de la vie au travail » voulu par Emmanuel Macron après les retraites. Comme nous l’avions détaillé récemment, les sujets de négociations sont nombreux : emplois des séniors, salaires, assurance chômage, pénibilité, régimes Agirc-Arrco, compte-épargne temps universel entre autres sujets.

Lire aussi : Les syndicats annoncent le retour du dialogue social avec le patronat, mais pas de plan de bataille

Changement de méthode ou changement de discours ? Peu importe, toujours des miettes pour les travailleurs !

Depuis 2017, Emmanuel Macron n’a cessé de démontrer sa façon de fonctionner : imposer, sans négociation, des réformes anti-sociales, et tenir le plus possible l’épreuve de la rue pour faire aboutir ses textes. Les cinq mois de bataille contre la réforme des retraites en sont sûrement le meilleur exemple. Quelques mois plus tôt, c’était la réforme de l’assurance chômage qui était imposée de la même manière.

Après des mois de complaintes, alors que le gouvernement est plus isolé que jamais après cinq mois de manifestations et de grèves, ce dernier a finalement accepté d’ouvrir la porte aux syndicats. Une ouverture dans laquelle se sont engouffrées tous les syndicats, plus à l’aise dans les salons des ministères que dans la rue. « Il y a clairement un changement de méthode », s’est félicité Yvan Ricordeau, numéro 2 de la CFDT, à l’issue de la réunion.

« Le dialogue social », ce sera toujours négocier la régression sociale !

Mais peut-on seulement parler de porte ouverte ? Quand on regarde dans le détail ce dont veut bien discuter le gouvernement, on se rend compte que quelque soit la méthode, le fond restera le même. Il sera impossible de remettre en cause la réforme des retraites, les deux réformes de l’assurance chômage, les ordonnances loi travail XXL de 2017 et aucune assurance de pouvoir discuter augmentation générale des salaires, discussion déjà mise de côté de fait. Et si c’était le cas, ce serait bien entendu pour lâcher des miettes.

Ce qu’il reste au menu des négociations, ce sont les éléments censurés de la réforme des retraites : index sénior, « usure professionnelle » (pour ne pas dire pénibilité), parcours et reconversion professionnelle. Sur les salaires, le gouvernement a seulement cédé sur la possibilité de faire un « état des lieux » sur les bas salaires.

Si la secrétaire générale de la CGT Sophie Binet se félicite d’« une reprise en main qui marque le début des quatre prochaines années » et que son homologue de la CFDT, Marylise Léon, est heureuse de voir « des éléments de réponses sur le changement de méthode », que vont changer ces négociations pour les dizaines de millions de travailleurs du pays ? Alors que les grosses réformes sont passées, on propose aux syndicats un calendrier de négociation d’une année sur des miettes.

Rompre avec le « dialogue social » , il nous faut un plan de bataille !

Et qu’on se rassure, c’est bien l’Etat qui continuera de diriger tout le processus : c’est lui qui fixera les objectifs des réunions, avant d’envoyer des lettres de cadrage, tout en pouvant reprendre tout accord signé a posteriori. A moins de penser que les objectifs d’Elisabeth Borne et ceux du monde du travail sont les mêmes, les dés sont donc pipés.

Plutôt que d’accepter cet état de fait, et réfléchir à la façon de construire un rapport de force, par la grève et par la rue, les directions syndicales s’entêtent : pour obtenir de nouveaux droits, et arrêter d’en perdre à chaque contre-réforme, il faudrait continuer de tirer la manche d’Elisabeth Borne pour qu’elle accepte de « retourner à la table des négociations ».

Comment peut-on croire une seconde qu’Elisabeth Borne et le Medef écouteront gentiment les représentants syndicaux autour de petits fours à Matignon s’ils ne les ont pas écouté après 14 journées de manifestations de masse et de grève ? Les seuls gagnant de cette reprise du dialogue social sont Elisabeth Borne et Emmanuel Macron.

L’heure n’est pas au dialogue social : même en faisant toutes les courbettes du monde, le gouvernement montre qu’il ne veut rien négocier avec les syndicats, si ce n’est quelques petites miettes. Il faut en prendre acte, et reprendre la préparation des combats à venir. Pour faire retirer les lois sur le chômage, la réforme des retraites, et obtenir des augmentations générales de salaires pour rattraper l’inflation, il n’y a que la grève générale qui pourra faire céder un gouvernement et un patronat radicalisés.


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Arthur Nicola

Journaliste pour Révolution Permanente.
Suivi des grèves, des luttes contre les licenciements et les plans sociaux et des occupations d’usine.
Twitter : @ArthurNicola_

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